mercredi 9 février 2011

SEEFEEL-Seefeel

Le retour, comme prévu et annoncé avec Faults dont on a causé (en bien) plus tôt. Le retour d'un projet oblique, musicalement passionnant mais demeurant un coffre à pépites pour gens concernés. Seefeel est une référence discrète, celle qui fait automatiquement acquiescer le connoisseur, forcément un peu seul, et celui qui fait systématiquement répéter le profane- "Comment tu dis que ça s'appel?". Un secret étrangement bien gardé, malgré une estime réelle et des papiers flatteurs jadis. Du quatuor d'origine, cette résurrection d'un auto-sabordage n'en garde que la moitié: le guitariste et tête pensante Mark Clifford, parti besogner sur Disjecta pendant 15 ans, et Sarah Peacock, également guitariste et chanteuse, gonflé par l'arrivé de deux nippons que sont le premier batteur des Boredoms et le mentalement atteint DJ Scotch Egg.
Dans l'idée générale, ce nouvel album de Seefeel a plus à voir avec leur début qu'avec leur chef d'oeuvre Succour, sorti au milieu des années 90. Alors collègues de label avec Autechre et Boards Of Canada (le dernier concert de la formation initiale s'effectua d'ailleurs en compagnie de ces derniers, l'un des quelques 5 ou 6 concert que donna BoC de toute leur carrière) leur musique, orignalement exécuté par un groupe de rock (guitare/basse/batterie) n'en avait plus la moindre trace, bien plus à mettre en liaison avec leur label et ses spécialités, l'ambient, l'electronica ou je ne sais quoi encore fait à base de glapissements de séquenceurs et d'oscillateurs. Seefeel pour son retour s'accroche à une batterie sauvagement acoustique (du moins elle sonne de la sorte) et ne s'offre que peu de variation dans le son. C'est d'ailleurs le parti pris le plus étrange pour l'album et qui peut être le plus gros défaut du disque. L'électronique permet un renouvellement du langage toujours appréciable. D'un morceau à l'autre, la musique change sa parure. Avec Seefeel, les mêmes sons reviennent sans cesse, créant une sorte d'enfermement sonore très particulier. La caisse claire sonne toujorus identique. La basse aussi. Et les sons de claviers, les effets, les distortions également. Le fait que la musique se porte d'avantage sur des constructions progressives et électroniques en font donc, à l'inverse d'une dynamique rock, une sorte de redondance qui peut aussi fatiguer l' auditeur. Pourtant l'album, entre sonorité poisseuse, marécageuse et audaces bruitistes et spatiales surnage sur cette étrange décision. La musique de Seefeel est étonnamment plus concrète que sur Succour, s'avère aller d'un début vers une fin, porte un but. Le disque semble être un voyage, avec ses pauses et intrusions d'abstraction bruyante et ses longues épopées rythmiques. Une partition longue et segmentée en morceaux. Et si effectivement parti pris il y a , la production générale n'en est pas moins puissante. Clifford et sa bande viennent d'enregistrer parmi les lignes de basses les plus massives récemment gravées sur un sillon. Les éclats de bruits et de distortions cisaillent remarquablement les autres éléments. L'air de rien, surtout, l'album renvoi un sentiment de tristesse, de mélancolie diffus et largement entretenu pendant les 11 segments. "Seefeel" présente un groupe qui se replace logiquement sur l'échiquier des groupes innovants et passionnants, en proposant une oeuvre unique ( aussi bien pour le fond que pour la forme) et sombre mais néanmoins soigneusement esquissée.

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