Etonnant une fois sur place de sentir qu'il n'y a pas foule, que les parisiens ne se sont pas déplacés en masse ce soir. L'an dernier, Primus blindait à ras bord la Cigale et affichait sold out bien avant la date, mais visiblement il ne manquait aucun fan sur cette première soirée. Le prix de la place aidant aussi à dissuader les curieux. Et le stand merch à l'avenant: tous les trucs sont horriblement chers ( 55€ le sweat, 10 le set de...stickers ...), et les moins chers ne peuvent être pris seuls, il faut un autre truc (donc plus cher) avec. Je peux ? Oui ? Voleurs !
Par contre, pour les fans, ce soir c'est grand soir, Primus régale son public comme promis: un premier set composé de vieux morceaux, le groupe assurant lui même sa première partie. La suite sera composé du dernier album en intégralité, après une pause.
Première partie donc pour chauffer le public. Déjà on mesure tout de suite le spectacle: la décoration. La scène est devant un écran égant diffusant des vidéos diverses et variées, allant du vieux film de SF à un reportage sur les castors, des effets visuels couplés à des clips du groupes, encore un bout de documentaire avec un écureuil radioactif et des homards prêt à déguster. L'écran est présenté par deux bonshommes géants, en fait deux astronautes en ballons gonflables sur lesquels sont projetés le visage d'un homme au niveau de la visière, qui semble scruter le public, ou veiller à ce que tout se déroule bien.
Devant l'écran Jay Lane, batteur des touts débuts du groupe qui n'a pourtant jamais enregistré la moindre note pour le groupe (jusqu'à l'an dernier) tient les baguettes. Les Claypool n'a pas été avare en compliment à propos de son ex acolyte, avec lequel il semble ravi de repartager la scène. Et c'est surtout son jeu de batterie qui fait l'objet des louanges de Colonel Claypool et de toute évidence, on comprend vite pourquoi. On est assez éloigné du jeu plus metal de Brain et plus aérien que celui de Tim Alexander (je tiens à préciser: tous deux d'excellents batteurs !!) et son jeu est ouvertement inspiré du groove, du funk au hip hop en passant par le reggae. Il valse entre les toms avec une aisance certaine, mais c'est surtout son approche des cymbales et des charleys qui laissent admiratif. Mais c'est aussi rapidement le gros point noir de la performance: obsédé par ses quelques gimmicks obsessionnels au charley, on se lasse assez vite de ses pirouettes, même si le talent demeure impeccable.
Sur la gauche, Larry LaLonde, sans doute le frère de Brice, assure les parties de guitare de Primus qu'il compose depuis 20 ans désormais, alliant lui aussi un mélange de riffs puissants et de passages plus psychédéliques, vaporeux, ou également très rythmique et tout en retenu (ici aussi, on songe parfois à des moments pratiquement reggae). Les Claypool, à droite, est le chef, le meneur et probablement le seul réel décideur de Primus. Mais son autorité trouve aussi toute sa légitimité tant son approche de l'instrument est incroyable. Claypool est probablement un des bassistes rock les plus talentueux, et sa maitrise des 4 (minimum) cordes est un spectacle qui force le respect. Entre nappes lourdes à la contre-basse électrique ou les passages slappés à la rythmique complexe, on s'incline devant l'aisance du monsieur. Pendant une bonne heure, le trio s'amuse donc à revisiter ses fossiles, bien souvent en les renforçant de jams qui tendent à s'éterniser, partant dans le space rock ou le jazz fusion psychédélique. L'impression alors de regarder un groupe qui prend plaisir à s'entendre jouer prend le dessus sur l'impression d'un éventuel spectacle. Quelques longueurs puis s'en vont. 4 épisodes de Popeye diffusés pour faire patienter le public (quelle audace ! ) et revoilà le trio cette fois pour jouer le Greene Naugahyde, dernier enregistrement produit par le groupe, et donc le premier sous cette forme. Lane est cette fois sur son propre répertoire et peut donc pleinement user jusqu'à l'excès de ces gimmicks. Claypool le confirme jusqu'au dernier morceau du rappel: de son côté, en plus d'être un technicien hors pairs, il est aussi un artiste appliqué. Si il aime étendre ses morceaux une fois sur scène, il sait aussi reproduire à l'identique ses enregistrements. Et si un morceau propose un certain son, sur scène, il en sera de même. On retrouve donc les mêmes variations sonores de la basse, bien souvent avec cette sensation étrange de notes liquide, renforcée bien sur par la fluidité du jeu. On reste tout de même circonspect face au son que produit le zénith ce soir. On l'a déjà dit, la salle est capable de rendre de très belles choses. Mais le son est étrange ici. La batterie manque parfois de dynamique, d'impact. Il manque souvent le petit truc d'énergie qui ferait la différence. La caisse claire, par exemple, semble parfois largement sous-mixée (alors que le kick est imposant à excès). La guitare de LaLonde semble elle aussi parfois nager dans les basses, et le tout prend alors un aspect un peu boueux et imprécis dans le rendu.
Mais arrivé au bout du set, les codes Primus déroulées sans honte pendant presque 2 heures 30, l'impression d'écouter un seul et même long morceau commence sévèrement à se faire sentir. On ne peut que rester admiratif devant la performance, intense, sans fautes, mais on se fatigue de ces tricotage de charleston et de ces slaps incessants. Reste alors le rappel, expédié en quelques minutes: My Name is Mud où la basse de Claypool sonne comme un m16 en action, et Jerry was a race car driver, qui se conclue sur son simili refrain quasi hardcore avec les guitares de LaLonde (enfin) blindées de distortions. Un trip SF psyché baroque proposé par une bande d'escrocs un peu long mais respectable, qui se finit dans la joie d'une déflagration rock sauvage.
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