mardi 20 juillet 2010

AUTECHRE-Move of ten


Autechre retourne dans une période que je pensais ne jamais (re)vivre: celle d'une productivité intense, où le groupe mêle albums et maxis qui n'en sont pas, à savoir de véritables albums déguisés (ep7, par exemple). Correction après un album déstabilisant ou décevant? Certainement pas. Oversteps restera probablement comme un des très grands albums du duo, une de ces oeuvres inattendues qui mettent des années à éclore dans l'oreille du novice comme de l'habitué. Le fonctionnement qu'Autechre a mis au point depuis plusieurs années est chamboulé. Après la livraison d'un album au label, le groupe se fait discrétion en terminant sa tournée. Comme un coup dans le dos, ae promet un "ep" (10 titres et 47 minutes, 2X12") sans annonce préalable: le titre est connu, le visuel terminé, la date d'atterrissage déterminée. Habitude des 2, Move of ten sera une antithèse d'Oversteps. Mieux encore, Move of ten sera une antithèse d'Autechre, sa propre contradiction, qu'il s'offre lui même. Un coup de fusil dans le pied? Non, la juste logique des choses quand on regarde de plus près, peut-être. Oversteps était (du moins à mon sens) leur album le plus Coil-esque, celui qui célebrait l'influence du duo sur le duo. Le cercle imparfait et jamais identique de la pochette laisse place à une version méticuleusement mathématique, graphique sans être humaine. La réponse aux concerts brutaux de l'hiver? Non, juste un écho. Et le rappel qu'Autechre s'est toujours senti investit par la musique qui fait danser, et d'un autre amour musical, d'un autre grand respect, pour des contemporains et qui plus est des camarades de label: LFO. Le rythme reprend donc légitimement ses droits. Il frappe et surtout, se fait remarquablement régulier. Les cassures ne sont plus dans les sons granuleux formant le rythme, la paire fait désormais ses accidents dans la mélodie, tandis que les séquenceurs abattent machinalement des rythmiques. Un kick sur du 4/4 (No border). La base. Par dessus, perlent encore les sonorités glaciales et étrangères, d'Amber à Quaristice, qui ont façonnées le son Ae depuis 20 ans. Par dessous, les basses, poisseuses, épaisses mais toujours restreintes à leur espace. Production fine et précise, rien n'empiète. Pourtant, à l'évidence, la partition est riche de plusieurs intervenants. Sur "Nth Dafusederb" Autechre devient méconnaissable. Dans un bain de samples de flutes lointaines, ou du moins ce qui s'y apparente, surnage un mur de bruit blanc qui en devient étouffant, le rythme qui ne cesse de se boucler s'en trouve tout de même malmené. Comme si Booth & Brown noyait du Boards of Canada époque premier album dans un bain de Pansonic. Deuxième "album" en moins de 6 mois, deuxième coup de maitre. La concurrence se prend une double ration dans la douleur. En fin d'album le rythme s'esquinte, voir disparait, et les complexes mélodies instables se font plus insistantes. Comme bouclant la boucle, Autechre entame son silence. Et l'on constate en y regardant de plus près, qu'à nouveau, ce cercle sur la pochette n'est pas si mécanique, si machinale.

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