lundi 29 novembre 2010
Journal d'un festivalier masochiste (seconde séquelle) par Moi
Brian Eno - Small Craft on a milk sea
samedi 27 novembre 2010
Arbee - La permanence de l'objet
mardi 23 novembre 2010
ANBB: Alva Noto & Blixa Bargeld - Mimikry
vendredi 19 novembre 2010
NORTH MANC BEDS - Mancweb
Je ne suis pas systématiquement ce qui sort de chez Skam, les sorties du label n'étant pas forcément disponible. Dommage car une constante, outre la musique, électronique, Autechre-esque (forcément) est le soin apporté aux objets, où moult disques du label sont caractérisés par la présence de stickers en braille sur les pochettes. Ce maxi de Morth Manc Beds, déjà responsable de quelques 12", ne va pas à contresens: tout est sur le label central, mais accompagné d'un horizon industriel grisâtre imprimé sur une feuille calque qui ne semble correspondre à aucun format. L'achat se fait en confiance. Musicalement, ce collectif discret et mystérieux dont le nom complet est The North Manchester Bedroom Allstars, produit une électro qui trouve logiquement sa place sur le label anglais: froide, complexe. Les machines s'expriment comme chez nombre de leur collègue de label, sauf que le groupe oscille parfois entre les franches réussites et les tentatives casse-gueule, comme sur le premier morceau de la seconde face, riff synthétique mal collé sur une boucle, qui semble ne jamais vraiment aller nulle part. La suite est par exemple bien plus convaincante avec une plage en forme de cavalcade rythmique pas éloigné de certains morceaux des frêres poussières (Fight Club), ou encore ce morceau final, habité par un cor synthétique (Coil?). La première face (il y a un début à tout) commence par des crissements électroniques usant, et se termine par un morceau qui sonne comme un inédit de Gescom. Il fait gris, c'est le moment idéal pour ce genre de disque.
jeudi 18 novembre 2010
COMITY-you left us here.../the Andy Warhol sucks ep
Ecouter Comity aujourd'hui me replonge immédiatement vers une période pas si lointaine, celle des concerts à 4€ dans les salles les plus crasseuses de Paris, de l'oppulence de groupes pillant le "Hardcore Chaotique" de Converge et de Breach, des distros, d'une époque où tout le monde n'avait pas un tatoo colossal sur le bras, et tutti quanti. Vieux con? Je ne pense pas, tout ce folklore doit encore exister, mais les scènes changent, et les gens vieillissent me direz vous. Breach, Bloodlet, Coalesce, Botch se sont à peu près tous séparé entre 2002 et 2004, leur influence s'est évaporée, le "sludge" et le "post hardcore" sont passés par là.
mercredi 17 novembre 2010
Eskmo - Eskmo
lundi 15 novembre 2010
PUBLIC ENEMY- Elysée Montmartre
Big Ad, qui a déjà écrit dans ses pages, a fait un truc dans sa vie, assez inavouable, mais qui lui permet d'avoir ses petites entrées pour des concerts pas inintéressants. Du coup, c'est une proposition bienvenue que de partager une entrée pour aller voir Public Enemy, au vue de la rançon demandée pour assister au concert.
En première partie, j'ai copieusement raté un groupe dont je n'ai absolument rien retenu si ce n'est qu'un des types sur scène portait un tee des Hyeroglyphics, posse de Del Tha Funkee Homosapien, qui ont été suivi par une damoiselle en leggin/casquette sans le son, puis par un groupe fusion que je qualifia gentiment de groupe de fin de siècle révolu pendant que Big Ad analysa "on dirait les groupes de la BO d'American Pie", ce qui doit probablement constituer l'insulte la plus belliqueuse jamais usé sur ce site.
Choses sérieuses maintenant: PE en 2010. L'argument du concert ce sont les vingts berges de Fear Of a Black Planet, l'album obligatoire du groupe, un disque dont on ne peut affirmer pleinement jusqu'où son influence s'arrêtera. Pas maintenant en tout cas. Mais c'est aussi un groupe qui n'a plus sa superbe, qui cachetonne salement pour renflouer les caisses, et qui ne génère plus le même respect qu' au siècle dernier. Sans compter les rumeurs d'un Chuck D essoufflé et d'un Flav grabataire (après tout, Terminator X possède désormais une ferme où il élève des autruches, comme quoi la retraite chez PE a son petit charme). Pourtant, Flav prend le temps d'assurer à son public que ce soir, tout le monde en aura pour son argent, avant de sortir son délicat pendentif, créant l'hystérie des fans des premiers rangs, tout en enquillant sauvagement sur Welcome to the terrordome. Malgré la sécu qui fait ses petites chorégraphies (histoire d'emmener toute la famille en tournée), le besoin pour le groupe de faire une pause entre chaque morceau (parfois longue, la pause, même si Flav derrière une batterie vaut le coup d'oeil), et les flows datés (Chuck D n'est ni Busta Rhyme, ni BusDriver), Public Enemy sur scène est un impressionnant spectacle qui se démène pendant deux heures en tentant de ne pas relâcher la pression que ce soit en ressortant Bring The Noise, Burn Holywood Burn (accéléré), Don't Believe the Hype (et où les boulets se sont enchaînés sur scène pour tuer le temps) ou en présentant un single un peu mollason tiré de l'album à venir, accompagné de son groupe basse/batterie/guitare -des mecs ayant aussi bien joué avec Ja Rule, Jay Z que Stetsasonic ou Big Daddy Kane. Même si concient d'avoir raté l'age d'or du groupe, Public Enemy pourrait ressembler à une question récurrente du courrier des lecteurs de Rock n Folk: PE en 2010 toujours opérationnel. Gros concert, avec l'énergie et le chaos recherchés des enregistrements toujours aussi remarquable!
Journal d’un festivalier masochiste (première séquelle) par Moi.
Quoi de mieux pour débuter qu’un film canadien ? Bon ok, comme ça c’est pas évident, mais bon, faut bien commencer par quelque chose. Première séance du week-end, un brin d’excitation (je ne devrais plus, quand même, ce n’est pas mon premier festival) avant d’entrer dans la salle 300 pour y voir Off World qu’on nous présente comme le petit chef d’œuvre d’un jeune réalisateur français, Mateo Guez. Et quel chef d’œuvre mes amis ! Dans une boursouflure que je n’ai que très rarement connue, Guez nous conte le voyage initiatique d’un jeune canadien d’adoption, de retour aux Philippines pour y retrouver ses racines. Ô miracle, il y retrouve son frère, un jeune prostitué gay, sa mère (dans un torrent de larmes et un élan d’instinct maternel d’une cosmicité sidérante) et puis tant qu’à faire, l’amour aussi. Guez réussit presque une performance de haut vol en faisant de chaque plan un potentiel, un espéré, un désiré plan de fin !
Et on le supplierait même d’abréger nos souffrance le plus vite possible tant la pesanteur moite de sa narration déstructurée (et parfois peu compréhensible) nous comble d’un profond ennui. Mais non, il ne recule devant rien le garçon, aucun cliché ne lui fait peur, pas même de nourrir son monstre mélodramatique d’une marmelade sentimentalisante imbuvable. Difficile de douter pourtant de la sincérité du monsieur, mais ces effets de style outranciers, cette surenchère laborieuse de chaque instant, appuyée par une musique répétitive et condescendante… Non franchement, la lamentation, la contrition, moi depuis Twilight, je peux plus quoi.
Cette encyclopédie de tout ce qui peut desservir le cinéma homo s’achève en nous lessivant jusqu’au bout. Parce que ouais, comme un bon cinéphile un peu maso, je reste dans la salle tant que le générique n’est pas fini et que la lumière ne s’est pas allumée, histoire de repérer qui est le régisseur ou de savoir si la mairie d’Issy-les-Moulineaux a participé au financement… Bon bah en plus d’apprendre que c’est papa et maman qui ont financé le film, on a la chance d’assister au plus long générique de l’histoire du cinéma… Au moins 5 minutes de blackout entrecoupé de photos de gamins qui pataugent dans les ordures de Manille. La classe le reportage photo ! Et puis merci Motorola hein, pour avoir prêté le matos… On en oublierait même que la photographie du film, ses couleurs ou ses mouvements de grue étaient superbes.
Pouah ! On enchaîne vite, on file en salle 500. On imagine que ce n’était qu’un accident et que Uncle David, film britannique coréalisé par Gary Reich, Mike Nicholls et David Hoyle (qui tient le rôle titre du film) va relever un peu le niveau. Qui dit film britannique dit comédie sur fond social, un truc comme ça, ça va forcément être un truc sympa. A un pote qui m’accompagne : « En plus y a un acteur porno gay dedans… Comment il s’appelle déjà… Ashley Ryder… Tu connais ? Moi non plus. Bon on verra bien ».
Bah… comment dire… Déjà résumons vite fait l’intrigue : un oncle (David Hoyle donc) et son neveu (Ashley Ryder) entretiennent une relation amoureuse qui va pousser le premier à accompagner le second dans une mort qu’il désire et qui doit changer le sort de l’humanité… Moi avec un pitch comme ça, je m’attends à quelque chose d’assez nihiliste, qui va chercher du côté de la post apocalypse… L’apocalypse n’aura pas lieu, et si l’éphèbe (étrangement mal monté d’ailleurs pour une pornstar, m’enfin) meurt bien après trois injections d’un produit inconnu, est bien enterré dans le sable noir d’une triste plage anglaise, on n'aura vraiment rien eu de cinématographique à se mettre sous la dent.
Le film traîne une carcasse de dialogues navrants et redondants qui nous promettent sans cesse la mort et le changement et font l’éternel même constat d’un monde à la déroute… Soit. Pas d’action, pas de péripétie, pas de direction d’acteurs (presque toujours en impro), pas de cadreur visiblement, pas de monteur professionnel, pas d’humour, personne non plus pour effacer cette perche ou l’ombre du caméraman qui entre dans le champ… Pas vraiment de cinéma quoi… Le film est d’une telle vacuité qu’on en oublie complètement la nature de la relation entre les deux personnages !
Bon, que faire, que dire… On sort de la salle, à bout de souffle, un peu amer. Avec mon pote nous nous séparons. Lui décide de rester au festival pour aller voir L.A. Zombie de Bruce LaBruce que j’ai déjà vu à l’Etrange Festival et qui relève à peine le niveau. Moi j’ai besoin d’air, d’oxygène. De rire aussi, non par cynisme ou désespoir, mais parce que c’est drôle. Direction le Nouveau Latina pour une Absurde Séance spéciale Hardcore.
21h50, juste le temps de descendre une petite bière (offerte par l’Absurde) avant de rentrer en salle pour deux films d’horreur qui vous rentrent violemment dans le bide. Comme amuse gueule, un petit Rape and Revenge made in Argentine intitulé I’ll Never Die Alone (No Moriré Sola). Pour ceux qui ne savent pas ce qu’est le rape and revenge, direction La dernière maison sur la gauche de Wes Craven : de jeunes demoiselles se font enlever par des vilains machos qui les tabassent et les violent dans les bois avant qu’elles ne se vengent. C’est ça le RaR. Le scénario est le même pour I’ll Never Die Alone, sauf qu’on est dans la Pampa. Rien d’extraordinaire si ce n’est un viol d’une bonne vingtaine de minutes, tourné en quelques plans fixes… Niveau réalisation on n’est pas servi : gros plan sur un cul poilu, longs plans séquences sur des filles qui rebouchent un trou. Bref, si j’ai changé de lieu je n’ai pas l’impression que la qualité de ce que je regarde soit différente… Ce tout petit film argentin n’a en effet que peu d’intérêt si ce n’est d’émoustiller les jeunes bouffeurs de pop-corn.
La véritable attraction de la soirée, et même de la journée du coup, c’est la première française du méchamment sadique et pervers The Human Centipede. Ce film néerlandais de Tom Six, narre la folle expérience d’un chirurgien allemand, autrefois spécialiste des séparations de siamois, qui décide de réaliser un mille-pattes humain, reliant trois personnes de la bouche…à l’anus. Non je ne vous ferai pas de schéma. Oui, ça veut bien dire que lorsque le premier de la chaîne fait caca, il le fait dans la bouche du second qui le fait ensuite dans la bouche du troisième...
Enfin, enfin un peu d’humour putain de bordel de merde ! Le film annonce directement la couleur : notre psychopathe, enfermé dans sa voiture caresse en pleurnichant, une photo de ses trois chiens à qui il a fait subir le même sort. Le ton est donné, le reste n’est qu’un pur plaisir sadique, emmené par le brillantissime Dieter Laser, acteur complètement inconnu mais à la tronche qu’on n’est pas prêt d’oublier ! La salle est hilare, moi aussi d’ailleurs, je prends mon pied devant ce bonheur injurieux et cynique, s’inspirant des expériences menées par les nazis durant la seconde guerre mondiale. Le film va loin, donnant une incroyable aura à son chirurgien fou et nous confrontant à toutes ces petites peurs qui nous taraudent quand on va chez le médecin ou à l’hôpital… Et puis on est bien heureux de les voir, ces deux pouffes, tomber grossièrement dans le panneau et se faire coudre le bec et arracher les dents. Ca sauve la soirée. La journée même… Je ne pensais jamais dire ça mais, comme on dit chez Drucker, vivement dimanche...
mercredi 10 novembre 2010
The Front Porch Poets - Off the record
lundi 8 novembre 2010
Rubber de Quentin Dupieux
Je ne sais pas si Eric Besson me considérerai comme un « bon français » si je lui avouais, presque honteux, que je n’ai jamais compris le mythe humoristique construit autour du film de Francis Veber, Le dîner de cons. Je parle bien de mythe, tant ce cadavre d’humour falot habite encore de nos jours, douze ans après sa sortie, l’inconscient collectif de millions de Français qui furent la proie du rire facile et du jeu de mot bêta sorti tout droit du bidet d’une chevrette neurasthénique. La génération post 98 a elle aussi été contaminée, balbutiant grassement la blague de « Juste qu’a pas de prénom », se gaussant frénétiquement en mâchant son Twix à 16h à la sortie du lycée, en écoutant le Caribou des Pixies, sans savoir « c’est qui les Pixies » mais en trouvant quand même qu’ils ont drôlement pompé Damon Albarn. Symptôme d’une dispersion intergénérationnelle du mal, d’une dislocation prégnante de la classe moyenne et de l’omnipotence de sa subculture vaseuse, fruit du ravage des rediffusions de la dogmatique première chaîne.
Drôle de façon d’introduire Rubber me direz-vous. J’y arrive, lentement mais sûrement. Le drame risque de se perpétuer dans les générations futures et, pire encore, dans le monde entier. Si l’Amérique n’est plus le mythe qu’elle était, la puissance de son soft power correspond encore à une inondation hebdomadaire de films US dans les salles de cinéma. Et voilà donc que débarque, ce mercredi 10 novembre, The Dinner remake de notre boutade française, porté par (l’excellent) Steve Carell. Comprenez mon angoisse : des milliers de gens, nostalgiques pensant se remémorer un mauvais film qu’ils ont tant aimé, patriotes trop fiers de voir la France rayonner par procuration, jeunes poussés par l’inertie de groupe qui vont se laisser happer par l’effet de masse… Autant de victimes innocentes (naïves… niaises… pire…) qui vont très certainement se priver d’un monument d’absurde, de subtilité et de dérision, j’ai nommé RUBBER !
On apprend jamais aux enfants ni aux promeneurs à se méfier du pneu qui dort dans les sables silencieux. Et pourtant, à en croire Quentin Dupieux (aussi musicalement connu sous le pseudo de Mr Oizo), il y aurait de quoi. Rubber est la douce balade à travers le désert d’un pneu télépathe à la recherche de son passé et d’une fille dont il s’est entiché. Perchés sur une colline, amené là par un drôle de flic et un couard en costume, un panel de spectateurs observe, à travers des jumelles le spectacle qui se déroule sous ses yeux en temps réel. Comprenez que ces zigotos voyeuristes sont un peu comme dans une salle de cinéma à ciel ouvert. Ils y demandent le silence, ils défendent leur place, mais plus étrange, ils y dorment, ils y mangent et ils y meurent. Bref, c’est un petit condensé d’ironie sur les merdes que nous, spectateurs, sommes souvent amenés à voir et sur l’industrie qui les produit, qui nous empoisonne.
Dans sa lente course mélancolique, bercé par de chaudes lumières, notre pneu fait éclater quelques têtes, se contemple dans un miroir, découvrant son corps, découvrant qui il est, mate la superbe Roxanne Mesquida sous la douche... Face à lui ? Une bande de flics déconfits qui surnage dans un bain d’absurdité, d’incompétence et d’incompréhension. La course poursuite est à la fois tranquille et jubilatoire, suave et décousue. On entre dans ce désert avec une paire de charentaises et un sirop grenadine, de grosses lunettes noires sur le nez pour contempler l’incontemplable et l’injustifiable, l’histoire d’un objet animé, solitaire et psychopathe, qui zigouille à tour de roue sans foi ni loi. Une sorte de condensé d’amour violent, sublimé par l’étonnante qualité des images du Canon 5D.
La liberté au bout de l’objectif, seul horizon possible à la création, à l'absolue, Dupieux livre un monument d’absurdité et de drôlerie, finement ciselé et parfaitement cadré, impeccablement mis en musique par lui-même. Son inspiration est une réjouissance de chaque instant, lente, savoureuse, palpitante et solaire. Pourquoi un tel spectacle ? Et bien pour rien. Stephen Spinella l’explique d’ailleurs à merveille dans une longue tirade d’ouverture hilarante pour les uns décontenançante pour les autres. Pourquoi ce film ? No reason. Et ça lui confère un charme fou.
Zeitkratzer - Whitehouse Electronics
Pourtant le pari risqué est plus que réussi. Zeitkratzer semble nous livrer sa propre version de la musique de Whitehouse, à travers une compréhension personnelle du langage de Bennett. Une apocalypse sonique, rappelant la force cosmique d'un Sun Ra et son Arkestra tout aussi bien que la dureté biblique d'un Ligeti délivrant l'apocalypse. Un chaos organisé, où l'agencement des pauses et des phrasés musicaux permet de créer une communication avec l'auditeur. Il semble ressortir un pouvoir des interprétations de la musique de Whitehouse par Zeitkratzer, qui sublime des compositions pas forcément des plus passionnantes sur disque (je préfère de loin la première partie de carrière et des disques frontaux comme psychopathia sexualis, même si la recherche tribale et primaire de Bennett sur la fin de sa carrière donne un saveur particulière à ces disques). L'itération des boucles alliée aux cuivres soutenus et à l'arythmie percussive semble former un tout cohérent et attrayant. Un projet intéressant et hors norme qui revisite le catalogue d'un musicien contemporain au centre d'un mouvement culturel. Les deux derniers morceaux sont de réelles incantations, une sorte de transe voodoo et tribale qui nous investit d'une force mystique peu courante. (Zeitkratzer)
dimanche 7 novembre 2010
Teho Teardo - Soundtrack Work 2004 - 2008
Cinq films sont ici compilés, cinéma italien moderne (je suppose) : La Raggaza del Lago, il Passato é una Terra Straniera, Il Divo, L'amico di Famiela, Lavorare con Lentezza. Les différents travaux peut être dissociés mais possèdent tout de même une grande cohérence dans cette façon d'agencer les instruments avec une douceur minimaliste et mélodiquement évidente. Cordes rencontrent sonorités électroniques avec un toucher fort nostalgique qui ne sombre jamais dans la mièvrerie. Les morceaux de Teho Tehardo sont courts et gardent toujours cette distance avec la présence sonore. Sa musique semble flotter et créer un nid d'images en apesanteur. Première remarque donc, cette cohérence de style et de sons qui enlève à la compilation ce qui aurait pu être son défaut principal : le manque de cohérence. Pourtant, il fait bon s'aventurer sur une partie plutôt qu'une autre, car certains climats évoluent différemment. Il passato a una terra straniera privilégie les arrangements de cordes touchées et apaisées en offrant les élans rythmiques à de doux arrangements électroniques tandis qu'il Divo semble créer un climat oriental et beaucoup plus ambiant aux sonorités plus modernes et plus graves. C'est d'ailleurs cette partie de la compilation qui a reçu les honneurs du monde de la musique de film avec quantités de prix dont je ne soupçonnais pas l'existence (Prix Ennio Morricone entre autres). Ennio Morricone qui congratule lui même le compositeur en vantant l'originalité de ses travaux. La grandiloquence de sa musique couplée au minimalisme de certaines de ses phrases n'est d'ailleurs pas sans rappeler les grands moments de Morricone (Pour une poignée de dollars). L'approche plus électronique de sa musique semble être une voie interessante vers laquelle s'engouffrer, qui pourrait déboucher sur des boucles mélancolique et éreintantes. Un joli résumé d'un travail musical visuel. Si les cinéphiles qui nous lisent passent par ici, les conseils sur les films ici présents sont bienvenus. (Expanding Records)
Ni - Ni
vendredi 5 novembre 2010
Teebs - Ardour
mardi 2 novembre 2010
Buried de Rodrigo Cortès
Avec Buried j’entame ce qu’on pourrait appeler un cycle, constitué de films que j’ai eu la chance de voir en avant-première pour la plupart à l’Etrange Festival qui s’est déroulé au début du mois de septembre dernier. Pour ceux qui ne connaissent pas mais qui sont adeptes de nanars, d’étrangetés, d’horreur, de jusqu’auboutisme ou juste d’expériences sensorielles et cinématographiques inédites, je ne peux que leur conseiller d’aller faire un tour sur le site de l’événement pour pleurer sur ce qu’ils ont raté.
Parenthèse faite, penchons nous sur ce « phénomène » venu d’Espagne. Chaque année ou presque, on nous annonce l’arrivée d’une nouvelle petite pépite tout droit débarquée de la très prolifique industrie du film de genre made in Spain. Le début des années 2000 a en effet marqué l’apparition sur nos écrans d’une nouvelle vague de réalisateurs comme Amenabar, Cerda ou Balaguero qui excellaient dans le genre épouvante/horreur. Depuis, les « phénomènes » se sont multipliés, faisant l’étalage d’un savoir faire de plus en plus admirable et d’une innovation des plus remarquables, transformant la créativité ibérique en un argument de marchandising plus que rentable.
Ces dernières années nous avons donc eu le droit à Lopez Gallego, Fresnadillo, Vigalondo ou encore Plaza. Le petit dernier s’appelle Cortès, comme le Conquistador (ok, on oublie la vanne). Il débarque avec un film qui a rodé un grand nombre de festivals à travers le monde, remportant un succès d’estime qui va lui permettre d’être distribué aux Etats-Unis par Lionsgate, ce qui n’est pas rien.
Le pitch minimaliste en déroutera plus d’un : un homme enterré dans un cercueil au beau milieu de l’Iraq avec pour seuls compagnons un téléphone portable, une lampe torche et un briquet, a une heure et demi environ pour que son gouvernement le retrouve… et le sauve ! La question que soulève dès-lors le présent synopsis est la suivante : mais qu’est-ce qu’il peut bien se passer durant ces putains de 90 minutes ?
Buried semble adopter la règle la plus usitée du théâtre classique, celle de l’unité. Unité de lieu tout d’abord ; comme vous l’aurez compris tout se passe dans ce cercueil et on n’en sort jamais si ce n’est par quelques travellings arrières écrasants qui plongent notre homme dans les entrailles du désert iraquien. Unité de temps ; une heure trente pas plus, c’est la durée du film mais aussi la durée de vie des ustensiles à disposition de Ryan Reynolds pour tenter de se sortir de là. Enfin unité d’action ; c’est le moment où les plus réfractaires, les sceptiques mais aussi les benêts (vous vous rangez où vous voulez) me disent « mais quelle action ? On est enfermé dans un cercueil pendant 1h30, à part se branler j’vois pas c’qu’il peut faire le mec ! ».
A ceux là je répondrai par un argument récemment entendu en cours de la bouche d’une enseignante en cinéma. Elle parlait en ces mots : « Certains disent que les films français sont trop bavards, qu’il n’y a pas d’action. C’est faux. Les dialogues c’est de l’action ». Et Buried en est un exemple parfait.
La mise sous tension joue sur deux tableaux : le premier, évident, est ce sentiment terrible de claustrophobie. Un espace confiné, succession de gros plans et de plans serrés : mis à part deux travellings, on échappe jamais à cette pression de l’espace qui, si petit soit-il, est de plus en plus hostile à la survie du seul protagoniste. C’est un choix ; d’autres auraient préférés montrer l’affairement autour de cet homme enterré mais cela n’aurait pas rendu grand-chose si ce n’est une gesticulation de masse. Ici un homme se débat à l’intérieur, seul. L’extérieur ne lui est presque pas accessible. Pire, quand il l’est, il est incompréhensible, irrationnel, loin d’être rassurant.
Le second c’est l’oppression de l’imaginaire ubiquité. Ce téléphone portable, ce fameux objet sur lequel tient en réalité, l’intégralité de l’intrigue. La véritable question sociétale du film serait alors celle-là : qu’elle société serait la notre sans portable ? Comment survivre, comment savoir, que savoir ? Cet objet à la déconcertante banalité se révèle être aussi bien un atout qu’une contrainte pour l’enterré. Qui appeler ? La police ? Elle ne comprend rien. La famille ? Pourquoi faire ? La CIA, le FBI, le Département d’Etat ?
Cette articulation autour de dialogues parfois improbables avec un extérieur à la désorganisation patente est l’une des plus grandes réussites du film. Buried tourne au pamphlet cinglant, dynamite l’incompétence des institutions américaines, balance sur la désinformation, le mensonge, sans jamais verser ni dans le pathos, ni dans le cynisme. Ca n’évite certes pas à ce huis-clos quelques écueils (le serpent…) là pour combler les très rares temps morts du film. Mais ça lui donne une dimension bien plus riche que celle d’un simple cercueil en bois…