lundi 30 août 2010

Boduf Songs - This Alone Above All Else In Spite Of Everything

Autant les précédentes livraisons de Boduf songsportaient bien le nom de leur géniteur, Mathew Sweets. Autant celle ci est un bonbon empoisonné. Si l'approche minimale et acoustique était en partie ratée par le passé, l'approche de ce nouvel effort se révèle être bien plus handicapante pour l'auditeur. Boduf Songs ne ressemble à rien et ne rattache son son à aucune paroi. La musique folk, voire pop se trouve amputée et brûlée, et son squelette s'en trouve remanié pour en faire des osselets. Dur constat que cette dé-construction minimaliste en règle des valeurs de la musique pop ou indie.
Il semble qu'aucune perte de cohérence ne semble titiller ce disque poignant, comme rarement des oeuvres atypiques peuvent l'être. Un ressenti poétique et contemplatif, un parti pris sonore radical et une inspiration musicale qui semble couler de source, voilà les différents ingrédients d'un disque bien personnel, cotoyant un ambiant squelettique, une pop langoureuse et anorexique, une esthétique distordue frontale anémique et une joie de vivre absente. Boduf Songs livre ce disque onirique conscient et bel et bien eveillé, de ce rêveur qui a encore les yeux ouverts, ou qui guide ses propres déambulations dans un labyrinthe de son propre tourment. On y retrouve ce que l'on préfère à la fois chez Steve Von till et Scott kelly en solo (pourtant si différents), mais aussi ce coté fantomatique de Marlone de Kill the Petty Bourgeoise et cette consistance qui parsème le song writing de Fennesz pour le côté cathédrale qui se construit au fil des morceaux. A l'arrivée, un trou noir béant et une épopée moderne sous Xanax, au désespoir criant et pourtant si addictif. Si Pornography avait été écrit en 2010, il aurait ressemblé à cette dose de came. (Kranky Records)

Andreya Triana - Lost Where I Belong

C'est peu dire que cet album était attendu par ici. Les deux EP étaient plus qu'alléchants, avec des morceaux fantastiques et personnels entourés de remix ou de collaborations toutes plus atypiques, avec notamment Flying Lotus sur l'un d'entre eux. La demoiselle quant à elle s'est faite remarquer sur le dernier album de Bonobo, qui décide d'ailleurs de prendre en charge la production complète de cet album.
Un album court et efficace, d'une quarantaine de minutes en tout autant de tubes, qui nous balade dans les fascinations musicales de la demoiselle, tour à tour soul et envolées, puis feutrées et oniriques. Un pot pourri des errances d'une artiste qui n'en fait qu'à sa tête et se paye le luxe de livrer autant de singles que de morceaux. Une cohérence assez entêtante dans la production qui sonne acoustique et chaude, avec une basse ronde qui entoure de sa superbe des arrangements discrets en tous genres et offre l'écrin parfait à cette voix magnifique, d'une rare perfection, touchante et sexuelle véritable véhicule d'émotions de cet album en tous points réussi. Court, impeccable, accessible, tubesque, artistiquement réussi et puant le talent, c'est un peu l'impression que nous laisse ce premier album d'une artiste prenant le flambeau Ninja Tune avec panache en 2010, ouvrant une nouvelle ère à l'heure où on faisait un bilan. On pourrait continuer l'éloge sans fin, ou résumer ce disque à l'un des grands disques pop au sens large du moment. (Myspace)

mercredi 25 août 2010

Ninja Tune XX - 20 years of beats n'pieces'

L'heure est aux bilans, comme le faisait Warp il y a quelques temps. Ninja tune, un label crée par les deux Anglais de Coldcut fête aujourd'hui ses 20 ans. Aujourd'hui protéiforme et pouvant se targuer d'être une plateforme entre musiques dansantes en tous genres, de la musique électronique au hip hop en passant par quantités de styles in ou moins (jazz and co). Le label explore certaines branches à travers ses labels affiliés, Big Dada en tête spécialisé hip hop. Conclure vingt années d'aventure musicale avant gardiste n'est pas chose facile, et preuve en est, même un label fascinant au catalogue qui fait rêver (de moins en moins on est d'accord) s'est cassé les dents sur l'épreuve des sorties anniversaire. On pourra cependant les remercier d'avoir vendu à petits prix deux disques dans un soi disant coffret fêtant l'évènement, objets existant à ma connaissance pour Boards of Canada et Aphex twin. Ninja Tune lui décide de ne pas s'attarder sur la nostalgie et prèfére regarder l'avenir. C'est pour cela qu'ils livrent un coffret abondant, en objet limité et alléchant pour les collectionneurs, truffé de sons, de raretés et d'objets en tous genres. Rassurez vous l'objet n'est pas encore sorti, ce sera le cas fin septembre. Son contenu consiste apparemment en trois boitiers, le premier renfermant six disques de titres inédits, dont deux uniquement pour le boitier (non présents dans l'objet en ma possession), le deuxième boitier consistant en des 45 tours de remixes et des objets de toute sortes, stickers et posters et enfin une dernière partie consistant en un ouvrage sur le label.
Beaucoup de goodies donc pour rendre l'objet limité et collector, mais au delà de ces détails, la musique est en elle entièrement inédite (ou presque) et le gros plus de la vision de Ninja tune est d'avoir fait collaborer ses artistes pour l'évènement pour leur faire livrer des morceaux tous frais. On remarquera même certains artistes se prêtant au jeu pour des remixes, Autechre en tête qui reprend un morceau de The Bug (Skeng) ou Grasscut qui reprend du Jagga Jazzist.
Il serait superflu de s'attarder sur TOUS les morceaux de cette compilation fleuve ici déclinée en quatre disques tous plus remplis les uns que les autres mais qui dégagent une sorte d'unité artistique. Ninja tune s'est toujours voulu avant gardiste, ou du moins à la pointe des tendances, parfois avec réussite (Jagga Jazzist), parfois avec plus d'esbroufe (Amon Tobin) et parfois avec des sorties insipides. L'enjeu est pourtant tout autre.
A travers cette compilation nous voyons à quel point le label poursuit une unité qu'elle soit graphique et artistique, même en ayant divisé à l'extrème ses tâches et ses succursales. Faire se rencontrer Lou Rhodes et le cinematic orchestra, ou encore flying lotus et la fantastique voix d'Andreya Triana, enchainer roots manuva et sa musique hybride avec des noms moins connus tels que Offshore et son morceau tout en envolée électrolyrique, voila le pari que remporte cette compilation. Aucune limite ne semble fixée et les artistes collaborent tous sans barrière de langage, s'exprimant avec leurs propres armes, souvent des machines pour décoller les pieds de leurs créations initiales. A l'image de la structure, tout n'est pas réussite, et parfois l'autotune tache un peu, ou encore le hip hop intello embête (Daedelus n'est pas que moment de grâce). Pourtant au final, quelque chose de foncièrement futuriste et accessible à la fois se dégage de ces disques, qui semblent être un recueil plein d'âme ou encore une image de la vision artistique d'une structure qui a su grossir petit à petit tout en gardant une cohérence surprenante. Un label qui a su donner sa chance à certains, qui a su débrider ses influences et éclater ses barrière initiales, un label qui a su prendre certains risques au nom d'une magie artistique, voilà ce que fêtent ces disques, pour une existence qui commence à être significative dans le monde des musiques modernes. Quand on voit qu'à l'heure actuelle certaines sorties ne pêchent pas un brin par leur qualité (K the I? chez big dada monumental, andreya triana et sa soul gigantesque, Emika et sa voix feutrée, Poirier et son dance hall allumé), et que pour ses vingt ans la structure prèfére se tourner vers le futur plutot que de regarder ses grandes heures avec nostalgie, on les remercie (Jagga Jazzist, Roots manuva, cLOUDEAD, the herbalisers, Kid Koala, amon tobin), et on se prend au jeu de leur anniversaire.
Pour l'objet complet, les deux disques qui manquent ont l'air tout aussi remplis, avec un remix de Eric B & Rakim par Coldcut, roots manuva qui reprend les herbalisers, the bug par prefuse 73 et d'autres joyeusetés.
Pour les parisiens et les bordelais, vous aurez aussi la possibilité d'aller souffler les bougies sur scène pour une série d'évènements live.

mardi 24 août 2010

COIL vs ELPH-Worship the glitch


Le flottement Coil-esque à son summum. Coil se transforme en abstraction sonore jusqu'au bout en ne devenant plus qu'une idée, qui s'affronte elle-même. Elph n'est autre que le groupe qui, dans sa recherche sonore, se mute en cette nouvelle identité et qui produit de la musique uniquement basée sur les bruits et sons involontaires, accidentelles de la machine. Contre soi. La complainte du sampler, le chant de l'oscillateur, la débâcle de l'homme derrière sa table de mixage. Ce split en trompe l'oreille ressemble, d'une écoute distraite, à une collection de bruit, genre de disque qui peut s'avérer insupportable. Mais de fait, la sensibilité du duo et son acharnement à esthétiser même la pire laideur confère au disque l'incroyable et lumineuse force d'extraire de ces sons une musicalité inattendue. Originalement conçu en double 10", l'album recèle de ces moments étranges et charmeurs dont la musique électronique a le secret. Et ce n'est pas l'absence de partitions et de voix qui empiète le constat. Le concept devrait donner ce drone absolu et idéal, de par l'interaction humaine limitée. Mais jamais le bourdonnement ne prend place, à la place, s'articulent d'étranges nappes lointaines et résonnantes, suintements digitaux, échantillons ondoyants et hocquets analogiques. L'expérience totale d'un groupe qui n'a cessé de repousser ses limites en signant la lettre d'amour définitive au "glitch", de la musique jusqu'au nom. On imagine sans difficulté la force d'une rencontre avec Autechre, se consolant avec Hafler Trio. Un album précieux et rare, la pépite de l'admirateur du duo, souvent évaluée comme le joyau mésestimé.

mercredi 18 août 2010

WALTER GROSS-L.A. Pink Filth


Dans un monde parfait, cet album de Walter Gross serait disque d'or dans nos contrées. Oui, car dans ce monde parfait, les gens auraient naturellement le goût d'une musique audacieuse et aventureuse. Dans un monde parfait, Techno Animal seraient nos Beatles, Coil nos Rolling Stones, Fever nos Faust, Kouhei Matsunaga notre Bob Dylan, Alec Empire notre Robbie Williams, et 2nd Gen notre Michael Jackson. Les gens aimeraient profondément ce hip hop désincarné, ou plutôt ultra-incarné, celui qui place la matière sonore au coeur de la création via l'usage intensif du sample. Whitehouse et Merzbow seraient RATM et Nirvana, on samplerait leurs disques. Dans ce monde parfait, les gens qui admirent Lady gaga seraient des bêtes de foire, car pour admirer un produit aussi plastique, il faut forcément avoir un problème. Ils iraient chez des petits vendeurs de disques indépendants se faire conseiller d'obscures sorties (Uffie, David Guetta, Keane, Muse...) et iraient à des festivales de musique l'été dans une grange avec 50 autres fans de leur bizarreries. Les gens iraient à la presse et liraient Gloups et Voici à propos des dernières vacances à la plage de Nic Endo, avec Genesis P-Orridge en bikini à Tchernobyl, Kickback en tournée mondiale, reportage exclusif dans les coulisses. Brian Eno tiendrait une chronique mode au journal télé, alors que nous n'irions plus acheté notre vin chez Nicolas mais chez Maynard. Dans ce monde parfait, ce disque de Walter Gross serait juste à coté des bonbons à la caisse de vos supermarchés, et chroniqué dans le Télé 7 Poche comme le disque de l'année. Le Widow Mega Store l'auraient en permanence en prix turquoise parce qu'en vrai, tout le monde le commande pour son magasin de disque mais personne ne l'achète. Comme les L5. Il serait premier des ventes et personne dans votre entourage ne l'aurait, parce que tout le monde s'en foutrait. Dans ce monde parfait, seul les moins de 10 ans tanneraient leur parents pour l'acheter, et seul les membres les plus pourris de votre famille se le procureraient pour le refourguer à votre petite soeur à noël. Dans un monde parfait, ce disque ne serait pas un vulgaire CDr rose mal peint et disponible a quelques dizaines de copies (150), non. Il serait partout et tout le temps. Et dans ce monde parfait, les petites filles aussi voudraient ressembler à "la belle dame sur la pochette". Dans ce monde parfait, vos enfants ressembleraient à des travelos qui écoutent du bruit.

mardi 17 août 2010

Coil - ...and the ambulance died in his arms

Nous sommes le 4 avril 2003, lors du festival All tomorrow's parties. Coil est dissout en son sein, et si le groupe existe encore en tant qu'entité artistique, le couple est quant à lui mort, christopherson ne supportant plus de voir la destruction de son partenaire John Balance, alcoolique touchant le fond. C'est aussi un enregistrement glaçant à posteriori, vu que John Balance s'écroulera finalement pour mourir peu de temps après ce concert.
C'est aussi le seul enregistrement live avec une qualité sonore aussi intéressante que la série des quatre live (volume 2 chroniqué dans ces pages) voire supérieure qui présente une esthétique très éloignée de cette fameuse série. La musique de Coil est içi lunaire, contemplative, poétique et atteint des sommets de grâce que seuls ces deux architectes semblaient pouvoir atteindre en studio, là où les divers live étaient de vrais sessions de musique cathartique improvisée et déstructurée. Cinq titres pour plus d'une heure de musique, avec une ambiance bucolique qui semblait bon enfant, pour un groupe qui semble dominer son propos. Coil étale sa musique en prenant son temps, en choisissant d'allonger des morceaux studios tout en conservant leur identité onirique et en leur insufflant un immense souffle mystique et religieux. John incarne un maitre de cérémonie guidant la transe là où il le souhaite en récitant des mantras où en se baladant dans divers contrées ésotériques et habiles. Un shaman tout en dérision qui fait preuve ici de tout son talent et surtout d'une grande maitrise des ambiances que déroule derrière christopherson, en bon architecte qu'il est. L'étrange snowfall into military temple, proposant une sorte de délire cosmique directement inspiré de leur EP how to destroy angels, avec cliquettement en tous genres et combat contre le temps.
Coil généreux réinterprète et mélange, pour nous offrir une mixture qui traverse leur carrière, comme une sorte de pont intelligible entre leurs passages musicaux les plus arides où les plus contemplatifs vers leur dernière escale, la moon musick. C'est ainsi que peu à peu cette cérémonie aboutit sur cette interprétation phénoménale de the dreamer is still asleep, morceau clôturant le music to play in the dark volume 1, prenant l'aspect içi d'un ragga où john balance récite et répète pour nous faire atteindre les cieux souhaités. Cet enregistrement live est surement leur sortie officielle la plus valable et se pose en contrepied net de leur quadrilogie, chose que finalement coil a fait tout au long de sa carrière. La mixture sonore existe sans fin, peut être malaxée et façonnée pour mieux la recréer selon les besoins. Les frontières des possibles sont ouvertes et cet enregistrement est en une preuve tangible.

lundi 16 août 2010

TRICKY dans la rue.


Tricky dans la rue. Suis-je le seul à trouver ça ironique que la fnac joue le grand défenseur de la musique à seulement quelques centaines de mètres de leur seul magasin de disque, la fnac musique, qui a fermé ses portes le lendemain de noël l'an dernier? C'est pas le mec qui fait office de G.O. ce soir qui va m'enlever cette idée de la tête. Tricky en revanche, va peut-être me faire oublier cette boutade. Après m'être sauvagement restauré chez un Coréen tout à fait recommandable, histoire de ne pas avoir à entendre la moindre note d'Uffie (comprenez moi, un truc sur Ed Banger, je peux faire un effort, mais sur scène je vois des guitare-synthé et des mecs à méche/slim/fluo s'agiter...) je prend place et j'ai même pas le temps de me poser la question de savoir si j'étais bien placé que c'était déja commencé. Timing au poil pour la messe indus-blues du kid, qui s'éloigne nettement de ces disques, qui s'éloignent de plus en plus d'eux-même d'ailleurs (on y reviendra lors de la chronique du suivant, fin septembre). Le kid fait ouvrir sa troupe sur sa reprise ralenti de sweet dreams (don't wanna), magistrale instrumentale qui ferait presque croire que c'est le seul morceau à sauver de blowback. Charcutage de la discogarphie avec la reprise de Public Enemy qui ne démarre pas vraiment, la fausse reprise de Massive, et puis gros bordel tout le monde sur scène pendant que les éxécutants s'appliquent à mettre sur pied une reprise correct de Mötorhead (ace of spade). 50 minutes, c'est court, mais avec le public parisien un peu pénible qui s'ameute lors de ce genre de manifestations (cf. les gamines certifiées Givenchy 75016 qui font des "yo" avec les mains et qui se répondent en se disant "sisi!") c'est largement suffisant. Panpan-cucul.

ps: Comment-ça je n'ai parlé que de reprises???

vendredi 13 août 2010

NIVEAU ZERO- In-sect


Fut une époque où je guettais la moindre nouveauté de chez Ad Noiseam, qui cumulait il y'a quelques années de remarquables sorties. Horchata, Larvae, Mothboy, et même Dälek qui avait gravé une poignée de morceaux magistraux sur le vinyle "streets all amped". Jusqu'à la sortie de l'anthologie double DVD/CD qui présentait le bilan des premières années, Ad Noiseam était un label qui proposait des choses pertinente, creusant la vague d'une musique électronique d'inspiration sauvagement indépendante, avec un oeil tourné en permanence vers les scènes industrielles. Pourtant, avec le temps, la saveur des sorties m'a paru moins pertinente. J'avais nettement moins aimé le second album de Mothboy, pour simple exemple. Bref, l'excitation pour les sorties du label s'est amoindri. Aussi, Niveau zero n'avait pas de grandes chances de m'enchanter. Une sortie Dubstep de plus, et surtout, j'avais déja vu le bougre derrière ce projet en concert, avec Master Harris si je ne m'abuse, et je n'avais pas accroché plus que ça. Pourtant, ce nouvel album est très sympathique. exécuté avec respects des codes en vigueur du genre, la musique de Niveau Zero est particulièrement appliqué. Manque un peu de folie, un peu de surprise, un peu de caractère. Mais le bilan n'est pas négatif pour autant. Niveau Zero rentre dans la catégorie des groupes teigneux et limpide, pas loin des orchetsrateurs anglais comme Benga et ses frêres, pas du tout dans la même veine qu'un moulu Hyperdub. Mais avec méthode et rigueur (du wooble saturé qui va bien au MC réglementaire entre Chuck D et Flow Dan), on se laisse prendre à l'album tapageur. Et la foi dans ce label minutieux se ravive.

jeudi 12 août 2010

GLASSJAW, Nouveau Casino


Qu'est ce que je fous là? Je suis entouré de jeunes jouvencelles dont les yeux pétillent devant le squelettique bonhomme qui s'égosille sur la scène. Je reprends depuis le début. Glassjaw, groupe taré de New York sortait en 2000 et 2002 deux albums hors de toutes catégories (à l'époque), revendiquant l'héritage de Quicksand, mais aussi l'influence des Bad Brains, de BURN, d' Anthrax, de Morbid Angel, d'Elvis Costello, des Cure, de Faith No More, de My Bloody Valentine, de la new wave, du hip hop. Mais avec une "crédibilité" hardcore quasi intouchable, de par le passé de certains actifs (le batteur est un ancien CIV, Youth Of Today, et à l'époque future Rival School, le guitariste un ancien membre de Sons of abraham, qui avait sorti un split avec les icônes du new school d'alors: Indecision, etc...). Derrière les manettes, Robinson, créateur du son de la scène metal californienne du début de la décénnie précédente et qui essayait de s'excuser en enquillant coup sur coup Amen, At The Drive In et Glassjaw, aux antipodes de Life is peachy et de 3$ Bill y'all- l'histoire est ainsi faite: Robinson a reproduit Limp Bizkit et Korn. Histoire chaotique, fait d'embrouilles avec Roadrunner et réglé en interview, line up instable dont les deux seuls propriétaire du nom Glassjaw demeurent Daryl Palumbo, chanteur, et Justin Beck, batteur devenu bassiste puis guitariste. Les autres sont partis, se sont fait jeter (par la maison de disque!) ou sont revenus, c'est le cas de Manuel Carrero pour ces deux derniers points. J'ai fini? Non, car Glassjaw donna un concert à Paris suite à son deuxième album (le premier a été entouré d'une tournée avec Soulfly et un show case en Hard rock café), sur invitation si ma mémoire ne me joue pas de tours, puis annula le reste de sa tournée. Puis 2 tentatives plus tard, annulées également pour une raison simple: Palumbo souffre du syndrome de crohn, qui peut se manifester par une crise à n'importe quel moment. 10 ans donc que j'attends de voir Glassjaw. Une date à Paris en 2010? Ca m'en touche une sans réveiller l'autre, mais la fidélité et la curiosité m'ont encourager à cliquer sur "finaliser votre achat" sur un site de billet en ligne. Bien m'en a pris. Si j'ai passé une bonne parti du concert à m'amuser des adorateurs de Palumbo autour de moi (les filles hochent la tête et prennent 451 photos de lui, font des sourires et ont des étincelles dans les yeux quand il chante, pendant que les metalleux, ayant enfilés leur tenues de TRVE Eyehategod/Converge/Slayer/Starkweather, semblent eux aussi boulversés par les couplets emo rock du chanteur de Head automatica), il est surtout impossible de ne pas admirer la qualité du jeu du groupe. Le batteur, débarqué de Saves the day joue impeccablement les parties qu'il n'a pourtant pas composé (Samy Siegler est responsable des batteries sur le premier, alors qu'il semble que ce soit Shanon Larkin, impliqué dans Snot, mais aussi dans Amen ou Ugly Kid Joe qui s'occupa des rythmiques du second album). Le début de Mu Empire est impeccablement balancé, quoique légèrement ralenti. Daryl Palumbo confirme tout ce que l'on peut retirer à l'écoute d'un album du groupe. Hystérie et hurlement se mèlent à une maitrise de la voix qui n'est pas sans rappeler les contrastes esquissés par Moreno dans Deftones. Elastique, ses cordes vocales sont capables de brasser un vaste champs d'action, comme une sorte de Mike Patton moins gourmand mais plus instable. Carrero est un bassiste incroyable. Assez menu, il s'arme d'une basse gigantesque et en joue avec une maitrise du groove et une aisance remarquable. Quand il entame ses rares notes sur le break de Ape Dos Mil, il plonge la salle dans un simili dub troublant et parfaitement rythmé. Beck est de son coté le grand artisan de Glassjaw, chef d'orchestre discret et presque à l'écart, mais qui joue...comme un pur New Yorkais. Rythmé, précis, versatile, passant du taping au bruit pur, du jeux d'effets en passant par le riff type HxC, son jeu est remarquable. Se dégage de l'ensemble un sentiment étrange, d'un groupe qui semble parfaitement à l'aise, incroyablement puissant et précis dans son propre jeu, comme si "Worship & tribute" était sorti deux mois plus tôt, et se retrouvant face à un public qui vit cette musique comme n'étant plus si singulière car prostituée par des groupes grimés défilant sur MTV. Glassjaw joue comme si les 8 dernières années ne s'étaient pas écoulées. Ils pourraient remplir un stade, ils blindent juste le nouveau casino. Mais les fidèles leurs sont dévoués.

mercredi 11 août 2010

M.I.A. -/\/\/\Y/\


MIA est devenue l'icône en puissance de la hype casse couille, la fille qui amuse de loin et qui fatigue de près. Je me rappel de l'engouement à la sortie de son premier album pour cette étrangeté sonore entre mauvais gouts absolu (du visuel aux fringues -le leg in fluo en 2005 c'est proscrit, en 2010 c'est impeccable) et cheap revendiqué dans la façon de faire son album. les médias s'en était totalement accomodé, trouvant excuse dans l'origine de la damoiselle, genre la guerre, toussa toussa. Trop bien. Pourtant, l'album Arular, était impeccable, accrocheur sans être pute, audacieux, sauvage et malin. Elle récidiva rapidement pour son second LP, "kala", qui s'orentait vers la techno hindou en perruque bleue, plus propre, plus brillant, plus casse couille, et plus carton dans les charts. Depuis, Santogold est passée par là et l'égérie shake ton booty s'est effacée, la presse s'est lassé des Tees waikiki et des visuels qui font mal aux yeux. Aussi, Mia a discrètement préparé son retour, enlevé sa perruque et orienta son 3ème tir sous le signe de la guerre. Et elle sera totale. Qui dit hype dit thune, et le mode de vie de la sri-lankaise s'ets considérablement amélioré. Une journaliste du NY Time s'est questionnée sur cette dychotomie. Résultat! Mia publie sur son twitter le numéro de portable perso de la journaliste. Teigneuse. La pochette fait mal au crane, et le nom de l'album a spécialement été conçu pour irriter ceux qui se risqueraient à le copier. Le clip bande annonce étire un sample de Suicide mis en boucle sur 8 minute sur fond de chasse aux roux. Sur la TV américaine, Mia se pointe entouré de sosies et invite Martin Rev himself a rejouer sa musique.
A quelques exceptions près, ce nouvel album est particulièrement méchant, au propre comme au figuré. Outre Born Free qui ressemble à un cauchemar audio ici largement épluché et rabougri, les morceaux de l'album ont une puissance de compression du cerveau rarement entendu dans la musique grand public ces dernières années. Mia ouvre son album sur un beat énorme, fréquence canibalisant les autres, le ton est donné. Si rapidement Miss Arulpragasam pose aussi la démonstration de son admiration pour Madonna-comme une réponse a l'encombrante idiote femme d'affaire gaga- l'ensemble reste quand même sévèrement sauvage et sauvagement sévère. Mathangi sait désormais parfaitement faire sa propre musique, s'affranchissant des codes et limites d'un style, son oeuvre est trans-genre, et ne s'enferme dans aucune mode pointable du doigt. Dance hall des enfers, dub mesquin, punk à paillette, pop cancérigène, toutes les écoles s'accouplent salement et posent une quinzaine de rejetons tous plus turbulents les uns que les autres. Etonnament, la critique juge cet album mal produit. A l'écoute du son massivement orchestré par le commandant en chef, je dirais que le manque de variation joue surtout sur la capacité de concentration de l'auditeur. Mais suffit de resortir une obscur production sludge ou un album de noise pur pour voir le fossé qui existe en terme de production. Brutal et dense (à excès?), cette folie de la boule à facette sous mescaline est essencielle.

SPECTRE-Death before dying


je ne pensais pas qu'un nouveau Spectre verrait le jour aussi vite, surtout au vu de la qualité de celui-ci. Après une période silencieuse -que personnellement je n'avais pas perçu- où le Ill Saint a mis son label en hiatus, laissant inquiets les plus fervent fanatiques de la basse et du rythme Skiz Fernando actualisa son réseau d'enfûmés enchainant tournées et albums (Sensational, Mentol nomad, Kouhei...). Internal Dynasty, album sorti fin 2008, en co-prod avec Tool Box et exclusivement en vinyle faisait montre d'un Fernando en forme, mais comblant le vide de ses morceaux parfois en roue libre par l'omniprésence d'une poignée de MC de tous horizons. Death Before Dying fait presque figure de déclaration officiel de bonne santé et de retour dans la direction classique de Spectre, celle d'un hip hop/dub riche en sample et en basses visqueuses. Skiz a revu son studio pour, il semble, se concentrer massivement sur la possibilité de l'ordinateur au coeur de la création. Pour autant, les effluves lourdes restent singulièrement habitées du grain épais, la patte Wordsound. De façon assez remarquable, le vocabulaire de Spectre s'élargit d'avantage sur cet album. Si rythmiques lourdes restent une force constante, les essais variés se multiplient. Entre beat qui s'emballent, s'enrichissent, on trouve aussi au milieu de l'album l'improbable morceau que RZA aurait pu pondre dans un excès de soul brumeuse au casque. En fin d'album même, deux morceaux (dont un deterré d'une sortie antérieur) chantés exclusivement par une voix féminine. Ajouté à cette élargissement remarquable du champs d'opération, il est à souligner l'excellente tenue générale des compositions. La musique de Spectre a régulièrement souffert d'une baisse de tension, de passage à vide, de moments flottants. Skiz a ici embarqué sa production dans une concision éclatante qui se confond dans une construction remarquable de sa musique. L'album ne semble jamais s'allonger, ne parait jamais long. Tout s'enchaine avec un dynamisme remarquable, facilitant la déambulation de l'auditeur dans ce magma sonique, dans cette dense ossature étouffante. Un album suintant la maitrise, une réussite déléctable. Vite! Un passage en France dans une salle qui saura restituer au mieux l'épaisseur du son du Ill Saint.

Roots Manuva meets Wrong Tom - Duppy Writer

J'avais découvert Roots Manuva sur une compil de dub, une bande son d'un film retraçant l'histoire du dub. Trés bonne compil et un excellent morceau de Roots Manuva entre velléités new school, notamment dans une approche trés hip hop mais aussi une approche old school du traitement instrumental.
Aujourd'hui Roots Manuva s'entoure d'un producteur pour tout l'album (et c'est d'ailleurs respectueux de sa part de le créditer sur l'intitulé du disque). Wrong Tom se charge donc d'insuffler un réel souffle dub à de vieux (et moins vieux) morceaux de Roots Manuva, et ce nouvel album consiste en fait en des réinterprétations version dub, version enfumées de morceaux issues d'anciens disques de Manuva.
Ce qui frappe clairement c'est cet aspect hétéroclite des productions, pourtant toutes signées par le même gaziers. Il nous donne la sensation d'explorer une discographie et d'en ressortir avec sa propre vision de l'art du bonhomme. Toutes les influences principales sont passées à tabac et on appréciera d'autant plus les morceaux les plus roots du disque, avec par exemple le craquelant et trés enfumé world a mine. Wrong Tom entoure le flow du londonien d'aparats de toutes sortes, des sonorités reggea aux instrumentaux plus digitaux et dansants.
Il en ressort une sensation d'être porté par une compilations, impression alimentée par les quelques invités qui parsèment le disque. Et mon collègue a raison. En dub, les meilleures sorties restent les compilations, qui évitent de lasser. Du coup cette collaboration pue l'alchimie et nous contente du début à la fin, avec quelques moments de gloire (proper tings est un tube comme il s'en fait rarement, en mode repeat), un aspect festif pas désagréable et quelques productions aux basses lourdes et éreintantes. Le flow du londonien est excellent, et navigue lui aussi dans quantités de genres différents. La pochette rajoute elle aussi à la réussite de l'objet, en rappelant un peu le premier Major Lazer dans son coté décalé et coloré. Je savais que le wu tang devrait se reconvertir dans les productions dub. (Big Dada)

mardi 10 août 2010

THE PRODIGY @ MILTON KEYNES: BOUILLON DE CULTURE ET CLAQUE DANS TA FACE


Big Ad est un mec bien. Il écrit des trucs sur des artistes étranges, de temps en temps, sur des sites en tout genre, comme dans sa maison ( 22H22) ou en mercenaire du verbe pour d'autre (chez Streetblogger, avec qui on fait doublon pour le coup mais c'est pas grave). En plus de partager parfois des verres d'absinthe autour d'un bon cubain, on se retrouve parfois au milieu d'une fosse de concert. Comme au zénith en Avril dernier ou je l'ai rapidement perdu, mode taupe enclenché pour ma part. Aussi, il avait prévu le coup (alors que je me suis décidé trop tard), il a tout mis en oeuvre pour assister à ZE événement pour tout admirateur du groupe à la fourmi. J'avais fait les 15 du groupe à Brixton (mad max dans tes oreilles) et le grand retour du groupe à Paris (vous saviez que Mr H s'appel Liam Paris Howlett, vous??). Bref, je ne peux pas tousles faire. Mais Big Ad, lui, a pu. Comme le disait Master H lui même dans le livret du second album de son groupe "respect due"! Tapis rouge, allez chercher les cacahuètes, l'ami Big Ad n'a pas fait dans le concis. Special featuring du mois d'août.

"3h de voiture jusqu’à Dunkerque, un auto-stoppeur négociant en voiture de luxe qui écrit des lettres à la Française des Jeux quand les cagnottes du Loto sont différentes de celles annoncées, 2h de ferry, re-3h de voiture dans le mauvais sens pour atteindre Milton Keynes et 15 ronds-points plus tard pour contourner toute la ville et nous voilà arrivé au National Bowl où Prodigy devait donner son plus gros concert jamais donné en Angleterre. Pour faire passer le prix de la place à 65 €, la production du concert avait décidé de le changer en festival. Invités de Prodigy sur la scène principale, que des groupes qui ont grandit en les écoutant mais qui n’arriveront jamais à leur cheville. Dans l’ordre Does It Often You, Chase & Status, Enter Shikari et Pendulum.

Mais avant il faut finir le chemin de croix, donc mon compagnon d’aventure et moi-même arpentons les sentiers du parc dans lequel se trouve le National Bowl pendant encore un quart d’heure. Passé la vérification des tickets on entre dans l’arène en passant par une entrée symbolisée par une toile noire avec une fourmi orange sous laquelle des brumisateurs nous purifient une dernière fois avant d’entrer en guerre. « Purifier » voilà un mot qui n’avait pas sa place pour les 65 000 english imbibés qui prenaient place dans cet amphithéâtre en plein air qu’est le National Bowl. Lorsqu’on entre sur le gazon déjà jonché de bouteilles de bière en plastique vides à 17h à peine, on aperçoit à l’horizon une marée humaine massée sur les pentes qui enserrent la scène principale. On se croirait dans les scènes de batailles de Braveheart ou Gladiator. Sincèrement ça fout le frisson. On se pose donc tranquillement pour voir Enter Shikari monter sur scène. Et quinze minutes plus tard on repart parce qu’on trouve ça tout pourri. Alors dans notre errance entre les carcasses de bouteilles, les mecs avec les cheveux fraichement teint en vert ou rouge fluo, les gens venus en famille avec leur gosse de 10 ans, on trouve derrière les pentes du National Bowl, une deuxième scène.

Environ deux cent badauds sont aspirés par le dj sur scène. Il faut dire qu’il ne ressemble pas au commun des dj’s qu’on a l’habitude de voir. Lui c’est genre une calvitie, des petites lunettes, t-shirt qui enrobe sa bedaine rentré dans le jean et surtout aucun MacBook, ni de Serato à l’horizon. Alors ce gars qui pourrait être ton père ou le mien, se met derrière ses platines, sort un vinyl (oui un vinyl !) et nous fait la leçon à tous en nous présentant les premiers morceaux Dub de King Jammy datant des années 70. Le tout mélangé à du Dubstep que lui à fait découvrir son fils. Et entre chaque morceau le papy passe devant sa table pour danser, enfin se déhancher, enfin s’échauffer les articulations tout en animant le morceau. Il continue sur des classiques de Jungle de General Levy qui ravissent la foule qui semble très bien connaître les morceaux. Au bout de quelques minutes je capte que le nom de ce dj est David Rodigan, nom que j’ai déjà vu passer sur certains morceaux. En rentrant chez moi je découvrirais que le jeune homme à 59 ans bien tassés et qu’il est une légende parmi les disc-jokeys d’outre-Manche.

Après une discussion foot avec un jeune hooligan repenti qui gueule comme un porc sur « One Love » d’un certain Bob Marley, on retourne sur la scène principale pour voir le prochain groupe (et dernier avant Prodigy) qui n’est nul autre que Pendulum. Si vous ne connaissez pas ce groupe, sachez qu’il a fait ses armes dans les tréfonds de l’underground de la Drum’N’Bass avant de gagner en notoriété notamment en remixant les têtes d’affiche de la journée. Le tout dernier album de ces Australiens, intitulé « Immersion », s’est classé directement premier dans les charts anglais. Par contre c’est une sombre daube qui fait illusion le temps des trois premières pistes. Même adoubé par la présence de Liam Howlett sur l’album, on ne peut prendre ce groupe comme les successeurs de Prodigy. Ce n’est pas ce que les réactions de la foule laisse penser en tout cas. Des dizaines de milliers de personnes bougent et reprennent les paroles du groupe pendant ce live qui oscille grossièrement entre D&B et Metal de supermarché. On passe donc notre temps comme on peu, placés contre les barrières à l’extrême-gauche de la scène. D’ici on peut observer que la partie réservée au public juste devant la scène est strictement VIP. Surprenant. Bref de notre poste, on est aux premières loges pour voir tous les petits jeunes à mèches et gros bidons bourrés et recouverts de poussière se faire sortir par les ogres aux points d’acier de la sécurité lorsqu’ils sont un peu trop virulents. Seule distraction de ce concert qui nous ne parle pas.

Par contre les milliers d’Anglais présents eux sont au taquet. La plupart reprend les paroles en chœur, j’ai presque peur de ne pas avoir le courage de tenir jusqu’au bout. Il faut avouer quelque chose, les Anglais écoutent vraiment de la daube assez souvent. Leur Pop est surement la plus meurtrière qui existe en ce bas monde. C’est aussi surement cela qui fait la force de leurs courants musicaux underground qui se dressent en réaction à cette daube calibrée pour la BBC et autre E4. En attendant, pas possible d’aller passer le temps vers la deuxième scène, un groupe de Metal y joue et comme vous devinerez ce n’est pas non plus la came de mon compère et moi-même. Quand c’est comme ça on se bouche les oreilles et on attend que ça passe.

Le supplice est fini. Zane Lowe, DJ star de BBC Radio 1 prend les platines pour nous faire patienter. Là encore on pourra encore s’étonner de la versatilité de l’audience anglaise qui réagit comme un seul homme aussi bien sur de l’Electro incertaine comme Benny Benassi ou Enur mais aussi du TC remixé façon médecine de brousse par Caspa, où le très lourd « Mad » des Magnetic Man. Après la fin de son set, tout le monde est sur le pied de guerre à attendre le vrai début des hostilités. Les jeunes raveurs à côté de moi se font des rails de coke sur des flyers froissés, un peu plus bas j’aperçois une version baraquée de Edgar Davids (l’ex-joueur de foot hollandais connu pour ses lunettes) avec sa femme et son fils d’à peine 14 ans que j’avais déjà croisé dans l’après-midi en train de travailler à ramasser tous les goblets de bière vides qui pullulaient sur l’herbe du National Bowl. Des jeunes à mèche, des balourds éméchés, c’est en gros le panorama assez hétérogène qu’on peut faire de la population qui ronronne d’impatience en attendant Prodigy. Impossible pour mon compadre et moi-même de descendre dans la fosse. En bas c’est déjà le bordel, les bouteilles de bières en plastique vol à une fréquence tellement rapide qu’on a l’impression qu’elles sont soulevées par des jets d’air chaud. La douche à la bière non merci, puis le voyage du début de journée commence à peser, on ne joue pas à domicile, donc évitons la douche à la bière pour puer le houblon mélangé aux glaires sur le chemin du retour.

La scène s’éclaire, les sirènes hurlent, l’alerte du bombardement imminent retentit et le groupe fait son apparition sous les hurlements de la foule. Pas de « Wall of Death » pour décor comme habituellement en tournée mais des ambulances sur scène. Une est en suspension tandis qu’une autre est garée à gauche de la vigie de Liam Howlett, général en chef maestro des opérations. Comme au Zénith, et pour le reste de la tournée, le groupe ouvre sur « World’s on fire ». La puissance du son et du jeu de lumière prend toute la foule qui s’agite dans un seul élan à la manière d’un épileptique. Les petits cokés d’à côté trouvent que nous ne sommes pas assez virulents, mais après un « Breathe » bien allongé et un « Omen » sans fausse note, je pense qu’on nous étions proches de leur niveau et ce sans l’apport d’aucune drogue dure. Par contre en étant placé sur les coteaux du site à au moins deux cent mètres de la scène il manque quelque chose. Les invectives de Keith Flint et de Maxim sont presque impossibles à palper. Si le dernier donne de la voix, Flint comme à son habitude s’occupe de courir de part et d’autres de la scène pour exciter les premiers rangs. « Colours » est corrigé, certains éléments ayant été changés d’ordre par rapport à la version studio. La guitare électrique notamment a été revue pour jouer un air assez différent de l’original. Suivent « Poison » et surtout « Thunder ». Surprise là encore le morceau est revisité. Cette fois-ci c’est dans une verve Dubstep-Rock que le morceau part et au-lieu de lâcher les chevaux, Liam Howlett les retient en gardant la fracas d’une charge de cavalerie. « Warrior’s Dance » est entrecoupé d’un solo de clavier géré de main de maître par Howlett encore une fois.

Petite retombée lorsque le groupe ressort « Weather Experience » des cartons. Tiré de leur premier album « Experience » sorti en 1992, ce morceau très lent et planant est accompagné d’un jeu de lumière assez énorme, comme durant tout le concert d’ailleurs. Beaucoup du jeune public dont moi ne connaît pas trop ce morceau sorti quand j’avais six ans ! On embraye d’une vitesse sur « Mindfields » et son ambiance entre Breakbeat et Jungle avant de passé la sixième en mode supersonique sur le frénétique et classique « Voodoo People ». On reprend des allures de gens venus assister à un concert philarmonique quand Liam Howlett s’éclate sur la reprise d’ « Omen » puis on termine tranquillement sur « Invaders Must Die », le Hip-Hop industriel de « Diesel Power » puis le classique d’entre les classiques « Smack My Bitch Up » véritable talisman du groupe. Le groupe déserte la scène mais on sait bien qu’ils vont vite revenir, le public en hurle d’ailleurs comme pour demander sa dose.

On ressort vite le clairon et la fanfare pour la calvacade avec un « Take Me to The Hospital » des plus classiques. On saute mais les articulations se font fragiles et la fatigue se fait salement ressentir. L’intro de dingue de « Everybody In The Place » nous fait encore planer (toujours pas de coke dans le zen je vous rassure) mais le rythme ultra-sacadé nous empêche toute embardée. Le cœur n’y est plus. On se laisse tout de même amener vers le massif «No Good » et sa mélodie de virage de stade de foot reconnaissable entre mille. Allez une dernière série de saut en ignorant faim, douleur et fatigue. Je vous laisse découvrir ce que valaient les trois derniers titres (Charly, Their Law et Out of Space) sur Youtube.

Nous on rentre dans le sud de Londres pour dormir. Encore 90 km de voiture. On a pris une claque en matière de concert mais aussi d’immersion dans la culture anglaise en live. J’aurai pu titrer cet article « Chaos et harmonie » mais je pense que pour le coup « Bouillon de culture et claque dans ta face » était plus éloquent. Les sujets de la Reine sont une sacrée bande de dingues sur scène et en dehors. Prodigy a encore une fois fait exploser la scène et assit sa réputation de meilleur groupe live de ces vingt dernières années. Rien à redire. Rendez-vous à la fête de l’Huma pour leur prochain live en France. Cette fois-ci on jouera à domicile."


PS: j'essai de battre le record de l'article le plus long, jusque là détenu par l'interview de Florian Schall. Pas encore pour cette fois, même en déléguant cette lourde tâche...

PS2: Et voilà le taff! On passe commande et on est pas fichu de ramener une photo! Obligé d'aller piller dans celle que le groupe fourni via Dugdale. Pas une habitude, on voulait quand même illustrer ce long report!

vendredi 6 août 2010

MELVINS/ISIS Split


Un des derniers disques d'Isis, qui s'offre son cadeau parfait: collègues de label, potes de tournée, et influence majeure des débuts, Melvins partage une galette noire avec le groupe qui se suicide. Problème, on ne gardera probablement rien de bien mémorable de ce disque. La face Melvins est juste inutile, du remplissage basé sur 2 versions "alternatives" de morceaux présent sur leur dernier album, dont l'une propose des petites bubulles sonores par dessus le rock'n'roll de base. Isis en revanche s'en sort presque avec les honneurs: sur deux morceaux le groupe se montre convaincant dans la concision imposé par le format. 1 de plus et c'était l'overdose, mais là on salue l'aspect ramassé. Leur prog moderne s'accouple à des vocaux presque pop qui donnent un certain charme à cette lettre d'adieu où Baresi leur mijote un son profond et remarquable. La pochette est à la limite de l'anecdotique, une forme caillouteuse recouverte d'algues tente de s'affirmer, mais il semblerait qu'ils aient oublié les lunettes 3D qui vont avec chez HydraHead.

High Tone - Out Back

Je ne pensais pas un jour chroniquer un disque de High Tone, ou pire encore l'apprécier réellement. Les premiers mots se dirigeront donc à un utilisateur d'un forum qui a su aiguiser ma curiosité sur ce disque en le calant à coté de noms qui étaient des valeurs sûres. High Tone semblait avoir atteint le paroxysme de sa musique sur Underground Woobble, beaucoup plus ambiancé, avec plus d'influences et beaucoup moins direct. Pourtant le disque restait quand même largement indigeste et pas foncièrement interessant. Ne parlons même pas du reste de leur discographie. Du coup High tone était rangé dans ma tête à côté de Zenzile, et archivé dans les groupes pas foncièrement éxecrables, mais pour lesquels une vie n'est pas suffisante et ne permet pas de perdre son temps. Il était inimaginable que ce groupe puisse sortir un double disque aussi ambitieux que celui ci. Dub Axiom en disque 1 et no border en second opus pour un choix découpage plus que réussi et seize pistes pleines à craquer. Dub Axiom d'abord serait la face la plus classique du groupe qui réexplore la ses propres influences et surtout sa propre musique. Ce sont aussi les pistes les plus interessantes que le groupe a pu réaliser. Une sorte de compilation dub, un hommage au genre qui les fait vibrer, du coté le plus old school aux dérives modernes dubstep, dub 8 bit... C'est aussi pléthores d'invités qui entourent le collectif, invités qui gravitent bien évidemment autour du collectif jarring effect. On songe tout d'abord au grand morceau de ce premier disque, le bien nommé liqor où Oddateee éblouit de son flow C'est aussi une claque à la propre musique d'high tone avec la fessée Spank, single et clip bien supérieur au reste de leur discographie. C'est aussi leur aspect le plus plannant developé sur fly to the moon avec des sonorités spatiales. Un hommage à ceux grâce à qui leur musique existe, un hommage aux potes, un hommage à leurs influences et surtout un plaisir à jouer qui se ressent. Le premier disque se boucle d'ailleurs sur un boogie dub production (référence facile à trouver donc) sans aucune réelle faute de gout à part peut ètre ce rub a dub anthem où puppa jim ne contente que par l'hommage à KRS one. C'est aussi en retirant tous les excès et ce qui dépassait de leur musique qu'high tone a su trouver l'efficacité réelle sur ce dub axiom.
Pour le deuxième disque, aucune frontière donc, avec un high tone qui éclate ses propres normes et visite des contrées qui élargissent le champ de leur son. Des morceaux plus libres, plus plannant souvent, qui sont autant de bijoux de compositions et d'ambiances qu'elles sont des pièces hommages à un autre pan de leurs influences. La scène française bien evidemment, avec Bästard (le morceau nommé de la même façon), mais aussi Hint qui résonne sur ce vengeur 7th assault et rappelle bien evidemment le collision tour avec ez3kiel. C'est donc des influences plus rock mais aussi plus ambiancées, avec un propal aride et western, quitté de toute vélléité dancefloor, un altered states contemplatif mais c'est aussi pour high tone un art de la composition auquel le groupe ne nous avait pas habitué sur le fou uncontrollable flesh aux limites du noisy, du moins dans certaines de ses attaques sonores.
Deux disques qui revisitent la musique du groupe, qui a su pour la première fois tourner son propos de manière intelligente et savante, tout en conservant une base festive dans leur musique.
Leur an zéro en quelque sorte, et un disque qui éclate tous les préjugés que l'on pouvait avoir sur ce groupe. Plus qu'une surprise, une jolie fessée. (Jarring Effect)

Venetian Snares - My So called life

Aarun funk a décidé de s'affranchir de Planet Mu sur ce disque en sortant l'objet sur son propre label Timesig records. L'objet est donc le tout premier pour ce label. Cette démarche sied d'ailleurs bien à sa musique qui elle aussi s'affranchissait de plus en plus des modes ou autres considérations. Aaron funk s'éloignait de plus en plus d'une etiquette dont il était un des instigateurs, le breakcore. Certains de ses objets étaient d'ailleurs loin de tout ce que l'on pouvait attendre de lui, notamment ce Sabbath dubs chroniqué dans ses pages où il reprenait deux morceaux de black sabbath dans une version dub enfumée. Venait ensuite detrimentalist, en réel semonce old school voulant revenir aux origines de sa musique, la musique rave. Il semblerait que depuis, le garçon a retrouvé une rapidité et une fluidité de composition et la plupart de ses morceaux ont été d'après lui composé trés rapidement. Une démarche opposée donc à certains disques plus conceptuels où Aaron funk déployait une idée et la déclinait sur un album entier, qui serait représentatif d'une période de la vie de son compositeur. D'ailleurs il le dit lui même, "cette fois ci aucune connerie à raconter sur l'album". Du brut, de la musique comme il l'aime, toujours dans la même veine, d'une agressivité et d'une folie rare. Des morceaux disparates sous une bannière commune, une grosse teuf où se rejoignent mélodies onirirques déconstruites, beats fous et enragés, break déconstruits et dance music. Certains plans ne sont pas sans rappeler les grandes heures de Prodigy époque music for the jilted generation notamment sur welfare wednesday. Venetian snares n'a que faire de l'écueil dubstep ou de choisir des vocaux qui vont bien dans l'ère du temps: féminins ou ragga. Il s'en moque même sur certains plans (cadaverous Motherfucker) et impose donc son son sans que jamais l'on ose la comparaison (là où enduser s'enlise dans des plans d'hier). Résumer la musique de Venetian Snares à une agressivité brute n'est pas forcément juste, vu la quantité de plans sur ce disques d'une finesse instantanée, avec claviers oniriques et déconstructions salvatrices. La musique de Venetian Snares n'a peut être jamais été aussi colorée, aussi pleine d'humour (sound burglar vengeur ) et son auteur semble avoir trouvé son rythme de croisière et sa satisfaction de composition. Il semble que plus rien n'est à dire à chaque disque et pourtant aaron funk semble trouver une plénitude de composition là où certains disques ne déroulaient pas autant à l'époque. En quelque sorte il fait du nouveau avec de l'ancien (comme si la musique était de toute façon vouée à en passer par cette période) sans jamais recycler éternellement ses propres plans, ou alors en l'assumant entièrement dans des morceaux faisant office de suite. Un disque de Venetian snares donc, et un très bon même s'il reste peut être moins marquant que detrimentalist dans le cheminement du bonhomme.

jeudi 5 août 2010

Ergo Phizmiz - Things to do and make

Ergo Phizmiz parle de sa musique en utilisant le mot Wrongwriting. C'est une sorte d'humilité déplacée chez le bonhomme sachant la qualité du songwriting que recèle ce nouvel album, Things to do and make, le premier dans une veine "pop excentrique". Le gazier n'a pas un CV à faire planer mais est quand même un artiste dans les petits cahiers de John Peel (youpi) mais a surtout bossé avec The The.
Cet album est celui d'un seul homme qui canalyse son énergie live et essaye de retranscrire le coté cabaret voire surf de sa musique. Une pop inventive, qui fourmille d'idées et qui se construit à base de boucles sur lesquelles se greffent des sons débilo mongoloides qui créent une ambiance un peu inquiétante (à la the Monks, ou aux Residents). Un peu à l'image de People Like us (dont il est vraissemblablement très proche), Phizmiz déconstruit sa pop music en y intégrant des instrumentations et des orchestrations déjantées. Il y rajoute par dessus une voix camée bon enfant et une dose d'humour certaine. Things to do and make c'est une approche différente de la musique pop, héritière des années 60. Pas mal de clins d'oeil, notamment dans cette production polyphonique et un tube magique: parrot in the pie. On s'embete un peu plus lorsque le gazier tente des incursions dans une veine plus electropop (dirty shower honk stomp) mais au final le disque passe crême. (care in the community recordings) http://www.ergophizmiz.net/