On avait cru Wordsound en meilleur santé, après une année 2009 qui semblait remettre le label sur les rails, en proposant plusieurs sorties physiques, et quelques publications digitales. Skiz avait la foi, produisait deux albums (Internal Dynasty puis Death Before Dying), collaborait sur un long avec Sensational, tournait avec son posse (Kouhei, Sensational, Mentol Nomad). Seulement, une fois qu'on recevait ledit album avec Sensational, on comprenait: un quasi CDr et une pochette mal découpée à la main, on était en plein dans la distribution mano a mano - on sait que (ex)Torture sort désormais ces albums dans ce même format, des CDr vendus en concert avec des pochettes photocopiés chez un pote avant de se barrer en tournée. Le label semble être retourné dans son mutisme, et Skiz Fernando (le patron et monsieur Spectre, pour ceux qui suivent pas) trouve visiblement plus d'intérêt dans ses projets culinaires (cf. son site Rice & Curry). 2012 : Wordsound devrait se remettre clairement sur son créneau guerilla de la basse qui était très présent dans les années 90. Fernando semble avoir eu quelques difficultés à rassembler l'oseille nécessaire au pressage de son album puisqu'obligé de passer par kickstarter pour trouver les fonds, et ne le sort qu'à 250 copies, autant dire le genre de truc qui disparait complètement des radars de vente en 17 secondes quand c'est signé Burial ou Melvins. Triste époque. Wordsound est redevenu un label totalement indépendant et marginale, ses sorties sont désormais d'une discrétion médiatique spectaculaire. Si le label a été synonyme de créations, d'originalité avec son mélange de hip hop sombre et de dub venimeux, il est regrettable de voir qu'il ne soulève que peu d'intérêt, alors que de toute évidence, il se trouve au racine de genres populaires aujourd'hui. De la clique Hyperdub à Odd Future, nombreux sont ceux qui aujourd'hui font du Wordsound - probablement sans le savoir.
Skiz Fernando est devenu extrêmement appliqué dans sa méthode et dans sa confection musicale. Il admettait lui-même faire preuve d'un certain amateurisme sur ses premiers albums. Mais depuis Internal Dynasty ses productions sont sérieuses et solides. Mais elles ont aussi perdu un peu de leur audace et les climats sont moins brumeux que jadis. Spectre n'est toujours pas, cependant, un beatmaker de musique festive ou même accessible. Sa guerre audio reste sombre, pesante, malgré la propreté du boulot. L'esprit gothique crade d'origine se caractérise désormais bien plus par l'omniprésence de samples de films, de cordes et de musiques orientales, complètement transformés par des beats lourds. Nous ne sommes ni sur le terrain des syncopes glissantes, mais bien sur le rythme appuyé du hip hop, lourd, martelant, ni sur l'obsession distordu de Muslimgauze. Sur "My Rifle" on retrouve un court instant l'esprit des toutes premières production du Ill Saint, au clavier hésitant et au beat rigide; le morceau n'est pas de ce dernier, mais de son jeune neveu, disparu, à qui l'album est dédié. Skiz convie aussi son pote Bobb sur Triumph, toujours impeccable quand il faut hanté les beats de son compère, mais également Killah Priest, ex jeune espoir du Wu Tang Clan pour offrir quelques voix à sa production. Spectre semble signer ici aussi l'inverse de son précédent album: c'était le cas de Death Before Dying, uniquement chanté sur 2 morceaux par la même artiste, qui se posait comme l'anti Internal Dynasty, riche en collaboration. The True & Living reste cependant dans une logique très similaire à son prédécesseur, à savoir un album court, ramassé, qui ne s'égare pas en longueur. Cela a pu être reproché à Fernando (jusqu'à Psychic War) mais désormais il manie avec aisance les voyages mystiques (cf. le premier Slotek) et une certaine cadence, une dynamique bienvenue.
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