vendredi 4 décembre 2009

TRICKY-Maxinquaye (deluxe ed.)


Même si depuis plus de 10 ans il s'agit avant tout d'un sujet quasi tabou pour les deux pôles intéressés, Tricky est et restera le gamin discret au chapeau ridicule murmurant d'une voix medium et légèrement éraillée dans les premiers clips de massive attack qui soutenait alors un album légendaire mais néanmoins vide car basé sur de pauvres boucles (magiques, certes) de quelques secondes. Mieux encore, il est l'auteur d'une bonne partie de Karmacoma dans lequel il apparait en combinaison bleu avec un anneau gigantesque dans le nez et présent sur le deuxième opus, injustement oublié mais habilement mieux composer finalement que son prédécesseur. Pour des raisons officiellement claires mais franchement obscures Adrian Thaws prend ses distances avec le groupe et rencontre la jeune mais indispensable Martina Topley Bird, muse immédiate du monsieur, future femme, mais aussi la seule dame à pouvoir probablement tenir tête au kid puisqu'elle restera dans les parages pendant une période d'au moins 3 ans. Très vite, Tricky, cet apprenti sorcier du son au talent sur va sortir un premier enregistrement du nom de maxinquaye (en hommage à sa mère). Cet album va inscrire notre homme dans la légende, lui permettant de faire les couvertures les plus prestigieuses (et d'autres moins), s'inscrire dans la liste des artistes importants à suivre. Car l'album est avant tout une pépite de musique moderne, récompensé à sa juste valeur. Une musique électronique sombre et habitée, qui traite sauvagement avec le dub, le hip hop et le rock, produit par un punk. Car Tricky est finalement un punk a cette période. Produit avec un studio assez simple, beaucoup de passion et peu d'autres choses, il accouche d'une oeuvre riche mais accessible, sauvage et délicate, fine et grasse. Plus tard, le producteur de l'album révelera que Tricky a en fait eu le cheminement inverse d'un musicien classique. Contrairement aux autres, il a épuré jusqu'au plus simple les morceaux de ces démos, ne laissant que ce qui lui paraissait essenciel. Tout devient logique: l'aspect obsédant de ses compositions mutantes et instables semblent bel et bien tenir de ces motifs minimaux, répétés tels d'obscurs mantras. Magie noire et fumée verte. Il s'y ré-approprie son karmacoma qu'il renomme overcome et qui ouvre son album-si ce n'est sa discographie- comme un résumé: Beats langoureux mais assurés, voix féminine, ambiance narcotique ( cannabique pour notre homme serait plus judicieux). Surtout nait le problème de pouvoir ranger cette rondelle dans une étagère chez le chaland. Indescriptible. Il y sample aussi bien Isaac Hayes (taquin, il va se fritter avec Portishead sur le même terrain de jeux) que les Smashing Pumpkin, transfigurant les originaux pour les remettre à la sauce Tricky, conviant Alison Goldfrapp à ensorceler le bien nommé "pumpkin". Un des morceaux de bravoure du disque est la magnifique reprise de Public Enemy, Black steel. En défigurant totalement l'originale Tricky lui change sa robe , la couvre chaines et fait chanter les paroles d'un vindicatif Chuck D par la voix mangifique et envoûtante de sa compagne. Entre les merveilleusement lourds et obsedants "ponderosa" et "Aftermath", il fait également chanter des insanités à sa jeune muse sur Abbaon fat track. Mais même timide, le "kid" execute de sa nerveuse voix abimée un magnifique "Brand new.." sur une ligne de basse qu'on jurerait volée a MJ, pendant que Martina rap comme une enfant. Comme souvent au coeur des années 90, l'engouement pour un artiste est très rapide et parfois surfait. Thaws créée l'enthousiasme, on y voit l'avenir, rien de moins. Mais La suite de la carrière va y gagner d'une manière totalement imprévisible. La légende veut que le monsieur, un jour, au cinéma avec une copine entende son album passer dans la sono de la salle avant le film. Fou de rage, il décide alors de saborder sa propre carrière. Mais Le recul aidant, il va lui donner un magnifique coup de pouce sans qu'il ne s'en rende compte.
L'édition présente aujourd'hui propose un interessant document dans le livret sur l'impact du bonhomme et sa carrière. L'album est remasterisé, et surtout, un second disque gonflé de remixs de l'époque, issu des maxis ayant entouré l'album, ainsi que 3 plus récents, réalisé pour cette édition. Les trois remixs en questions ne sont pas tous remarquables. Et du coté des antiquités, la qualité est au rendez vous mais aucune pièce n'est indispensables. On regrettera l'absence des morceaux réalisés avec les GraveDiggaz de RZA et Prince Paul à l'occasion de l'EP 'The Hell'.

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