jeudi 29 mars 2012

BREACH-Godbox

A quelques mois de l'enregistrement de son chef d'oeuvre Kollapse, qui marquera également la fin du groupe, Breach publie Godbox, dernière salve purement sauvage avant la désintégration. Si les disques de Breach semblent tous construire l'édifice de sa légende, Godbox dispose d'un statut particulier, puisqu'il semble aussi être la production qui a permis au groupe d'évacuer ses morceaux belliqueux, peut-être trop breach pour le groupe lui même avant de passer en studio pour son dernier album, le plus ambitieux et remarquable de toute sa (trop courte) carrière. De fait, les deux disques se complètent parfaitement, même si chacun se suffit à lui même. Pour la première fois, Breach semble proposer un disque qui ne fait plus avancer sa mixture, qui regarde dans le rétroviseur avant de donner son ultime coup d'accélérateur.
En effet, Godbox se situe dans la continuité logique de l'etouffant Venom (sauf qu'il ne s'ouvre pas sur un rot mais sur un hurlement lointain), le disque qui a définitivement placé Breach sur la carte des groupes uniques et influents. On nage dans un hardcore dense et lourd, qui montre ses racines noise autant (si ce n'est plus) que metal, tout en imposant clairement une patte que l'on qualifiera bassement de "suédoise", notamment grâce à ce son organique et sa basse riche qui semble apte à tailler le bois. Le point le plus étonnant à l'écoute de ce disque est sa production. Le livret stipule que ces morceaux ont été capturés pendant plusieurs sessions de répétitions. On imagine alors le groupe poser les micros au milieu du local, puis laisser tourner autour de ses morceaux groovy et basiques, aux riffs énormes et à la rythmique quasi obsessionnelle. Le résultat est logique: le son manque de franchise, la batterie sonne complètement éloignée, la voix est sous mixée et presque inaudible. Redécouvrir cet enregistrement à une époque où le moindre petit groupe n'ose plus rien sortir sans avoir le son relapse est une source de joie pour les fanatiques (théorique) du son rugueux. En résulte 5 titres, presque monomaniaques, qui permettront (indirectement ? ) à Kollapse d'aller expérimenter sur d'autres terrains de jeux.
En 2000, c'est le label Chrome Saint Magnus qui se risque à sortir cet étrange disque, petit label allemand tenu par les mecs de Systral et Acme, qui produit d'autres groupes très proches dans l'esprit (Knut, Burst, Cave In...). Breach fait donc une infidélité à Burning Heart, label suédois surtout réputé pour ses signatures punk à roulette au milieu desquels les gars font surtout office de méchants tâcherons un rien psychopathes. L'édition vinyle aujourd'hui pressée par Apocaplexy Rds et Serene Rds permet de rectifier le tir quant à la version originale: le visuel bâclé au photoshop du CD est complètement refait, composé du même visage peint que sur It's Me God (le second LP du groupe), marquant une certaine unité avec le reste de la discographie, et complété par une photo du concert de reformation exceptionnel de 2007. Les notes intérieures précisent à nouveau que l'enregistrement provient de répétitions, mais ne reproduit pas l'étrange petit laïus sur un morceau qui ne figure pourtant pas sur le tracklisting (si quelqu'un a compris quelque chose à ça, d'ailleurs...) et qui est présent sur Venom. En revanche, le remaster ne change absolument pas le son du disque, et hormis le son traditionnellement plus chaud et rond du vinyle, on ne remarque aucun changement dans la production. Ne reste plus qu'à espérer qu'un label prenne le temps de presser une version vinyle digne de ce nom du magnifique Kollapse précédemment mentionné.

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