dimanche 6 février 2011

Le discours d'un roi de Tom Hooper

Chaque année offre son grand Colin Firth. Cela pourrait être un nouvel adage. L'an dernier l'acteur britannique était passé tout prêt de remporter une statuette pour sa très belle composition dans le non moins formidable A Single Man de Tom Ford. Mais une telle affirmation reviendrait à faire abstraction d'une carrière qui a longtemps hoquetée entre navets de premier ordre et seconds rôles remarqués. Sa performance chez Ford n'efface pas les horribles Bridget Jones, Love Actually ou encore La dernière légion mais nous rappelle aux bons souvenirs d'un acteur doué qui fut le Valmont de Milos Forman au début des années 90...

D'autre part, il convient pour ce Discours d'un roi de remettre cette performance dans le contexte d'ensemble du film. Colin Firth interprète ici le roi George VI, confronté à un bégaiement qui l’empêche de prendre la parole en publique. Sa femme le pousse dans le cabinet d'un orthophoniste peu orthodoxe qui va bousculer ses royales certitudes et devenir, au fil des ans, son ami.

En voilà donc une belle histoire qui devrait affoler les compteurs à Oscars. Hooper ne prend pas vraiment de risques en adaptant cette pièce de théâtre, suivant en père tranquille une narration chronologique balisée et parfaitement ordonnée, dénuée de la moindre surprise. Le scénario apparaît parfois enfantin tant est si bien que ce classicisme formel passerait presque pour une vision simplette des processus historiques qui cernent l'intrigue.

Car au-delà de la rencontre entre ces deux hommes, il y a un contexte historique lourd. La montée du Nazisme et l'entrée en guerre de la Grande Bretagne. Tout cela passe loin, très loin des préoccupations de Hooper, trop concentré à mettre en boite sa jolie leçon d'amitié. Du coup, son film manque cruellement de profondeur historique et s'affadie au fil des minutes.

Il s'affadie d'autant plus que certaines petites choses deviennent elles aussi très irritantes. Le jeu outré et cabot d'Helena Bonham Carter qui en fait des louches, noyant son personnage dans une surenchère toute burtonienne particulièrement indésirable... Et puis il y a la musique de Desplat, lourde elle aussi, oppressante et vieux jeu.

Tout cela laisse un sentiment assez mitigé au final. L'impression laissée par Firth et Rush, tout deux impeccables, et par les dialogues, finement écrits, est contrebalancée par un manque flagrant d'audace qui semble ramener le cinéma dans des circonvolutions anachroniques, voire ancestrales. Au fond, loin d'offrir une lecture intrigante des méthodes de l'orthophoniste ou de la complexité des relations de pouvoir qui se tiennent entre les deux hommes, Hooper offre juste une petite fable, un gentil Rox et Rouky pour adultes, agréable pour les yeux mais sans grande ambition.

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