lundi 14 avril 2014

SONIC PROTEST - TERMINAL CHEESECAKE

Ca fait 10 piges que le festival Sonic Protest empile affiches de qualité, c'est pourtant la première fois que je me décide enfin à prendre mon billet. Il y a du en avoir, des grands moments dans l'histoire de ce festival, mais le line up cette année est tout de même effrayant : des mecs de Sonic Youth séparés, Merzbow... et Terminal Cheesecake. Bien entendu, parce que je suis un connard, je me pointe assez tardivement et mon copilote de la soirée me fait remarquer que nous avons raté Action Beat, probablement pas le truc le plus pourri sur scène. Les échos concernant Selvhenter sont plutôt positifs aussi. On arrive pendant le set de The Rebel, soit le projet solo du mec de Country Teasers pour une sorte de mélange country/blues et qui cause de trucs qui mettraient mal à l'aise les plus sains d'esprits-tu m'as compris. Tout seul avec une guitare au son impressionnant, un clavier qui fera bien 6 notes, et une cravate acheté dans la journée, The Rebel produit un truc qui a du charme mais avec lequel je rentre difficilement en connexion. Probablement plus cool à saisir quand tu as révisé ton harap's, mais à part des évidences comme "whore" ou "dick", je suis inapte à saisir ce qu'il baragouine. L'humour va jusqu'au stand merch: puisque le type n'a rien à vendre, il a collé la set list du soir sur des posters hologramme moches à base de chiots et de dauphins. Une bonne idée, tiens.
Le Cercle des Mallissimalistes (!) prend place derrière, accompagné de Xavier Quérel aux images,  pour ce qui sera la bonne surprise de la soirée. Avec ce "je ne sais quoi" très français, un peu baroque et indescriptible LCDM (re-!) me fait songer à un Hint en big band ou un Picore dénudé de son hip hop. Un rock cyclique et progressif, avec des accents électroniques à la Trans Am hyper bien gaulé, au groove imperturbable, aux claviers larges et aux riffs malins le groupe se paye un artisan de l'image de grande qualité en guise d'accompagnement. Plutôt que de diffuser des images bidons genre "je découvre Herzog j'en carre partout", le type joue avec la lumière et les bandes comme autant d'instruments visuels et mouvants, évitant la facilité et multipliant les trouvailles efficaces, se balladant dans le public et au milieu du groupe pour projeter la lumière ou brulant du film devant d'énormes loupes. Le groupe arrive au bout de sa cavalcade sous les applaudissements largement mérités. La semaine dernière je me fadais BOSSK en première partie d'Old Man Gloom, voilà que Le Cercle Des Mallissimalistes me prouve qu'on peut encore faire des choses simples et efficaces sans être vulgaires.
Terminal Cheesecake est un groupe assez peu connu et pourtant quasi légendaire. Reformé l'an dernier avec un line up reprenant moults membre d'origine, TC est une entité emblématique de l'Angleterre des années 90. Audacieux,  ambitieux, n'ayant pas eu peur de faire des mélanges improbables, Terminal Cheesecake se place quelque part entre Pop Will Eat Itself, God/Ice, Butthole Surfers et même Primal Scream. Un truc barré et capable de mixer aussi bien des éléments dub et noise, rock et électronique. A sa tête, Russell Smith, associé à M.A.R.R.S et A.R.Kane (les premiers étant les géniteurs de "Pump Up The Volume") qui monta avec Gary Boniface et Gordon Watson le groupe à la fin des années 80. Après 2 albums, TC se retrouve sur Pathological, l'excellent défunt label de Kevin Martin (qui signa également 16-17, Techno Animal, Oxbow, Brotzmann, Zeni geva...) avec qui ils publieront d'ailleurs un split (God/TC). Après l'arrêt des frais en 95, Smith jouera dans Skullflower et God, tandis que les autres membres auront experimenté dans d'autres groupes plus discrets. Le groupe se reforme l'an dernier avec Smith et Watson, aidé de John Jobbagy à la batterie (batteur originel passé par Ice), Dave Cochrane (God, Ice, The Bug, Greymachine, Jesu, Transitional, Head Of David... soit l'ensemble des groupes les plus importants que l'Angleterre ait pondu ou presque depuis 3 décades) à la basse et le chanteur de Gnod (combo dans la veine de Shit & Shine) pour remplacer Boniface. A ce stade, tu as lu une suite de nom qui ne t'évoques pas grand chose, peut-être, alors je n'épiloguerai pas 10 plombes: Terminal Cheesecake, après une intro hypnotique est parti comme un tank sur le public, puissant, où tout les musiciens, bien calés ensemble, on administré une torgnole sévère. La formule du groupe, soit cette noise psyché lourde et massive, s'est magnifiquement mise en forme dans le hangar de la parole errante à Montreuil pour une transe de bruit impérial. Jobbagy est un batteur incroyable, extrêmement puissant avec une frappe jazz déroutante, tandis que Cochrane a apposé ses épaisses lignes de basses boueuses comme un goudron malsain, portant ainsi les guitares du duo Watson/Smith, entre riff massif pour faire chouiner doomsters sensibles et plan tout en wah, galactique, loin. Neil de Gnod prend son rôle très à coeur et saute comme une grenouille anoréxique toute la durée du show, devant le reste du groupe jouant en formation serrée. Show court mais maitrisé, Terminal Chesecake a prouvé en une heure qu'on peut être et avoir été, en pliant bien des groupes réputés inaptes à créer réellement quoi que ce soit de pertinent aujourd'hui. Sévère.

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