mercredi 27 juillet 2011

NEUROSIS, La Machine du Moulin Rouge

Même si la majorité des disques passant sur ma platine ne sont plus rangés au rayon "metal", je reste attaché à quelques principes sinon quelques envies. Neurosis fait partie des groupes que je continue d'estimer, et surtout, que j'espérais un jour voir live. Leur dernier passage en salle parisienne date de 99, une année où j'avais à peine l'age de conduire avec un parent. Il semblait inconcevable de revoir la formation culte repasser dans une salle à Paris, surtout que Neurosis semble limiter ces déplacements à quelques points très précis (Londres, le Fury/HellFest, San Francisco ...). Miracle annoncé au printemps 2011: Neurosis jouera à Paris, le 23 juillet.


La machine est blindée, trop remplie même, abusant de la place (on parle de 950 tickets vendus), et affichant complet depuis 2 mois. Neurosis attire les foules, y compris tous ceux qui 12 ans plus tôt n'ont pas fait le trajet et qui veulent enfin voir le phénomène. Je ne m'amuserais pas à faire une liste de tous les présents, mais moults têtes inaperçues depuis quelques temps sont sorties de leur tannière pour l'évènement.


Je vais essayer de ne pas m'étendre sur Amen Ra. Les fans ont aimés, et c'est probablement bien là l'essentiel. Je me rappelle les avoir vu avec Switchblade il y a déjà quelques années et avoir trouvé ça extrêmement médiocre. Au lieu de saborder leur prestation que j'ai pourtant tenter de fuire, je dirais simplement qu'une partie de l'orga n'y croyait pas elle-même, en espérant que ça en dira suffisament long sur la qualité estimée de ce groupe.


Alors Neurosis au complet, avec Josh Graham qui se ballade dans la salle arrive, et ce qu'un bon fanatique appelerait "la messe" commence. Locust Star, le tube de Through Silver In Blood entame le set, suivi de quelques morceaux pris ici et là, de Times of Grace (Belief, End of the harvest) à quelques inédits (deux nouveaux morceaux, pour être plus exact). Le son du groupe semble être immense, mais sur le début, la sono semble difficilement suivre. Le son se précise toutefois au fur et à mesure. Dès la moitié du set, les enceintes de l'ex Loco semblent enfin aptes à suivre. Dave Edwardson est en grande forme, choucroute rouge sur la trogne, tee de crust fait main, il hurle comme un Didier Morville de Californie. Kelly et Von Till lui répondent dans un registre similaire: hochements de tête à tasser de la cervicale et hurlements bestiaux. Landis et Roeder, les forces tranquiles mais indispensables ne font pas tâche pour autant. Les morceaux s'enchaînent sans difficulté, Neurosis assure un show carré et impeccable. Pourtant, il y a comme un goût étrange qui se manifeste assez rapidement et qui s'amplifiera avec le temps: je me fais royalement chier. J'aurais aimer parler pour moi mais dès le lendemain les avis sur la toile traduisaient pour de nombreux présents une forme de déception, certains se demandant si ils sont blasés ou si ils se font trop vieux pour supporter le boucan. De toute évidence le spectacle est pourtant de qualité, mais quelque chose cloche. Mais quoi? Peut-être le sur-professionnalisme du groupe sur scène: rien ne déborde, tout est exactement comme sur disque, sans surprise. Rien ne dépasse excepté quelques pains. On peut facilement adhérer à un groupe qui ne se permet pas d'excès dans sa musique lorsque celui ci joue une musique exigente. On pourra mentionner Tool ou The Locust, jouant une musique extrêmement technique et précise et qui sur scène peut reproduire à l'identique ce qui est enregistré sur disque. Mais Neurosis ne joue pas une musique d'une telle maitrise. D'ailleurs, ça serait oublier que Maynard et ses potes savent aussi partir sur des improvisations et des retouches sur scènes. Alors Neurosis manchot? A moins que ce ne soit l'excès de sérieux de leur musique et de sa représentation qui ne soit responsable? Les 5 sur scène sont d'une rigueur "metal" obsédante, et le show est d'une rigidité abusive. A tel point qu'entre les voix parfois caricaturales et les projections en fond totalement misérables (non mais sérieux, des loups au ralenti, des corbeaux, la faucheuse... c'est une compilation de clichés minables !!) on rit au dépend du groupe et à plusieurs reprises. Mais eux non, ils font la gueule, lancent des regards noirs, ne causent pas pendant 1heure et 43 minutes (j'ai pas chronométré en fait). Ils sont Neurosis, le groupe de metal depressif de la première note jusqu'au dernier larsen.


Heureusement vient le dernier morceau: Through Silver In Blood, le morceau qui ouvrait l'album éponyme. Et ce n'est pas la joie de les voir en finir avec ce set poussif qui nous réjouit mais bien le spectacle offert sur ces 10 dernières minutes (la moitié est visible en bonus). Le quintet, toujours devant ses projection risibles détruit totalement sa musique, piétine tout l'équilibre maintenu jusque là. Von Till termine sa guitare, landis dégomme ses claviers, Kelly s'explose le front dans son micro, avant la fin tribale de roulements annoncant le déclin, la fin, le chaos. En 10 minutes, Neurosis sauve presque l'honneur du set pénible assuré jusque là. Mais soyons honnête: le groupe reste bien loin devant tous ses suiveurs. Ils ne sont pas de vulgaires artisans du riff étalé sur 10 minutes, non, ils demeurent des compositeurs âvisés, leurs morceaux restent des classiques, la construction de leur titres, bien qu'assez simple, est magnifiée par les climats: après tout ils ont inventés cette forme de musique. Et les voix si atypiques du trio Edwardson/Kelly/Von Till lui confère, en plus d'une puissance vocale singulière, toute son identité et sa force. Même décevant Neurosis écrase la concurrence.

5 commentaires:

thelightcarrier a dit…

Set carré, un peu trop en effet. Pour ma part, j'ai été déçu par une set-list basse du front et des nouveaux morceaux longs, répétitifs et creux. Ils ont été magistraux sur A Season In The Sky, malheureusement seul extrait de tEoES. Ça reste un très bon concert, et je ne regrette absolument pas leur manque de communication avec le public, souvent inutile et cliché.

Anonyme a dit…

je comprend parfaitement ton commentaire. j'ai eu la "chance" de les voir en 99 (au club Dunois avec Voivod) et en 96 (à l'Arapaho avec Unsane). Ce qui m'a le plus géné au départ été le son, trop clair; effectivement j'aurais aimé qu'ils interprètent des titres de A sun that never sets ou The eye of every storm. Mais bon... je ne serai pas aussi dur que toi dans le sens où je ne me suis pas "ennuyé". Parce qu'à cause ou grace à eux toute la scène post-blabla... existe et a produit beaucoup trop de déchets. Peut être sommes nous tous blasés??? cette "attitude" scénique c'est eux qui l'ont appliqués. Cela fait partie intégrante du show; lorsque Kelly est venu seul pour un set acoustique au Glaz'art, c'était un véritable moulin à paroles... En revanche la vielle au soir j'ai assisté au set des SWANS à la Maroquinerie. 02h20 de concert, Gira est un monstre de puissance, d'émotions et avec le sourire! . en tous cas merci pour ton blog!!! Kelloid

Damodafoca a dit…

Thelightcarrier: Je ne regrette pas non plus l'absence de communication, vaut mieux ça que de mauvaises blagues.

Kelloid: A vrai dire, je ne reproche pas l'attitude scenique, comme je le dis plus haut. En revanche, ce coté "on est mettol, on est evil, on fait la gueule" me parait ridicule, ce qui est largement amplifié par les voix type acteur studio et les projections lamentables en fond.
Je crois que Bil de Nextclues avait déjà formulé, probablement mieux que moi, cet aspect un peu risible du groupe. Enfin, j'aimerais souligner que je suis quand même très déçu de m'être fait chier...j'aurais préféré adorer ce concert.
Sinon concernant le concert des Swans: Ok avec toi, on en parle deux article splus bas.
Enfin: merci pour ton commentaire, mais je me dois de rendre hommage à mes collègues, n'étant pas seul ici bas.
+

Anonyme a dit…

"Peut être sommes nous tous blasés???"

Je crois bien oui.
L'imagerie de Neurosis, c'est les loups, les cerfs, les serpents, la mort, le chaos... ça peut paraître "bas du front" si c'est Roch Voisine, mais là, on était bien au vid du sujet.

ocinatas a dit…

Vus une semaine avant en festival à Sélestat, le show et son final étaient à l'identique (le larsen de Von Till était même limite mieux réussi)... On sent que le groupe maitrise bien sa recette "chaotico-apocalyptique".