lundi 27 juin 2011

Insidious de James Wan

Insidious est un film postmoderne par excellence, jusque dans ses pires défauts. Le productif James Wan, à l'origine de la franchise trashporn Saw dont il a brillamment réalisé le premier épisode continue son exploration du cinéma d'épouvante des années 50 et 60 avec cette histoire de maison (ou d'enfant?) hantée. On l'avait déjà remarqué dans l'essai passé inaperçu Dead Silence où il mélangeait son amour des poupées (clin d'oeil à celle de jigsaw) et des brumes inquiétantes. Si Dead Silence n'a rencontré aucun succès, tant critique que public, il a tout de même permis à Wan de prendre très rapidement le large et de briser (en partie) le lien qui l'unit à Saw. Il en fut de même pour son compère, Darren Lynn Bousman qui rendît (mal) hommage à The Rocky Horror Picture Show une fois débouté de Saw avec Repo (un échec lui aussi).

Bref, tout ça pour dire que Insidious est un ouvrage postmoderne complet. Comme nous venons de le dire, il s'inscrit dans la lignée des films citations ou des films hommages, qui lorgne vers quelques classiques en s'en accaparant les codes pour mieux les transcender. On retrouve ainsi du Poltergeit et des ambiances à la Carpenter. On ne peut pas non plus s’empêcher de penser à La maison du diable de Robert Wise (pour ceux qui ont vu l'horrible remake qu'est Hantise, ceci est l'original) ou encore à La malédiction, film culte de Richard Donner. Wan aime les portes qui claquent et qui grincent, les bruits oppressants de balancier (la pendule, le métronome, le cheval à bascule), les enfants qui errent seuls la nuit, les fantômes et les diables velus à sabots... Tout cela rend la première partie du film particulièrement réussie et parfois un tantinet prétentieuse (lorsque les auteurs se citent eux même ça fait mauvais genre: la tête de jigsaw sur le tableau...).

Seulement il y a de mauvais versants à cette tendance artistique. Que Wan verse parfois dans le mélodrame familial passe encore, les codes narratifs hollywoodiens ont tellement éreintés les quelques irréductibles qui les haïssaient qu'on a fini par faire semblant de s'en accommoder. Mais qu'il se refuse à porter son film avec sérieux est bien plus dérangeant. A mi parcours, se rendant certainement compte que la fin du film virerait au grand guignol, Wan saborde le sérieux et convoque une autoparodie mal venue et indélicate. Le charme est dès lors rompu et il est difficile de rester apeuré devant ce qui suit. Deux guignols tendance geek rigolo débarquent dans la maison avec leur attirail et se chipouille le moignon pour savoir lequel est le plus utile à la résolution de l'histoire... On s'en serait passé.

Cette parodie est d'autant plus ennuyeuse que jusqu'à son intervention, on était saisi par l'effroi et les effets particulièrement réussis du réalisateur. Malheureusement, il est plus aisé de saborder un ton que de le tenir jusqu'à son terme. Ring par exemple, d'Hideo Nakata: pas une concession au burlesque, pas un soubresaut comique déplacé, rien qu'une peur glaciale qui s'installe lentement jusqu'à son apothéose finale. Autre exemple, The Horseman de Steven Kastrissios: une violence froide, très premier degré, sans répit, sans décalage, un film frontal et dur au corps. Des films qui s'assument quoi et qui ne reculent pas devant le genre auquel ils se frottent. C'est ce qu'on aurait voulu voir dans Insidious.

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