dimanche 25 mai 2008

La Rumeur - Du Coeur à l'outrage

Sortez vous les doigts du cul, le voilà le son qui met la pression. En effet "La Rumeur n'a pas à s'interdire ce que les autres n'ont plus les couilles de dire" (Il y a toujours un lendemain). Finies les extravagances musicales, le côté jazzy, les instrus léchées et la production aux petits oignons. Bienvenue dans la réalité d'un monde pourri, âcre, puant. Pour sûr ce ne sont pas les instrus qui nous contrediront. Plus on s'enfonce dans le disque plus ça tappe fort, à gros coup de beats itératif guerrier et de synthés d'une froideur clinique. Se greffent en majorité les flows haineux de Hammé et Eboué, où l'on reçoit chaque mot comme un molard corrosif directement dans la gueule. Là ou Regain de Tension se voulait haineux, l'ambiance n'était pas réellement aboutie. Içi, rien ne déborde, aucun beat un peu trop putassier ne vient trainer sa masse pondérale trop elevée au recoin d'une mélodie, aucun effet de style ne vient entacher la froideur totale de ce disque. Et ce choix depouillé se révèle être gagnant, avec un impact d'un réalisme troublant, une sorte de visionarisme noir. Et lorsque les deux mc's se livrent un peu plus, dans Un chien dans la tête et Quand la lune tombe, leur sensibilité est palpable, à fleur de peau, laissant de côté cette carapace insensible un instant pour nous entrainer dans les méandres de leurs névroses.
Alors oui, certains apellent ça du rap conscient, mais ces gaziers là c'est plutôt de maniére inconsciente qu'ils le balancent, avec une dose de revendication trés légère, clairement désabusée. Une sorte d'obligation de constater tout en sachant que ça ne servira pas à grand chose. Ce constat est à l'image de la musique, d'une noirceur sans fond. "La meilleure des polices c'est ton taf, ta télé,tes crédits, tes anxiolytiques,neuroleptiques, antidepresseurs, et tout ce que tu prends pour pleurer moins fort la nuit" (La Meilleure des Polices).
Petit à petit La Rumeur crée son monde, ses ambiances et fait son chemin à base de réalisme pur et dur, parfois grinçant (Je suis une bande ethnique à moi tout seul, où le guitariste de Noir désir pose un riff) mais toujours clinique dans le cynisme.
"Qu'as tu à me dire de positif sur la France et son passé de colon? Autant pisser dans un violon."
Du coeur à l'outrage c'est un peu ça, deux mc's qui pissent froidement sur tout ce qui les dérange, tout en sachant que ça n'aboutira à rien, sinon à se vider et à "balancer le sac, comme on jette un cadavre au milieu du lac".
[Macho)))]

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