C'est un rendez-vous traditionnel qu'on a plaisir à couvrir à BTN, le signe que la rentrée est là. Notre rentrée à nous en somme (du moins côté ciné, parce que niveau musique, y en a un qui n'a pas pris beaucoup de vacances...). S'est ouvert ce jeudi 5 septembre la 19e édition de l'Etrange Festival au Forum des Images, à Châtelet. Et pour ouvrir les festivités, une fois n'est pas coutume, j'ai séché le film d'ouverture du festival, le coréen The Agent, pour me ruer dans la salle 300 et jeter un oeil distrait à Big Bad Wolves de Aharon Keshales et Navot Papushado, thriller israélien porté par l'excellent Tzahi Grad (Les Méduses, Tu n'aimeras point).
Voilà un film dont je n'attendais rien, qui ne faisait même pas parti de ma sélection à la base et que j'ai coché par vanité, histoire de dire que cette année encore, j'avais explosé mon nombre de films vus à l'Etrange. Big Bad Wolves est pourtant assez déroutant : voilà un film qui traite de la pédophilie avec un sens de l'humour noir et du guignol qu'on n'associe jamais, mais alors jamais, à ce genre de sujets. La pédophilie, c'est toujours grave, toujours plombant et en général, ça donne lieu à de jolis vigilant bien réactionnaires ou à des revenge movies qui foncent tête baissée dans l'émotion grasse et l'outrance crasse. Big Bad Wolves propose une voie hasardeuse qui laisse le spectateur le cul entre deux chaises. D'un côté, un humour assez dévastateur qui a le dont de jouer à la fois sur les stéréotypes les plus ancrés de la communauté juive (la mère hyper protectrice par exemple) ; de l'autre, la mise à distance du sujet de fond (le meurtre d'une jeune fille par un pédophile). Les séquences de thriller succèdent à des scènes dignes de n'importe quel torture porn des années 2000, puis à des scènes cocasses dont le second degré intime un décalage plus que jubilatoire. Les dialogues sont particulièrement bien ciselés, et cela n'en est que plus délectable encore.
Le hic, c'est que le scénario est un véritable entonnoir qui ne laisse place, ni réellement à la surprise, ni au suspens non plus. Si bien qu'il n'y a quasiment aucun doute quant à la nature du suspect qui se fait torturer dans cette cave. En s'enfermant dans ce huis-clos en sous-sol, le film met hors de toute considération les possibles échappatoires qui auraient pu nous mener en bateau jusqu'au dénouement. Une fin d'ailleurs bien abrupte, qui agit non comme un révélateur mais comme la confirmation de ce que nous savions déjà, neutralisant tout effet de surprise, toute sensation d'étouffement. Voici donc un thriller auquel on peut reprocher de nous avoir trop laissé respirer...
Pas vraiment le temps de souffler. Vingt petites minutes de pause avant la prochaine séance, à peine le temps de retrouver dans la file d'attente Mélanie de zombiesworld.com, de prendre de brèves nouvelles (il s'est quand même passé un an depuis ce fast-food mexicain partagé avant un film... de zombies bien sûr !) et c'est déjà reparti pour un film d'animation... mexicain avec des zombies, justement !
El Santos vs la Tetona Mendoza d'Alejandro Lozano et Andrès Couturier était présenté comme une petite bombe mexicaine, confrontant un héros national, le catcheur El Santos, à la méchante Tetona, tout droit sortie de Faster Pussycat Kill Kill ou de Megavixens ! Ce n'est clairement pas un dessin animé pour les gamins. Tout orné de son interdiction au moins de 12 ans, cette adaptation d'un BD fameuse au Mexique lorgne bien plus vers l'univers graveleux de Crumb, des miches bien rondes et des gros nichons de feu Russ Meyer ou de la frivolité du Fritz le Chat de Bakshi (adaptation de Crumb, d'ailleurs).
L'ambiance complètement givrée d'El Santos tient la moitié du film. Le générique est assez fabuleux et annonce parfaitement ce qui attend le spectateur : de la merde (un petit bout de merde qui porte la voix de Guillermo del Toro...), des seins, des zombies et des références. De Rocky à Orange Mécanique en passant par American History X, El Santos étale sa culture cinéphilique sans grandiloquence mais plutôt avec astuce et avec un humour ravageur, loufoque et très régressif. Seulement, le film ne tient pas la distance sur la longueur et une grande lassitude s'installe. La séquence en noir et blanc qui rejoue les perquisitions nazis avec un semblant de fun à la Inglorious Basterds marque sérieusement le pas, d'autant qu'on a du mal à comprendre pourquoi cette référence vient s'insérer ici.
A vrai dire, l'effacement des zombies durant la seconde moitié de l'intrigue nuit terriblement à la cohérence du film et nous plonge dans un ennui qui devient embarrassant. Et c'est très dommage, car dans un format plus court d'une demie heure, El Santos aurait véritablement été la petite bombe qu'on nous promettait ! Reste de jubilatoires giclées de sang, un mauvais goût excitant et une imagination sans borne dès qu'il s'agit de partir en couille. C'est déjà pas mal !
Etrangement au sortir de la salle on ne croise personne de The Agent. Les horaires sont mal foutus, j'aurais bien voulu savoir ce qu'il en était avant d'aller le voir samedi... Bref, on papote cinq minutes du film avec d'autres blogueurs, puis on parle cuisine (quand un pédé et une lesbienne parle de comment cuisiner des gnocci à la poêle, c'est fabuleux...) avant de se quitter. On se retrouvera pour A Little Bit Zombie samedi 14 !
Un coup de fil à Lionel pour son anniversaire, une pana cotta pas terrible avalée en trois minutes, un nuts dans la poche et on repioche en salle 300 pour Murder Party, le premier film de Jeremy Saulnier, daté de 2007. Petite charge bêtasse contre le monde de l'art, Murder Party est un film fauché fait entre amis une semaine de vacances. Ca n'enlève rien à certaines de ses séquences, qui ont leur charme, à un certain humour qui peut fonctionner, au talent de son metteur en scène qui, sans moyen, a fait des choses pas dégueu (tout en abusant un peu trop des possibilités offertes par le steadycam...). Mais le film est chiant et bavard. Avant de péter les plombs dans un final ultra sanglant, ses personnages ultra stéréotypés papotent, baisent dans un cabanon (mais on ne voit rien...) et se chipouillent sous l'égide d'un "artiste" un peu plus charismatique que les autres. Cette logorrhée semble ne jamais en finir et s'avère d'une vacuité sans fond. Elle ne nous apprend rien sur les personnages, ne fait pas avancer l'intrigue (il n'y a quasiment pas d'intrigue), n'est même pas drôle non plus. Bref, ce film présenté dans la catégorie "Les pépites de l'Etrange" a quelque peu usurpé ce prestigieux statut. Et la présence de son réalisateur dans la salle n'a pas dissipé ma circonspection...
La soirée s'achève en queue de poisson, sur un "massacre de bobos arty à la tronçonneuse" du pauvre (ouf !). Demain on remet le couvert : le très attendu Northwest, le nanar culte Starcrach, le nouveau Quentin Dupieux (avec Eric Judor et Marilyn Manson...) et V/H/S 2 pour clôturer un vendredi bien chargé... En attendant, j'ai bien mérité d'aller me coucher.
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