Un été suédois soulève un problème qui est récurrent chez nous, celui de la traduction des titres de films étrangers. Un été suédois est en effet la traduction choisie pour Flickan qui signifie "petite fille" en suédois... Alors certes, le film se déroule durant l'été en Suède mais le choix de Flickan n'est pas anodin, comme ne l'est jamais un choix de titre (enfin normalement). Si Edfeldt a choisi pour son premier film de l'intituler Flickan, c'est bien parce que toute son intrigue tourne autour de cette jeune fille à la chevelure rousse et au regard triste. Ceci n'est pas la chronique d'un été suédois mais le récit initiatique d'une petite suédoise qui se déroule durant l'été. Ce qui n'est pas la même chose...
Je referme donc ce lourd aparté (mal écrit et un peu ballot) pour revenir à cette petite chose délicate et fragile. Flickan est un peu comme une de ces babioles sans intérêt pour les grandes personnes mais qui prend une dimension sentimentale voire initiatique pour les enfants. Cette fillette rêve de l'Afrique. Ses parents y partent bientôt et elle est persuadée d'être du voyage. Seulement quelques jours avant le départ, ils lui apprennent qu'elle ne vient pas et qu'elle va passer l'été avec sa tante, qu'elle ne connait pas vraiment. Cette tante est inconséquente et la jeune fille n'aura pas de mal à l'éloigner de la maison, l'envoyant faire du bateau avec un riche bonhomme qu'elle convoite. La gamine reste seule dans sa grande maison, livrée à elle-même...
Flickan sort un brin des sentiers battus et rebattus de l'initiation chez l'enfant en confrontant parfois très cruellement la jeune fille à la réalité du monde qui l'entoure. Edfeldt cadre son personnage dans des plans très serrés, comme s'il l'enfermait dans cette innocence voilée et trouble. Le début du film laisse en effet peu de place à l'espace et aux autres personnages. Puis les plans s'ouvrent peu à peu, timidement, laissant jaillir les autres dans ce micro-univers.
Pour le pire et pour le meilleur. Le film dépeint avec sévérité et noirceur l'irresponsabilité des adultes (les parents de la jeune fille partent aider des enfants en Afrique mais laissent leur fille entre les mains d'une tante immature...), la frivolité des préoccupations adolescentes. Il oppose l'univers complexe, naturaliste et solitaire de sa jeune fille à celui de ses deux amies, deux godiches manipulatrices qui s'invente une célébrité de carton en faisant du play-back sur les chansons d'Abba.
Seulement cette solitude est troublée de toute part par l'irruption d'un charmant petit blondinet dont la jeune fille s'entiche. Les premiers émois, très pudiques, très maladroits sont retranscrits avec une infinie justesse qui met parfois mal à l'aise (comme lorsque la fillette s'assoie sur un miroir les jambes écartées pour dessiner son sexe sur une feuille de papier). On est touché, troublé, inquiet devant l'éclatement de cette jeunesse. On pense à la merveilleuse Swedish Love Story de Roy Anderson (En Karlekshistoria, 1969), monument oublié du film sur l'adolescence.
Enfin Flickan évite le piège nostalgique. Bercée dans une mise en image très raffinée (oeuvre du directeur de la photographie de Morse) le film propose, distille malaise et beauté avec un réalisme élégiaque et clair. Même si elle se situe dans les années 70, l'intrigue touche à "l'universel" à travers une approche pourtant très personnelle du rapport de l'enfant au sexe, à l'amour, à la liberté et à l'autre.
1 commentaire:
Le film suédois Flickan se déroule au tout début des années 80. Le travail sur l'ambiance est très bon. Le malaise avec la danse suggestive sur du ABBA - non sans rappeler Little Miss Sunshine - est à se tordre de rire. Mais la lourdeur des symboles - le têtard devenant grenouille - n'arrive pas à me convaincre de son intérêt.
Enregistrer un commentaire