Dans le truc qui nous sert d'histoire du hip hop, on a souvent tendance à ne retenir que l'axe paris-marseille avec NTM et IAM (3 lettres à chaque fois, histoire de pouvoir charger niveau intellectuel derrière), l'oubli de l'ami Claude MC dans la période 93-97 (en gros, des premiers gros morceaux rap jusqu'a l'explosion médiatique et le relai de skyrock pour épouser la loi Toubon) est réccurent et pourtant injustifié. Peu après le temps où il était cool à l'école - le temps des juppes-culotte- Claude commit un premier album au nom gentiment poétique mené par une paire de single aussi niais qu'introductif de bonne humeur en mode pantalon zoulou, chapeau embarassant et toute la panoplie. Prose combat sera, et restera, le chef d'oeuvre que l'on pouvait attendre du jeune talent. De Solaar on garde l'image d'un gentil garçon, posé et doux, plutôt porté sur la recherche du mot juste. Mais c'est peut-être réduire un peu au plus simple le bonhomme qui s'illustre sur les 15 morceaux de ce deuxième long. Claude est entouré d'une équipe rodée depuis le premier et s'articule autour d'un DJ au nom qui fleure bon l'amérique (la caution true?), Jimmy Jay et surtout de ce qui deviendra Cassius, à savoir Philip Zdar et "pigalle" Boom Bass. Le travail des deux producteurs n'est pas des moindres et place la possibilité d'un hip hop français avec du corps, une sorte de paire au Paris sous les bombes qui pourtant ne sortira qu'un an plus tard. Les samples sont amples (j'écoute, je m'inspire et voilà le travail: jeux de mots vaseux), se collent sur des beats rarement surprenants mais souvent épais et langoureux. Le duo gonfle sévèrement le son sur l'ensemble des morceaux d'énormes basses, toujours puissantes et tout en rondeur. Si l'élément rythmique est parfaitement maitrisé, le reste du spectre sonore n'est pas négligé. Aubade ou dévotion présentent d'énormes claviers, spacieux, vertigineux. Sur le 9ème morceau (les curieux comprendront pourquoi je ne recopie pas le nom du morceau après avoir vérifié ça) le morceau se construit progressivement sur un empilement de léger larsen encerclant un beat sec, ce qui n'est pas sans rappeler le travail de Mick Harris. D'ailleurs, en 94 on rapprochait souvent Harris du trip hop naissant, courant que Zdar et Boom Bass semblent maitrisé aussi (les premiers massive et les débuts de portishead ont-ils tournés?! De toute façon cela reste un dérivé de hip hop). Les ambiances sont lourdes et dégage cette mélancolie typique 90's, notamment grace à l'utilisation régulière de samples de sax et de trompettes. Bien sur, la musique s'aère du gimmick via des cordes douces et blues sur "Dieu ait son âme" ou "la fin justifie les moyens". L'autre pic de production de l'album est évidemment ce "nouveau western", gonflant magistralement un sample de Monsieur Gainsbourg. Sur cette épopée sonore à part entière, Claude nous compte sa vision du monopole US via son verbe, et marque des bons points. Son mot est souvent juste, tout au long de l'album, la rime riche, imagé et juste. On sait Solaar fanatique de l'écrit et il rend justice à sa passion la plupart du temps. Ainsi il est tout à fait capable de passer de brillantes accélération bien menée qu'à de sombres jeux de mots un peu raté. On pensera notamment à "la concubine...", un des morceaux les plus datables de l'album, à la production lourde et facile où Claude y va de son mot sur la guerre (pas bien), cette dernière qui niqua Guernica tout ça, tout ça... Il parle aussi du biz dans lequel il rentre, d'un regard sur son auditoire qui trouve rapidement ses limites, de l'amour ou de ses contemporains, en nous épargnant le regard sur la situation en banlieu, sujet alors peu attirant pour les médias à l'époque tout en collant parfois d'habile verset ("allez vous faire F...non, je prefer passer outre!" grand). Sinon Claude MC est plutôt obsédé par le passé (qui lui revient comme un bilboquet), qu'il décline à plusieurs reprise, allant jusqu'à l'autoparodie. Si l'artisan du verbe baigne son disque dans la mélancolie, il trouve rapidement la limite de son discours dans l'incapacité qu'il aura par la suite à développer des choses plus pertinentes. Dès le suivant, la magie disparait, "Les temps changent" n'étant qu'une redite, sans parler des calembours, 10 ans plus tard type "da vinci claude". D'ailleurs il ne sera pas le seul responsable de cette chute puisque le duo de producteur, probablement plus motivé par le projet Cassius alors naissant, habillera de façon bien pute le "paradisiaque" qui succèdera 3 ans plus tard à ce second jet. Reste donc ce disque, un peu seul dans cette discographie aride en qualité, mais qui peut, à lui seul, justifier d'un intéret certain pour "l'homme qui capte le mic et dont le nom comprend double A".
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2 commentaires:
Très bonne chronique !! Sévère mais juste.
Vraiment super chronique, pour un disque au combien magnifique pour s'aérer l'esprit entre deux groupe de doom...
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