
dimanche 20 février 2011
TYLER THE CREATOR- Bastard

jeudi 17 février 2011
Black Swan de Darren Aronofsky

Certains ont cru, voire espéré, qu'Aronofsky deviendrait un artiste déchu et sans avenir suite à l'échec tant critique que commercial de The Fountain en 2006. Ce film, qui vît Aronofsky pousser les logiques esthétique et scénaristique déjà éprouvées dans Pi et Requiem For A Dream à leur paroxysme et certainement au delà de leurs limites intrinsèques, fut lynché, plus ou moins justement, par tout un pan de spécialistes y voyant l'occasion de descendre un talent et d'enterrer une carrière.
Ce qu'ils n'avaient certainement pas prévu, c'est la force de renouvellement qu'a pu fournir le réalisateur américain. Ce dernier s'est montré capable de tourner le dos à son esthétique ultra léchée, à certaines habitudes de cadre (pour en adopter d'autres), à une certaine surenchère visuelle qui étouffait peut-être la force dramatique de ses précédents opus.
De ce fait, The Wrestler fut un véritable choc pour les adeptes d'Aronofsky. Imbibé de culture (cinématographique) européenne et bercé par le cinéma indépendant américain, se balançant entre Cassavetes et le naturalisme des Dardenne, le film, qui voit par ailleurs la résurrection qualitative de Mickey Rourke, marque un tournant important dans la philosophie esthétique du cinéaste.
Black Swan s'inscrit directement dans la continuité de cette précédente oeuvre et en reprend même quelques bases élémentaires. On suit ici la déchéance d'un être (physique dans The Wrestler, psychologique dans Black Swan) qui a aperçu les sommets au mépris de sa santé, de sa vie et des autres. Black Swan est l'histoire d'une danseuse qui, au crépuscule de sa carrière se voit enfin proposer le rôle principal d'un ballet. Mais ce rôle, exigeant, difficile, ne va pas sans de nouveaux efforts. Dévoré par sa volonté de réussir et par la complexité du personnage qu'elle doit incarné (ou plutôt des personnages, le cygne blanc et le cygne noir), la jeune femme s’effondre dans l'hystérie et la paranoïa.
Le film d'Aronofsky a cela de fascinant qu'on ne sait par où il faut en commencer la lecture tant son sujet et sa mise en scène foisonnent et transpirent d'une intelligence et d'une fine maîtrise de l'excès. C'est l'un des thèmes principaux du film. D'abord par le caractère particulièrement archétypique des personnages qui l'habitent. Les femmes sont gonflées des tares freudiennes qui leurs sont coutumières, saphisme et hystérie, tandis que les hommes sont affligés d'une virilité bestiale et inconséquente. Et pourtant, cela ne choque pas, au contraire, cela subjugue.
Ensuite parce qu'Aronofsky conduit son héroïne aux confins de la folie. Nathalie Portman, qui tient certainement là l'un de ses plus grands rôles, navigue dans une perdition latente, dans une tension qui bascule, qui chavire, avant de s'engouffrer avec violence dans une parano sordide et hallucinatoire.
Film sur le monde impitoyable de la danse, sur la folie mais aussi film de passage. Portman incarne à merveille cette jeune femme enfant hantée par une mère tyrannique qui la maintient prisonnière dans un monde enfantin sordide. Son rôle, une nouvelle danseuse, remettent en question ce monde confiné et la jeune fille se découvre femme, attirante, sexuelle...
De tous ces excès Aronofsky tire un film incroyablement jouissif et noir, à la souffrance à fleur de peau qui délaisse peu à peu le thriller pour s'engouffrer sur les sentiers, plus sordides encore, du fantastique et de l'épouvante. Et de nous revenir alors, plus terrifiantes que jamais, les images du Répulsion de Polanski.
On saluera encore la performance de Winona Ryder, méconnaissable, la virevoltante caméra du cinéaste qui nous gratifie de deux séquences de danse mémorables, une en ouverture et une en fermeture. Et l'on dévorera sans fin cette quête effrénée de la perfection, excentrique et glauque, bourrée de symboles et de rituels qui finalement emprunte au paganisme le plus érotique pour créer une mystique de la folie d'une rare intensité.
Matta - Prototype

Pour le plaisir: PAN
vendredi 11 février 2011
Rosemary's K Diaries : Binaire/Nicolas Dick

Binaire continue dans des morceaux dans la veine d'Idole, avec ce rock/punk mongoloide hachée et découpé à la machette. Les rythmiques s'emballent, les machines lancent le tempo et les guitares sautillent tout en s'emballant dans des murs du son galvanisants. Binaire cette fois ci se la raconte en français, ce qui accentue le côté tube et hymnes de chacun de ces quatre morceaux. Toujours aussi hurlé, toujours aussi débile, toute en ironie, les phrases fusent, provoquent et titillent: "un corps ethéré, de l'héro dans le nez, c'est une putain de soirée". Binaire pousse la lourdeur de son son et le côté lumineux dans ses retranchements. Les chants se passent le relais, hurlements versus hurlement lorsque le tempo s'emballe. Putain de soirée commence par des chuchotements conteurs, dans un morceau dionysiaque rempli d'ironie. Sur Massacre en France, c'est Marilyn, qui chantait sur Tellurique de Kill The Thrill qui se permet de repasser au premier degré dans une diction engagée et salutaire. Finalement, ces quatre morceaux sont encore meilleurs que les précédents, toujours plus loin dans le côté immédiat, toujours plus vicieux sur la durée, toujours plus tristes dans la gaieté. Binaire c'est le son du dancefloor qui implose, le son du punk qui s'amuse avec ses machines.
De l'autre côté, Nicolas Dick continue son expérimentation commencée avec une belle journée, avec une seule piste bien nommée retourné, en guise de quatrième jour des journaux de Rosemary. Nicolas Dick joue toujours avec ses textures, déconstruit ses mélodies orientalisantes et atteint certaines apothéoses de mur du son qu'il efface aussitot. Un morceau immersif, digne des expérimentation de Fennesz, rempli de vie grâce à un son organique. Marrant comme le sérieux que dégage la musique de Nicolas Dick s'oppose totalement à la douleur non feinte de l'humour noir de Binaire et à son envie festive. On attent la réedition d'Une belle journée en LP et on l'encourage à continuer dans cette voie. L'objet quant à lui est encore plus réussi que le premier volet, avec une illustration magnifique aux jolies couleurs bien immersive bien loin de la photo de famille du premier volet. Toujours un coupon téléchargement fourni avec, histoire de pouvoir dodeliner de la tête sur les morceaux de binaire en voiture. On attend la suite, qui sera le nouvel album de l'enfance rouge en double 10'', comme quoi, la structure semble pour l'instant réaliser un sans fautes sur les projets. Merci à eux, en attendant le jour 5 et 6. (Les disques de plomb)
jeudi 10 février 2011
Subheim - No land called home

mercredi 9 février 2011
SEEFEEL-Seefeel

Dans l'idée générale, ce nouvel album de Seefeel a plus à voir avec leur début qu'avec leur chef d'oeuvre Succour, sorti au milieu des années 90. Alors collègues de label avec Autechre et Boards Of Canada (le dernier concert de la formation initiale s'effectua d'ailleurs en compagnie de ces derniers, l'un des quelques 5 ou 6 concert que donna BoC de toute leur carrière) leur musique, orignalement exécuté par un groupe de rock (guitare/basse/batterie) n'en avait plus la moindre trace, bien plus à mettre en liaison avec leur label et ses spécialités, l'ambient, l'electronica ou je ne sais quoi encore fait à base de glapissements de séquenceurs et d'oscillateurs. Seefeel pour son retour s'accroche à une batterie sauvagement acoustique (du moins elle sonne de la sorte) et ne s'offre que peu de variation dans le son. C'est d'ailleurs le parti pris le plus étrange pour l'album et qui peut être le plus gros défaut du disque. L'électronique permet un renouvellement du langage toujours appréciable. D'un morceau à l'autre, la musique change sa parure. Avec Seefeel, les mêmes sons reviennent sans cesse, créant une sorte d'enfermement sonore très particulier. La caisse claire sonne toujorus identique. La basse aussi. Et les sons de claviers, les effets, les distortions également. Le fait que la musique se porte d'avantage sur des constructions progressives et électroniques en font donc, à l'inverse d'une dynamique rock, une sorte de redondance qui peut aussi fatiguer l' auditeur. Pourtant l'album, entre sonorité poisseuse, marécageuse et audaces bruitistes et spatiales surnage sur cette étrange décision. La musique de Seefeel est étonnamment plus concrète que sur Succour, s'avère aller d'un début vers une fin, porte un but. Le disque semble être un voyage, avec ses pauses et intrusions d'abstraction bruyante et ses longues épopées rythmiques. Une partition longue et segmentée en morceaux. Et si effectivement parti pris il y a , la production générale n'en est pas moins puissante. Clifford et sa bande viennent d'enregistrer parmi les lignes de basses les plus massives récemment gravées sur un sillon. Les éclats de bruits et de distortions cisaillent remarquablement les autres éléments. L'air de rien, surtout, l'album renvoi un sentiment de tristesse, de mélancolie diffus et largement entretenu pendant les 11 segments. "Seefeel" présente un groupe qui se replace logiquement sur l'échiquier des groupes innovants et passionnants, en proposant une oeuvre unique ( aussi bien pour le fond que pour la forme) et sombre mais néanmoins soigneusement esquissée.
dimanche 6 février 2011
Un été suédois de Fredrik Edfeldt

Un été suédois soulève un problème qui est récurrent chez nous, celui de la traduction des titres de films étrangers. Un été suédois est en effet la traduction choisie pour Flickan qui signifie "petite fille" en suédois... Alors certes, le film se déroule durant l'été en Suède mais le choix de Flickan n'est pas anodin, comme ne l'est jamais un choix de titre (enfin normalement). Si Edfeldt a choisi pour son premier film de l'intituler Flickan, c'est bien parce que toute son intrigue tourne autour de cette jeune fille à la chevelure rousse et au regard triste. Ceci n'est pas la chronique d'un été suédois mais le récit initiatique d'une petite suédoise qui se déroule durant l'été. Ce qui n'est pas la même chose...
Je referme donc ce lourd aparté (mal écrit et un peu ballot) pour revenir à cette petite chose délicate et fragile. Flickan est un peu comme une de ces babioles sans intérêt pour les grandes personnes mais qui prend une dimension sentimentale voire initiatique pour les enfants. Cette fillette rêve de l'Afrique. Ses parents y partent bientôt et elle est persuadée d'être du voyage. Seulement quelques jours avant le départ, ils lui apprennent qu'elle ne vient pas et qu'elle va passer l'été avec sa tante, qu'elle ne connait pas vraiment. Cette tante est inconséquente et la jeune fille n'aura pas de mal à l'éloigner de la maison, l'envoyant faire du bateau avec un riche bonhomme qu'elle convoite. La gamine reste seule dans sa grande maison, livrée à elle-même...
Flickan sort un brin des sentiers battus et rebattus de l'initiation chez l'enfant en confrontant parfois très cruellement la jeune fille à la réalité du monde qui l'entoure. Edfeldt cadre son personnage dans des plans très serrés, comme s'il l'enfermait dans cette innocence voilée et trouble. Le début du film laisse en effet peu de place à l'espace et aux autres personnages. Puis les plans s'ouvrent peu à peu, timidement, laissant jaillir les autres dans ce micro-univers.
Pour le pire et pour le meilleur. Le film dépeint avec sévérité et noirceur l'irresponsabilité des adultes (les parents de la jeune fille partent aider des enfants en Afrique mais laissent leur fille entre les mains d'une tante immature...), la frivolité des préoccupations adolescentes. Il oppose l'univers complexe, naturaliste et solitaire de sa jeune fille à celui de ses deux amies, deux godiches manipulatrices qui s'invente une célébrité de carton en faisant du play-back sur les chansons d'Abba.
Seulement cette solitude est troublée de toute part par l'irruption d'un charmant petit blondinet dont la jeune fille s'entiche. Les premiers émois, très pudiques, très maladroits sont retranscrits avec une infinie justesse qui met parfois mal à l'aise (comme lorsque la fillette s'assoie sur un miroir les jambes écartées pour dessiner son sexe sur une feuille de papier). On est touché, troublé, inquiet devant l'éclatement de cette jeunesse. On pense à la merveilleuse Swedish Love Story de Roy Anderson (En Karlekshistoria, 1969), monument oublié du film sur l'adolescence.
Enfin Flickan évite le piège nostalgique. Bercée dans une mise en image très raffinée (oeuvre du directeur de la photographie de Morse) le film propose, distille malaise et beauté avec un réalisme élégiaque et clair. Même si elle se situe dans les années 70, l'intrigue touche à "l'universel" à travers une approche pourtant très personnelle du rapport de l'enfant au sexe, à l'amour, à la liberté et à l'autre.
Le discours d'un roi de Tom Hooper

Chaque année offre son grand Colin Firth. Cela pourrait être un nouvel adage. L'an dernier l'acteur britannique était passé tout prêt de remporter une statuette pour sa très belle composition dans le non moins formidable A Single Man de Tom Ford. Mais une telle affirmation reviendrait à faire abstraction d'une carrière qui a longtemps hoquetée entre navets de premier ordre et seconds rôles remarqués. Sa performance chez Ford n'efface pas les horribles Bridget Jones, Love Actually ou encore La dernière légion mais nous rappelle aux bons souvenirs d'un acteur doué qui fut le Valmont de Milos Forman au début des années 90...
D'autre part, il convient pour ce Discours d'un roi de remettre cette performance dans le contexte d'ensemble du film. Colin Firth interprète ici le roi George VI, confronté à un bégaiement qui l’empêche de prendre la parole en publique. Sa femme le pousse dans le cabinet d'un orthophoniste peu orthodoxe qui va bousculer ses royales certitudes et devenir, au fil des ans, son ami.
En voilà donc une belle histoire qui devrait affoler les compteurs à Oscars. Hooper ne prend pas vraiment de risques en adaptant cette pièce de théâtre, suivant en père tranquille une narration chronologique balisée et parfaitement ordonnée, dénuée de la moindre surprise. Le scénario apparaît parfois enfantin tant est si bien que ce classicisme formel passerait presque pour une vision simplette des processus historiques qui cernent l'intrigue.
Car au-delà de la rencontre entre ces deux hommes, il y a un contexte historique lourd. La montée du Nazisme et l'entrée en guerre de la Grande Bretagne. Tout cela passe loin, très loin des préoccupations de Hooper, trop concentré à mettre en boite sa jolie leçon d'amitié. Du coup, son film manque cruellement de profondeur historique et s'affadie au fil des minutes.
Il s'affadie d'autant plus que certaines petites choses deviennent elles aussi très irritantes. Le jeu outré et cabot d'Helena Bonham Carter qui en fait des louches, noyant son personnage dans une surenchère toute burtonienne particulièrement indésirable... Et puis il y a la musique de Desplat, lourde elle aussi, oppressante et vieux jeu.
Tout cela laisse un sentiment assez mitigé au final. L'impression laissée par Firth et Rush, tout deux impeccables, et par les dialogues, finement écrits, est contrebalancée par un manque flagrant d'audace qui semble ramener le cinéma dans des circonvolutions anachroniques, voire ancestrales. Au fond, loin d'offrir une lecture intrigante des méthodes de l'orthophoniste ou de la complexité des relations de pouvoir qui se tiennent entre les deux hommes, Hooper offre juste une petite fable, un gentil Rox et Rouky pour adultes, agréable pour les yeux mais sans grande ambition.
jeudi 3 février 2011
FluiD - Duality

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