jeudi 25 août 2011

GLASSJAW-Coloring book

Et la claque arriva juste derrière. Qui aurait pu croire que ce groupe taré allait complètement redéfinir sa musique (ne serait-ce que le temps de cet ep) ? Glassjaw aurait pu revenir en sortant un album, triomphal, pour tenter de récupérer une couronne qui lui revenait, celle de l'emo-rock teigneux qu'ils ont largement pré-défini et qui mal copié par des ignares rempli les balladeurs mp3 de quelques gamins colonisant les rues du 11ème arrondissements le samedi. Et pourtant, Palumbo, Beck, Carrero et Lang reconstruisent complètement le bâti Glassjaw et le pare de nouveaux éléments, tout en maintenant l'identité du groupe avec force. Coloring book suit de peu Our color green et se propose comme la version renouvelée d'un groupe silencieux pendant presque une décennie. La hargne du groupe s'est changé en tension, une tension lourde, continu. Les nouveaux morceaux du groupe New Yorkais flirtent avec une noise poisseuse. Lang est un passionné de Jazz et le groupe semble hurler haut et fort son amour de l'afrobeat sur ces compositions, mené par une batterie souvent monomaniaque, mais totalement inspirée. Beck élargit son terrain de jeu en s'offrant quelques lignes de claviers, de pianos électriques placées ici et là. Palumbo ne hurle plus, mais pose toujorus sa voix qui semble possible des plus improbables écarts, et dessine de brillantes lignes mélodiques sur l'ensemble rythmique. Surtout, on remarquera le travail incroyablement soigné de Carrero sur ces 6 titres. Il livre d'énormes lignes de basses, profondes, lourdes, étouffantes et parfois mélodiques (le refrain de Miracle in inches). Il fait glisser ses cordes vers le fond du spectre sonore, et insuffle un groove vicieux mais qui donne au groupe une identité remarquable. Les 6 titres semblent pencher presque vers un dub urbain, sale, tout en maintenant le cap d'un rock qui tire directement ses enseignements du hardcore. Un hommage aux Bad Brains qui pourrait presque sonner comme une version acceptable de God, Ice ou 16-17. Mais Glassjaw demeure bien mieux élevé que ces formations voraces. Il se reconstruit en tout cas sur ces 6 titres avec une classe royale, une créativité qu'on aimerait entendre plus souvent pour accoucher d'un disque ambitieux et particulièrement réussi.

ps: On regrettera juste que ce disque ne fut que donné lors de quelques shows US, en attendant un pressage hypothétique et commercialisé à plus grande échelle... ou un album de cette trempe.

GLASSJAW- Our color green

Glassjaw sort enfin, après des années sans aucun signe discographique digne de ce nom, une suite à son excellent second album, "Worship & Tribute", sorti en 2002. Disséminé sur une poignée de vinyle qu'il vous sera pratiquement impossible d'acquérir, Our Color Green compile digitalement ses vinyles et propose une poignée de morceaux composé entre 2005 et 2010, comme si le groupe avait simplement voulu enregistrer ces morceaux pour qu'ils ne tombent pas totalement dans l'oubli avant de passer à autre chose. Cinq morceaux qui semblent tout droit dans la lignée de ce que le groupe a toujours fait, en poussant sa folie hystérique peut-être encore plus loin. Mosh part soignés, riffs coupeurs de têtes, basses nébuleuses, hurlements inhumains puis aplats mélodiques et chants impeccablement élastique, le duo Beck-Palumbo continue de faire Glassjaw comme ils le font depuis Kiss Kiss Bang Bang, mais les excès de brutalité et d'hystérie rappellent plus Siberian Kiss qu'Ape Dos Mil. On est donc plus proche du premier album, puisqu'on voit d'ailleurs le bassiste dudit album, Manuel Carrero, revenir dans le groupe accompagné de Durijah Lang- ce qui constitue d'ailleurs et de manière surprenante la version la plus longuement stable du line up de Glassjaw. Sans aucune surprise sinon un coté "bigger stronger faster", Glassjaw marque un retour discographique plaisant mais pas inoubliable.

jeudi 18 août 2011

††† (CROSSES)- S/T EP

Après le prodigieux retour de Deftones, quasi inespéré vu la situation humaine du groupe et musicale jusque là (qui se souvient des albums après White Pony, jusqu'à Diamond Eyes ?) Chino Moreno s'offre une pause avec un nouveau groupe, visiblement un duo, appelé "†††" ou Crosses, qu'il forme avec Shaun Lopez, producteur et déjà ex- Far à nouveau. Cette nouvelle incarnation envoie un message qui semble assez clair quant à l'avenir de Team Sleep: "†††" navigue dans les mêmes eaux, quoique bien plus classiques. C'est d'ailleurs là ou ça coince: Si Team Sleep possédait de réelles qualités dans ses compositions, il disposait surtout d'une mise en son remarquable. On ne pourra pas en dire autant de ce nouveau projet, nettement plus bas du front. On est du coté d'un rock pop où Chino chante comme dans Deftones, très peu de différence, si ce n'est que l'aspect metal est totalement écarté. Ici on est bien plus dans le domaine du synthé. Les vidéos du site sont d'ailleurs assez précises quant au talent de claviériste du duo, si bien que ce premier EP est aussi subtil qu'un projet metal de Stephen Carpenter. On s'aperçoit que Chino réussi enfin à mettre sur pied son propre groupe "à la" Depeche Mode, version boite à rythme qui fait boum boum et riffs de guitare convenus. On sauvera l'avant dernier morceau et ses faux airs de rock composé par Danny Elfman, débouchant sur une outro qui se tient.

mardi 16 août 2011

WILEY- 100% Publishing

Une pochette peut encore, aujourd'hui, attirer l'attention, j'en suis la preuve. J'avais fait une croix sur Wiley, son album Playtime is over, le seul que je possedais jusque là, me semblait trop monomaniaque, pas incroyable, vite oublié, entendre le mec caler des "Eskiboy" dans chaque phrase usant ma patience. Pourtant, un tatouage dans le cou devrait être totalement rédhibitoire, le genre de truc que tu trouves désormais surtout chez le mec faisant le plein à coté de toi à la station essence ou chez les vendeurs de godasses de Carnaby Street. Mais la pochette, toute en sobriété attira ma curiosité. 100% Publishing parce que Wiley a tout fait tout seule, et au bout du compte on se rend compte qu'il s'en sort plutôt pas mal sur ce 7ème album. Si on met de coté le très dispensable "Boom Boom Da Na" avec son gimmick de fête foraine qui arrachera tout de même un sourire, les titres de ce nouvel album se tiennent, Wiley sait produire et donner du corps à son grime nerveux. "Wise Man..." pourrait être un naufrage totale, mais la tentative de piano classique et de beats méchants révèle même une certaine finesse dans la réussite. On restera plus circonspect quant au médiocre "talk about life", mais l'anglais ne s'excuse pas de loucher sérieusement du coté du R'n'B pute. Wiley est ultra prolifique et le temps d'assimiler cette galette, déjà deux autres sont en chantier, et devraient sortir prochainement (si ce n'est déjà fait). A croire que l'Angleterre regorge de MCs qui en veulent plus que de raison, cette boulimie de production étant déjà relativement présente chez son (ex) pote Dizzee. On aimerait que Wiley ne finisse pas en train de cabotiner chez Shakira.

DJ HARVEY- Locussolus

DJ quasi légendaire (notamment ces derniers temps grâce à une omniprésence web-esque qui fait gausser le geek de forum croyant en premier lieu en une erreur avec Poly Jean), DJ Harvey enregistre avec ce Locussolus un album qui semble dire tout ce que le mec tente déjà de faire passer à travers sa touche: le gars fait de la musique d'une autre époque pour enivrer la foule et probablement pour que la fille au premier rang qui se déhanche finisse par lui faire une proposition salace qu'il ne pourra pas refuser, que ce soit dans sa chambre d'hôtel, sur la plage à coté, ou dans les chiottes du club où Harvey pousse les disques. Avec ses beats langoureux ou discoïdes, ses samples de guitares psychés, ses synthés passé au phaser, ses périples quasi dub progressifs ou encore ses remixs bon goût, tout dans ce disque finit par sentir la communion avec l'autre, peu importe la forme. Harvey est ceci dit un homme de gout, car dans sa débauche, il s'assure une production de grand, comme son pote Weatherall, qui ne s'oblige pas à une débauche d'effet, mais proposant un disque qui aurait pu sortir 15 ans plus tôt, sans abuser de l'infra qui tape, du wooble et de la caisse claire fatigante. Après l"intelligent dance music", voici un chapitre de plus dans l"hedonistic dance music".

LIMP BIZKIT- Gold cobra

Il semblait quasiment impossible que Durst ressorte un jour un album sous le nom Limp Bizkit après la débâcle (inexplicable ceci dit) de 2006. Après son disque le plus réussi (aucune mauvaise langue ne pourrait affirmer le contraire) en 2005, un disque d'une sobriété insoupçonnable et d'une puissance remarquable, Borland s'en était allé, préférant des projets aux relents plus gothiques qu'aux conneries de Durst pourtant toujours épaulé par DJ Lethal et Sam Rivers (seul membre constant de la formation avec Fredo, et pourtant toujours en retrait). La suite se composa de 2-3 ans où Durst pleurniche à propos de son groupe défunt sur sa page myspace en mettant régulièrement des chansons à l'eau de rose, tandis que la maison de disque sortait un best of aussi inutile que méprisé par le groupe lui-même. La rumeur du re-retour de Borland auprès des siens prit forme en 2008, se concrétisant en 2009 par quelques concerts ici et là. Mort et encore debout.

Bêtement, on attendait, ou on espérait une suite à "Unquestionable truth", alors que les intentions, notamment de Borland sont tout autre:"amusons nous tant que nous en avons encore l'âge". Le guitariste sait ce qu'il vaut sur le marché du rock'n'roll, il n'est pas idiot, il connait sa cote, et n'ignore pas qu'il est convoité par les plus grands. Pourtant le petit génie de la guitare semble incapable de s'épanouir en dehors de son groupe de toujours. Et le clip promo de ce nouvel album le montre dans une grande forme: déguisement, maquillage, pose ridicule, Borland joue son propre jeu à fond... et derrière la guitare, le constat est similaire: Peut-être moins efficace que sur le mini album de 2005, Wes est capable des riffs les plus décisifs, des triturages de 6 cordes les plus inventifs, comme il l'a toujours fait avec le groupe. En ce sens, l'album Gold Cobra, attendu pendant plus de deux ans est un disque d'une grande logique dans la carrière du groupe. S'écartant de la sur-production de Chocolate Starfish, ce disque fait le lien parfait avec le premier album et Significant Other: tout est là et rien ne bouge, mais renonce cependant au surplus de vernis de "CS&HDFW" en optant pour une production plus mate. Compositions impeccables, sens du spectacle, Lethal toujours d'une aide précieuse quand il est temps de gonfler la musique de trouvailles, et une section rythmique solide et puissante (John Otto est un excellent batteur, Rivers un bon bassiste). Reste ce qui plombe le groupe depuis ses débuts et plus encore depuis le troisième album (pour faire court: une production ahurissante quoique bien trop bidouillée, les meilleurs riffs de Borland, et un Durst qui s'auto-parodie jusqu'au bout, couinements aigües et paroles embarrassantes en guise de cahiers des charges pour chaque morceaux): son chanteur. Fredo s'était montré particulièrement efficace et sobre sur le mini album, tendant à montrer que le leader du groupe pouvait aussi fermer sa gueule et se faire pertinent. Evidemment, avec l'ambition de passer du bon temps en faisant du LB et rien d'autre, Durst offre une prestation assez éloigné de "Unquestionable truth", mais reste loin du vomi verbeux à ultra sons que fut Chocolate Starfish. Mais entre les tentatives (même pour rire) à l'autotune et des morceaux comme "douchebag", on navigue quand même largement dans le pénible.

EN 2011, Limp Bizkit existe encore, livre un album musicalement solide, assez dispensable dans sa globalité (ie. avec ses voix et ses morceaux bonus- contentez vous de la version normal). En somme, c'est tout ce qu'on attend d'un gros blockbuster estivale: du bourrin qui tache, pas forcément malin, construit avec quelques bonnes idées et qui en met pleins la gueule. Mais pas inoubliable, avec quelques blagues scato-lycée et un sens de la mise en scène peu subtil.

mardi 2 août 2011

XOMBI- John Rozum & Frazer Irving, DC Comics

Depuis l'ouverture de BTN, je me dis qu'un jour, il faudrait que je fasse une chronique BD, voir même tenir une sorte de billet régulier. Lorsque vous lisez la petite présentation sur le coté, il est spécifié qu'on parlera de tout, et si depuis quelques mois le cinéma est présent dans ces pages, que quelques livres et même revues ont eu leur place ici, les BD n'ont pas encore eu leur chronique. Il y avait pourtant eut un billet surWatchmen, sur Dodgem Logic, qui auraient pu mettre sur la voix, et quelques tentatives avortés de chroniques (black hole, pour ne pas le nommer) doivent somnoler dans un vieux disque dur-me tenant à l'écart par prudence d'un regard poussé, n'étant pas un fin analyste de la mise en page d'untel ou du "storytelling" d'un autre.

C'est en ouvrant le deuxième numéro de Xombi que j'ai vu l'opportunité de corriger le tir. A peine arrivé à la cinquième page, une nonne dégomme des mômes à coup de revolver tandis qu'une autre fissure du crâne de mioche au coutelas. Etonnamment publié par DC (on aurait pu s'attendre à une série Vertigo, le label adulte de l'éditeur), Xombi dégueule de concept dans tous les sens, si bien que les 22 premières pages de la série contiennent plus d'idées que 95% de la publication actuelle par an. Rozum, scénariste, ressuscite une série qu'il avait défini dans les années 90 et qui s'était étalé sur 22 numéros. Il rend vie à son personnage, David Kim, un scientifique infesté de nanotechnologies increvable. On pense d'ailleurs fortement à Vertigo lorsqu'on lit les premiers numéros et on pense plus encore à Grant Morisson, le génie écossais. Même foisonnement, même hystérie, même ambiance. Et Rozum se paye Irving aux dessins, qui sort tout juste de quelques collaboration avec Momo, puisque responsable de quelques unes des pages les plus terrifiantes de Batman & Robin. Irving est un génie, il dessine un monde psychédélique et etouffant comme peu et colore lui même ses crayonnés avec classe et rigueur. Et lorsqu'un génie s'associe à un malade mental comme Rozum (je m'appuie juste sur le scénario que je lis actuellement pour tirer de telles conclusions quant à la santé mentale de l'auteur), le résultat est simplement brillant. Complexe mais fluide, Rozum écrit une histoire qui actuellement semble totalement maitrisée. Pour les connoisseurs qui n'auraient pas encore tenté, Xombie se rapproche dangereusement de l'age d'or de Vertigo (radote). Pour les frileux quant aux comics, le style de Frazer Irving devrait convenir pour se plonger dans cette fresque sans rejets allergiques.

Pour les curieux, la série comporte actuellement 5 numéros (VO) facilement dénichables dans certaines échoppes, quant aux curieux qui ne seraient pas adeptes de l'archéologie, une version relié devrait probablement sortir d'ici quelques mois.

PS: l'illustration choisie est la couverture non définitive du n°4, à mon sens illustrant au mieux la créativité habitant Rozum & Irving.