mercredi 28 août 2013

TRICKY - False Idols

Rien compris. Que dalle. Rien du tout. Je reprends pour ceux qui suivent pas, au fond. Oui, vous deux là... Bon. En 2012, Thaws est d'une discrétion étonnante. Plus rien, pas un signal que dalle. Le dernier album en date est un bouse pop inoffensive qui n'a aucune saveur. Il fait néanmoins la couverture d'un nouveau magazine fort soigné et prometteur, Matter, où entre moult clichés mode, il cause d'un album sombre que le type venu l'interviewer concède ne ressembler en rien à ce que le kid a produit ces derniers temps. L'histoire, on ne va pas te la refaire : ici on fait partie des gens qui continuent de jeter une oreille systématiquement, par politesse, mais on sait bien que Tricky c'est une affaire plié depuis 99. Bref, on tique. Bêtement. Mi 2013, voilà enfin que l'album se précise et se pointe. Et là gros engouement. On parle d'un Maxinquaye 2, de son meilleur album depuis 15 ans, d'un retour aux sources avec le son d'aujourd'hui. En promo, à sa grande habitude, le type nous sort que ses deux LP précédents étaient là pour payer les factures et qu'il se rend compte aujourd'hui qu'ils n'étaient pas bons (et il la refera). Sauf que Knowle West Boy, son album retour après un silence inexplicable de 5 ans à l'époque est bien plus consistant que ce nouveau disque. Ici, un gros bloc mal gaulé, qui ne reprend en RIEN le mythique premier enregistrement, ni cette science du rythme concassé ni cette obsession pour les ambiances les plus oppressantes. Pas mauvais, pour de la variété. Mid tempo tout le long, on n'est jamais surpris. Des plans à sauver il y en a, comme ce début presque digne de Coil en intro de Tribal Drum, où ce Valentine qui fait illusion du début à la fin. On est même plutôt emballé par le très lourd Does It avec sa basse poisseuse et ses handclaps. Le reste ? Du danger pour la matinale de France Inter. Et encore. On est même interloqué par la Chinese Interlude, risible démo Bontempi. Par rapport à la promesse, la chute est rude. On a rien compris. Que dalle. Rien du tout.

lundi 26 août 2013

BROADCAST - Berberian Sound Studio

Mine de rien, les plus gros calibres de Warp (reste encore Afx et LFO, soit deux fantasmes absolus pour moult fanatiques) auront dégainé un album cette année. Autechre avec son rythme régulier n'a pas surpris grand monde; on ne peut en dire autant de Boards Of Canada, longuement attendu. Beaucoup plus étonnant donc, que ce nouveau disque de Broadcast puisque le groupe n'existe plus suite à la disparition de sa voix, Trish Keenan. D'ailleurs le "retour" de Broadcast prend les allures logique d'un groupe qui n'existe plus : la voix disparue est totalement absente et la musique est celle d'une bande originale pour un film indépendant, Berberian Sound Studio, qui cause d'un sound designer anglais devant aller besogner en Italie pour un film glauque avec le savoir faire de la BBC, présenté l'an dernier à L'étrange Festival (que notre collègue ne nous a pas présenté, lui). Composé alors typiquement de sonorités électroniques, d'échos, de modulation en anneau et de claviers vintage, le son se mèle aux mélodies et climats des films Italiens - giallo. Une quarantaine de vignettes sonores chaudes et effrayantes, comme autant de sonorités fantomatiques qui font aussi bien écho au sujet de l'exercice qu'à la situation de Broadcast actuellement. Entre clavecins et flutiaux, choeurs et hurlements, ce sont les rythmes rares et les épais oscillateurs analogiques qui mènent et donne son identité au projet. Angoissant et enivrant en même temps, le thème se fond à merveille avec le psychédélisme pastel traditionnel du duo.

vendredi 23 août 2013

THE ASPHODELLS - Ruled by passion destroyed by lust

Bateau garé en double file, je descend dans la cave de mon club préféré. Veston mal placé, moustache peignée rapidement, la graisse de mes cheveux encore suintante, prêt pour aller danser un jerk nocturne sans fin. Je regarde l'heure. Ma montre à gousset indique que la nuit est déjà bien avancée. Entre rassemblement de poivrots habitués au lieu et gitans en recherche de conflit, le club est bondé d'ondes négatives. Pas grave. Les basses sournoises sont relativement tranquilles mais font leur effet, le bas ventre est secoué chez l'ensemble de mes confrères. L'alcool a fait le reste : personne ne se rend compte du son extrêmement fort du melodica qui se débat derrière. Coup de rasoir sur la mousse de la première pinte, on enfourne rapidement. On reste concentré sur le rythme. C'est l'hypnose et ça ne fait que commencer. Guidé par la passion. C'est certain. Deuxième godet et mon froc en velours, bien qu'ample, ne cache plus que mon genoux ne résiste plus à ses roulements de 808 intempestifs. Troisième godet et le ton monte. Le type qui s'acharne sur sa guitare n'a pas changé les cordes depuis une éternité. Complètement rouillé, le garçon risque le tétanos à chaque nouvelle note. Nouveau breuvage. J'ai arrêté de compter. Je ne vois définitivement plus clair et la fille qui joue au strip burlesque est fusillée des oreilles par une montée de moog fulgurante. Elle ne s'en remettra pas. La chute inévitable. Le ton monte entre les gitans et les types qui tiennent les murs, rivalisant du point de vue du taux d'alcoolémie. Les coups sont imprécis mais efficaces. Du sang. Le type qui marmonne des trucs au micro, avec son accent à couper au couteau ne s'arrête pas pour autant. Une nappe de Prophet inonde la salle. Bagarre totale. Le jerk incessant doit pourtant cesser. Je remets mon veston et j'embarque au passage la fille au sol. Direction mon bateau. Ruiné par la luxure.

jeudi 22 août 2013

GHOSTFACE KILLAH & ADRIAN YOUNGE - Twelve Reasons To Die

Si certains estiment que le WU publient des albums de plus en plus faible (du moins largement incomparable avec l'âge d'or du posse), d'autre voient chez Ghostface Killah, le prolifique, le seul aujourd'hui apte à assumer le poids et l'héritage du collectif via ses solos. Et si on demeure toujours loin du fameux et classique "Iron Man", ce nouvel album est peut-être celui qui, oui, en effet, fait perdurer un peu plus et avec vigueur l'aura du Wu. Alors non, on ne considère pas ce nouvel album comme "un disque de plus". Celui-ci a du grain et du caractère. Derrière son visuel très horrorcore faussement vintage, le MC s'associe à Adrian Younge pour balancer un album à la production mat, loin des sons clinquants et précis actuels. Pas (ou peu) de samples et de machines là dedans. Des batteries amples et vives, des basses modestes, des guitares passées au trémolo obsédant et des claviers type Hammond ou Wurlitzer pour habiller l'ensemble. Une odeur de soul se dégage du truc, efficace et charnue. Avec un esprit snuff Tanrantinesque (facile), GFK et Younge dégagent sur cet album une sorte d'esprit qu'on trouve assez proche, finalement, du Enter the 37th Chamber du collectif El Michels Affair, qui ré-interprétait le premier LP du Wu Tang. On boucle la boucle, en somme.

mercredi 21 août 2013

RETOX - YPLL

L'autre jour je suis tombé sur un article qui se foutait de la trogne du label Epitaph et de ses signatures ridicules, voir complètement vulgaires - comme Falling In Reverse si vous êtes curieux. Pourtant, Epitaph prenait déjà cher il y a 15 ans quand Snot leur dédicassait une chanson ("Mr Brett"). D'autre part, si Epitaph est en effet plutôt marrant à signer des groupes de merde, il reste parfois pertinent, en assurant toujours les sorties de Converge ou en co-signant ce nouveau disque de Retox (avec Three One G). Second album (?) pour le quatuor punk hardcore, et on retrouve la même mixture que sur l'expéditif premier enregistrement. Du punk vorace, qui enquille les riffs sans difficultés sur des morceaux concis. Plus urbain, plus terre à terre que Locust (Gabe Serbian n'est plus de la partie), la distinction entre les deux entités se creusent définitivement. Même si les plans de guitares ont tendances à aller utiliser de la whammy dans tous les sens pour aller chercher ce côté un peu plus étrange, moins classique, on reste loin du spazz SF dégénéré de "l'autre" groupe de Pearson. Et ses effets semblent renforcés à la moitié du disque par des morceaux peut-être plus post punk, en tout cas plus marquant. Dès "Soviet Reunion" on passe du côté vraiment méchant du disque. Les hymnes deviennent addictifs, les morceaux passent du statut "efficace" à "obsédant". "Greasy Psalms" et sa guitare tout en montée arrive sur un riff épique. Et jusqu'à la fin ça débande plus, empilement de moments de bravoure. Pochette magnifique, morceaux mémorables, durée idéale : grand disque de punk.

mardi 20 août 2013

KANYE WEST - Yeezus

Lorsque Beyond The Noize s'est lancé il y a un peu plus de 5 ans maintenant, je n'aurais jamais cru que je parlerais d'une poignée de truc, et Kanye West en faisait précisément parti. Les autres, on verra plus tard- si c'est pas déjà fait. Mais là, inévitable. Le contexte aide aussi.

Imagine qu'en 83, après avoir vendu des tonnes de Thriller (et encore plus pour les décennies à venir) Michael Jackson envoyait ballader son producteur en lui disant "tu me fais chier Quincy avec la Motown, je veux faire du Throbbing Gristle !". Le parallèle peut sembler rapide mais quand le dernier album de Kanye est sorti, les rapprochements avec le mythique album de bambi ont été assez nombreux. De fait, tout le monde ou presque a déjà oublié le débordant My Beautiful Dark Twisted Fantasy, opulent et ambitieux précédent LP. Marre du marché ? En tout cas, ni la paire de fesses la plus célèbre des USA ni sa gestation n'ont donné envie à Kanye de faire un album calme et familiale, mais plutôt d'aller à l'exact contresens. Et niveau invité, le type n'a pas fait dans la légèreté. Daft Punk se pointe et se montre bien plus inspiré que sur son propre album (peut-être la meilleure blague de l'année au final), Evian Christ issu de l'écurie Tri Angle vient aussi mettre son grain de sel, et au milieu de quelques anecdotiques français tendance, Rick Rubin est quelque part à la production, entre confident, inspecteur des travaux finis et manitou. Son nom, pas loin du logo Def Jam ramène quelques vieux souvenirs, entre Slayer et les Beastie Boys. Le visuel est à l'avenant, rappelant le premier LTNO ou le troisième Mos Def : conceptuellement inexistant.

Avec un impact un peu stérile, cet album est pourtant pas mal du tout. Il faut oublier les paroles et la réalisation (les interviews des participants sont délirants, racontant comment maman Kardashian vient parler Louboutin pendant que Kanye essai de mettre de l'ordre dans son palais Parisien pour y voir clair dans son manifeste du bruit), le vocoder et le 7è morceau, seul véritable tâche au projet. West demeure un MC classique qui a fait école (ie. tous les jeunes gaziers qui ont repris son flow vitreux et neurasthénique pour se lancer) mais capable d'aligner des phrases parmi les plus affligeantes au milieu de rhymes bancales. C'est purement le projet global et l'objet musical qui en ressort qu'il faut considérer. Et cet objet a pour mot d'ordre le chaos. Poli, on reste dans les beaux quartiers. Mais chaos tout de même. Entre ses sonorités dissonantes et ses riffs de claviers agressifs, ses beats typés Trap belliqueux, sa production dégueulasse avec des fréquences que le mastering n'a pas su gommer (attention vos enceintes, ça crépite une paire de fois) et ses samples placés n'importe comment, l'album est une sorte de bordel bien élevé et ramassé qui en quelques dizaines de minutes va prendre le temps d'imposer un Kanye West qu'on ne connaissait pas, teigneux. Pour les fanatiques de Death Grips, de Kevin Martin, de Saul Williams, de Food For Animals, de Company Flow, de Dälek, de Roll Deep ou pour les plus anciens de Mark Stewart, de Meat Beat Manifesto, tout ça aura un petit goût d'opportunisme. Mais vu le public de West, on peut se demander de quoi il s'agit vraiment. Pour ceux-là, voilà le truc le plus agressif qui arrivera dans leur Ipod cette année. Et donc, après ? Commercialement risqué (pourtant il cartonne), ce disque est-il une clé vers la suite, un écart isolé ou une excuse pour un album rédempteur à paraître d'ici deux ans ? 

dimanche 11 août 2013

CATHARSIS - Miroiterie

"Tu fais quoi ce soir ?" J'avais pas prévu de bouger, j'avais pourtant bien vu l'affiche circuler mais je sais pas... j'ai cru que c'était une tournée pour remplir le compte, que la motivation était pas vraiment là et puis Catharsis, pour moi, c'est surtout les extensions de CrimethInc et ses débats politiques sur les feu forums HxC, couplé à un groupe culte et intouchable, en haut, au même titre que Converge sans la gloire, et quelque part entre Kiss It Goodbye, Bloodlet et Turmoil. Bref, un truc d'initiés, et pas les plus jeunes, en plus. Force est de constater que le public hardcore se renouvelle peu. Ca ressemble à une sortie d'anciens combattants ce truc. J'aurais eu tort - de pas venir. Dans une miroiterie qui, comme chaque semaine, vit visiblement ses derniers instants, Catharsis (désolé pour les 2 autres groupes, mais j'ai vu le merch et trop de subversion tue la subversion : je vais bouffer) a pris de l'élan et a collé une double tarte en revers lifté en 35 minutes bien tassés. A la fin de la seconde mesure, le chanteur fan de Peter Tosh est dans la foule, le bassiste, d'un autre gabarit ne se privera pas non plus. Si Catharsis est une illustration vigoureuse de puissance, on reste complètement abasourdi par la force de son batteur. Si son kit fait songer à un joueur de prog ou de death, la technique du gentleman lui fait honneur. Roulements insensés, cassures millimétrées, rythme effréné, le type à une endurance et une technique de seigneur. Et si au bout de 35 minutes, on ne regrette pas la conclusion (qui aurait pu être largement amené plus tôt si tout le charabia politique, que les plus sévères jugeront naïf, avait été expédié), on pose le genoux devant tant d'énergie aussi bien distribuée.

Ps1 : Félicitations, une fois n'est pas coutume, à En Veux Tu En V'là !, organisation qui se bouge et qui propose plusieurs concerts par mois sans jamais excédé les 5 ou 6 € par concert !

Ps 2 : Je ne te fais pas l'affront de photos minables, même si je te laisse observer le superbe flyer en tissu violet/carton, alors va jeter un oeil chez cet artisan de l'objectif ici ! 

lundi 5 août 2013

CANNIBAL OX - Gotham

Si les années 90 demeurent aujourd'hui encore un coffre a chef d'oeuvre hip hop, les années 2000 se sont avérées bien plus radines en la matière. Aussi, si on en finit jamais de compter les chef d'oeuvres, toute chapelles et sous genre confondus, de la décennie clôturant le XXè siècle, les disques indispensables produits depuis 13 ans sont nettement moins nombreux. Pourtant, le millénaire s'est ouvert avec un des disques les plus incroyables, novateurs et influents - en théorie, ceci dit, car la vérité c'est que les suiveurs ont été peu nombreux. Tous ceux qui ont posé le diamant sur The Cold Vein savent à quel point ce disque est important, riche, puissant, profond et d'une qualité rare. Aussi, le groupe implosa avant d'enregistrer le moindre soupçon de suite et même si une reformation quelques temps plus tard semblait envisageable, le producteur dudit premier enregistrement clarifia les choses assez vite : El-P balança en interview que malgré toute la volonté derrière le projet, le futur de Cannibal Ox s'avérait difficilement envisageable, laissant les fanatiques en larme et devant se rabattre sur les albums solo de Vordul Mega et Vast Aire. Annonce de retour en 2012, concerts, kickstarter et single, voilà le truc on ne peut plus classique pour le retour d'un groupe dont la sortie d'un nouveau disque semblait plus tenir du rêve impossible pour quelques égarés que de la réalité. Trois morceaux, sans Jaime Meline, trop occupé à enregistrer et à trainer avec Killer Mike, c'est court mais raisonnable. Pochette affreuse (c'est l'histoire de Can Ox, pochette aussi moche que la musique est bonne) dans un 12" comprenant 6 morceaux (les instrus en face B) et peu de surprise. Climat lourd et futuriste, le propos reste sensiblement le même. Mais on apprécie d'entendre le duo ensemble, sur ce qu'on devine être la suite absolument logique de l'inépuisable Cold Vein. Gotham et ses choeurs type BO d'anticipation ramènent à une époque qui semble révolue. Gases in hell est un peu plus direct, brutal, mais se plante avec un refrain creux qui semble se chercher et son sampling moins délicat. Psalm 82 est plus mesquin, rampant, Mega et Air s'y répondant avec efficacité. Un titre clôturant un disque promettant de belles choses pour la suite, mais qui ne possède pas la force d'un "Iron Galaxy" ou d'un "F-Word".