lundi 8 novembre 2010

Zeitkratzer - Whitehouse Electronics

Zeikratzer est une dizaine de musiciens classiques (clarinettes, trompettes, trombone, piano, harpe, violon etc...) qui se retrouvent dans différentes villes d'Europe pour des festivals de musiques contemporaines et d'avant garde. Certains de ces évènements sont enregistrés et sortis ensuite sur leur propre label du même nom. Le ''chef d'orchestre'', Reinhold Friedl, épris de passion pour la musique de William Bennett (Whitehouse, un des projets de noise les plus fascinants des temps modernes) explique que l'approche du son qu'a Bennett, cette façon de varier les répétitions dans les assauts et de faire progresser du bruit blanc l'a tout de suite intéressé. Cet intérêt s'est vite transformé en projet lorsque Friedl a rencontré Bennett, rencontre qui fut fructueuse au niveau artistique et qui permit à ces morceaux de voir le jour. Tel le joueur d'échec qu'il est, nous explique Friedl, Bennett est un compositeur d'une précision chirurgicale qui sait exactement où emmener son morceau et où les progressions le méneront malgré ce sentiment d'improvisation sans but dans sa façon de composer. Lorsque Bennett compose, il détruit toutes les traces de cette composition de façon à ne jamais répéter deux fois un travail. Friedl et Bennett se sont donc mis d'accord pour mettre au point une setlist pour ce festival de musique contemporaine à Marseille en 2009, et de choisir au sein de la discographie de Whitehouse quels morceaux interpréter. Les choix se sont portés vers la partie la plus récente de la carrière de Whitehouse (celle que je trouve la moins fascinante, celle ou Bennett s'est entiché d'une passion pour la musique africaine), avec des morceaux extraits de Bird seed, cruise, Racket. Le disque est mixé et arrangé par William Bennett himself. Joli programme donc que de reprendre des morceaux de noise, principalement composés avec des technologies numériques et des machines, avec un mini orchestre d'une dizaine d'instruments.

Pourtant le pari risqué est plus que réussi. Zeitkratzer semble nous livrer sa propre version de la musique de Whitehouse, à travers une compréhension personnelle du langage de Bennett. Une apocalypse sonique, rappelant la force cosmique d'un Sun Ra et son Arkestra tout aussi bien que la dureté biblique d'un Ligeti délivrant l'apocalypse. Un chaos organisé, où l'agencement des pauses et des phrasés musicaux permet de créer une communication avec l'auditeur. Il semble ressortir un pouvoir des interprétations de la musique de Whitehouse par Zeitkratzer, qui sublime des compositions pas forcément des plus passionnantes sur disque (je préfère de loin la première partie de carrière et des disques frontaux comme psychopathia sexualis, même si la recherche tribale et primaire de Bennett sur la fin de sa carrière donne un saveur particulière à ces disques). L'itération des boucles alliée aux cuivres soutenus et à l'arythmie percussive semble former un tout cohérent et attrayant. Un projet intéressant et hors norme qui revisite le catalogue d'un musicien contemporain au centre d'un mouvement culturel. Les deux derniers morceaux sont de réelles incantations, une sorte de transe voodoo et tribale qui nous investit d'une force mystique peu courante. (Zeitkratzer)

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