La naïveté comme maître étalon, comme cheval de guerre, comme prière psalmodiée sans temps-mort. Costa-Gavras, perdu dans son pensum contre la finance globale a oublié qu'être sévère c'était avant tout se montrer critique et que pour être critique, encore fallait-il être pertinent. Ce n'est visiblement pas ce qui étouffe le grand réalisateur de Z ou de l'Aveu ici. Arcbouté sur son attelage brinquebalant, ce cavalier sans tête multiplie les coups de fouet violents sans savoir vers où galope son cheval fou.
Grandiloquent. Le Capital, en lettres capitales justement, d'un rouge sang imprégné d'un esprit révolutionnaire qui n'a jamais vraiment quitté le réalisateur, clin d'oeil farouche à Karl Marx qui semble pourtant grand absent de cet ouvrage fastidieux et pompeux. Le Capital donc, dénonciation virulente et fauchée des dérives et déroutes de l'économie mondiale, ne s'évite rien et épuise ses moindres rixes dans des fatras de dialogues didactiques et démonstratifs.
Film énervant, consternant, ahurissant. Lamentation. Si j'avais déjà remarqué que les américains ne savaient pas faire de films sur la crise, nous ne faisons pas mieux qu'eux. Où est la justesse du Couperet, son regard acide, dénonçant cynisme et déshumanisation avec appoint, avec la froideur d'une France moyenne qui survit par le travail forcé ? Le Capital foire tout. Tout. Insipide dans son analyse des enjeux de la finance mondiale, ses intrigues de cour au sein d'une grande banque multinationale n'intéressent guère. Et ce n'est pas la direction d'acteur hasardeuse qui aide non plus à croire une seconde à ces improbables délibérations manichéennes : Natacha Régnier, perdue, incapable de trouver une tonalité juste et de comprendre son personnage contradictoire.
Gad Elmaleh... Acteur fantoche, acteur de gauche ? A revoir Coco on en doute... Acteur sérieux ? A revoir La Rafle on s'esclaffe. Piètre président, son personnage ne lui épargne rien tant Gavras a chargé dans les poncifs les plus stupides. Banquier cupide et soit disant tourmenté, ses vagues flash de rebellion contre ses instincts de prédateur le conduisent toujours à agir dans le sens du pire. Bien sûr qui dit homme de pouvoir dit homme libidineux : amourette risible avec une mannequin même pas jolie... On voudrait nous faire croire 1) à une passivité coupable de l'homme de pouvoir qui se croit pourtant tout permis, 2) à l'instinctivité des comportements banquiers... Pauvresse, on n'avait pas vu plus balourd depuis le manifeste de Stéphane Hessel...
Le Capital... On aurait préféré une audacieuse adaptation du livre de Marx... Au moins ça aurait eu de la gueule tant les adaptations de bouquin de philo, d'économie et de science politique sont rares... Au moins on aurait évité les préjugés psychologisants systématiques. Au moins on aurait compris l'idée d'analyse, ici honteusement dévoyée en didactisme. Mes bons enfants, regardez comme ces gens sont vilains et sûr de leur fait, regardez les jouer... Infantilisation des dérives : ces banquiers là sont de grands-enfants nous dit Gavras ! Fatale Erreur : ce sont des adultes, les infantiliser c'est les déresponsabiliser, c'est contraire à toute éthique ! C'est l'envers de ce qu'il faut faire et dire sur eux.
Le Capital. Effets de manche, titre aspirateur, raisonnement de poissonnerie un dimanche matin à 9h30. Cataclysme de gauche, à l'image du socialisme d'aujourd'hui. Film qui dessert avec aplon et prétention les idéaux qu'il voudrait défendre. Le Capital, où comment réduire les idées de gauche à une "bien pensance" moraliste, infantile et manichéenne. Désolant.
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