mardi 28 septembre 2010

The Town de Ben Affleck


Ben Affleck, s’il est un acteur dont on aime à se moquer pour son talent incertain, est un réalisateur que l’on suit d’un œil plutôt curieux et attentif depuis son premier film, Gone Baby Gone, dans lequel il mettait en scène son frère Casey qui lui est un acteur que l’on ne peut qu’admirer et dont on attend également le passage derrière la caméra.

Si Gone Baby Gone était loin d’être parfait, il présentait néanmoins quelques sérieux arguments, tant sur le rythme de l’action et la profondeur des personnages. C’était réellement plus sur l’intrigue que l’on s’éparpillait un peu. Disons qu’avec ce second film, l’inversion est totale et le résultat, fort banal.

The Town reprend les plus grands standards du polar urbain et du film de « casse ». Deux amis d’enfance, faux frères liés par leur histoire commune, une bande, une nénette un peu sympathique, accessoire indispensable aux états d’âme d’un anti-héros au grand cœur malfrat malgré lui. Le poids de la société, l’écrasement du système, l’attachement au territoire, l’impuissance et le vide astral entre ce monde et ce lui des autres. The Town aurait pu, d’ailleurs, être un film intéressant sur la castration symbolique des classes sociales défavorisées (thème qu’il aborde d’ailleurs à travers la figure du père et du parrain…). Mais non, pas vraiment.

Voilà grosso modo le contexte psychique dans lequel l’action prend forme. Une bande de braqueurs du quartier de Charlestown (ville de Boston) réalise un casse et prend en otage la directrice d’agence. En la relâchant ils lui confisquent son permis de conduire et se rendent compte qu’elle habite dans le quartier, à quelques rues de chez eux… Notre anti-héros, joué par Ben Affleck himself, se dévoue pour suivre la dame et s’assurer qu’elle n’aille rien dire au FBI sans se douter, bien évidemment, qu’ils allaient tomber amoureux l’un de l’autre.

Waouh, en l’écrivant comme ça, on se rend un peu plus compte de ce qui plombe littéralement les intentions assez louables d’Affleck. La tendresse. Inattendue dans un film de gangster, elle s’insinue petit à petit dans tous les plans, dans tous les interstices qu’il lui laisse et finit rapidement par être partout à tel point que, la confrontation entre les deux frères (que finalement tout oppose), vire au canular, à l’apostrophe. Elle ne tient qu’une scène, celle où l’un révèle à l’autre qu’il ne pourra jamais quitter Charlestown car il en est à la fois le fruit (avarié), l’intime détenteur et le vigoureux protecteur.

On décroche ; l’action, tout à fait honorablement mise en scène avec même quelques prises de vue intéressantes dans les courses poursuites, s’éteint petit à petit et le grand Ben, qui donne l’impression de se racheter une virginité cinématographique, prend toute la place avec ses grandes intentions et sa morale insistante.

Seule véritable confirmation, celle qu’Affleck est un de ces cinéastes urbains qui donne toute sa place au lieu de l’action en lui confèrant un rôle à part entière. La ville, filmée sous toutes ses coutures, est une des actrices principales du film. En plan aérien comme dans les courses poursuites, dans les expressions comme dans les us et coutumes, elle est prégnante, intense, inévitable. C’était déjà le cas dans Gone Baby Gone ; le film s’ouvrait sur des images tournées en 8mm qui donnaient un ton, une couleur, une chaleur, non sans rappeler Gus Van Sant, avec qui le bonhomme a travaillé sur Will Hunting.

Le hic est peut-être musical. Ici Affleck ne semble pas avoir choisi de faire de la musique de rue, des productions locales un instrument d’ancrage qui aurait pourtant été d’une très grande aide pour son récit et pour son ambiance. Dommage, il y avait de la place pour mieux…


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