jeudi 24 décembre 2009

PRODIGY-Invaders Must Die


Le groupe qui fait face au manque de compréhension, du moins chez nous, le plus remarquable. Aujourd'hui, on reproche à Prodigy d'avoir tout fait trop vite, trop fort, et probablement trop bien. Quand les premiers journaux électroniques en France militaient pour une reconnaissance plus importante de leur musique, le groupe à la fourmi offrait le plus beau défonçage de portes de l'histoire avec Fat of the land, hold up sonique mais réel travail d'ofrèvre au vue des 2 années passées à terminer l'animal. Couvertures de tous les grands magazines, emblême de la génération en cours, Prodigy ruinait tout sur son passage, laissant au passage une petite place pour Daft Punk, fierté chauvine oblige. Au bout de deux ans seulement, certains de ces magazines concentré en putes se demandaient quelle avait été la réelle importance du groupe, comme si Howlett s'était lui-même payé les kilos de pages de ces canards 24 mois plus tôt. Certains ont maintenu leur version le temps de Baby's got a temper. En revanche, ils n'étaient pas nombreux à défendre encore les Anglais quand ils revinrent déssoudés pour causer d' Always Outnumbered, Never Outgunned, album certes trop attendu mais qui signé par n'importe quelle autre groupe aurait eu le droit à un consécration electroclash digne de ce nom. Bien sur, défoncer un disque n'empêche jamais d'y coller le maccaron de son 96 pages mensuel sur le sticker de l'album. Du coup, existe une relation pas franche entre le groupe et l'héxagone, s'illustrant aussi bien en une longue absence scénique (pas une seule date en France entre 98 et 2009), qu'en un rejet, voir un mépris total des nouvelles sorties du groupe par les médias qui avec le recul juge sauvagement l'album de 97 tout en encensant des groupes qui se réclament ouvertement du quatuor devenu trio. Coté public, un Zénith blindé, un Rock en Seine à genoux, mais toujours des critiques qui ressemblent souvent à "Ca me rappel ma jeunesse" ou encore "c'est grace à eux que j'écoute de la techno, mais aujourd'hui...".

5 ans après un album qui révélait un groupe divisé (par le succès et les excès) Prodigy ne semblait plus qu'être opérationnel sur scène, ce qui, en soit, est déja remarquable. Néanmoins, ce Invaders Must Die (message à l'intention de ceux qui ont tenté de s'inscruster dans la famille du groupe... verdict sans appel) à de la gueule. Le son y est plus massif encore que tout ce que Howlett n'a jamais réussi jusque là. Il est certes moins singulier que Fat of the land, mais il est énorme, explose de partout. Seul sur Run with the wolves, où est convié Grohl, le sample de guitare introductif est un mauvais bout de mp3 plus que douteux avec ses ondulations métalliques caractéristiques (rappel toi le 56k sur napster). Tout le reste de l'album est un énorme coup de latte. Les basses y sont profondes, les beats totalement dévastateurs, les riffs de claviers résonnent comme des menaces permanentes. Mais ce disque ne sonne étonnament comme aucun autre Prodigy. Invaders Must Die apparait comme la suite logique d'Experience (92) dans ses clins d'oeils répétés et avec insistance à la Rave music des années 90. Mais il possède la maitrise technique d'AONO et Fat of the land. Il est le plus éléctronique depuis Jilted Generation, mais garde un aspect rock indéniable. Le son est moins urbain qu'en 97, il se fait plus digitale, comme l'atteste les sons 8bits des riffs de Colours et et de Worlds on fire...qui sample les Breeders. Take Me to the Hospital et Thunder sont deux piqures de rappel de ce que fut Prodigy à l'aurore des années 90, avec ses samples vocaux pitchés et ses constructions qui arrivent jusqu'a un climax de tension tout en nappes épaisses et en stri-dance. Run, encore elle, remplace un Firestarter qui commence a sentir le carbon 14 bloqué sur l'aiguille 96, tandis qu'Omen (que je ne supporte pas) est la réponse à Breathe, sorte de Baby's got a temper remis au gout du jour. Warrior's Dance apparait comme le nouvel hommage (encore une fois) de Howlett a Meat Beat Manifesto époque Radio Babylon, tout en se raprochant méchamment de son no good qui souffle ses 15 bougies; tandis que Piranha créer une collision entre le son Prodigy et les ondes martenots des films de SF que le groupe se diffuse en boucle en studio.

Reste qu'entre des audaces remarquables et des moments de bravour réels, le disque n'est pas parfait. Si Thunder est l'exemple parfait d'un Prodigy au top de sa forme réalisant un de ses tous meilleurs morceaux, une piste incroyable dans sa construction et son déroulement aussi bien que dans sa production, n'en demeure pas moins que le groupe a su élever le mauvais gout au rang d'art. Lalbum est sévèrement marqué d'un esprit old school, pour ne pas dire kitsh qui pourra parfois faire fuir certain. Ce qui semble finalement logique quand on voit les looks improbables de la formation aujourd'hui -Flint ressemble vraiment à une vieille tapineuse des forêts de bord de routes d'Ile de France. Les riffs de claviers et certaines paroles sont parfois un peu effrayantes. Et surtout, Howlett a parfaitement soigné son disque, mais ses rythmiques n'ont plus la superbe et la richesse des années 90 sur certains essais. Enfin, le groupe semble avoir définitivement tourné la page de ses longues et psychotiques instrumentales s'étalant sur plusieurs minutes. Pas de Narcotic suit, pas de Narayan, pas de Climbatize, pas de Medusa's path. Non, juste de la clé de bras sonore, si ce n'est ce surprenant Stand Up qui ressemblerait à un mix des Specials avec une TB 303-acid!

Mais si nuance est faite-ici, c'est pour diminuer l'euphorie qui pourrait s'échapper de ces lignes. car cet album est excellent, et c'est une réelle réussite du groupe. Il n'est pas parfait, mais il montre que Prodigy a encore de bonnes choses à offrir. Invaders Must Die est un album qui traduit au mieux ce que le groupe est actuellement sur scène: violent, cru, brutal, efficace. IMD prouve seconde après seconde quels sont les éléments qui façonnent le son et l'identité Prodigy. Le disque présente un groupe qui ne s'excuse pas de ce qu'il fait, de la manière dont il le fait. Un album qui empeste, en somme, profondément l'Angleterre.

...Et moins d'un an après sa sortie, voilà déja une nouvelle édition. Sur le premier CD, l'album est augmenté de 2 morceaux issus de Lost beat EP (dispo avec l'edition limité de l'album original). Le premier, connu sous le titre Comanche mais baptisé Big Gundown est un bijoux de beats laboureur de cerveau, alors que Fighter est beaucoup plus anecdotique. On aurait préféré y trouver Black Smoke ou Mescaline. Un live d'Omen fini le premier disque. Le second s'ouvre sur la relecture ultra virulente d'Invaders Must Die, en fait la version telle que jouée live, présente sur le dernier EP sorti également. La suite n'est qu'une compilation indigeste et fatiguante de remixs un peu raté, si ce n'est la version remixé par Mr H et Josh Homme de Take me to the hospital. Le DVD offre les 4 clips et 4 lives s'étalant sur une année de concerts bien remplie. Enfin, le tout est assorti d'un livret de 50 pages de photos sur scène, en backstage et en studio. Tout ça pue l'enfilage, mais a 10€, au vue du contenu, pour une fois nous ne jugerons pas trop sévèrement la méthode.

2 commentaires:

rinkla-t a dit…

Wow, ça envoie! J'adore IMD, (je le considere comme le meilleur album 2009), mais j'doit dire que ton article est vraiment génial! Bravo.
Salut, rinkla-t.

mickybicky a dit…

très bon article, bon boulot!