mardi 28 septembre 2010

The Town de Ben Affleck


Ben Affleck, s’il est un acteur dont on aime à se moquer pour son talent incertain, est un réalisateur que l’on suit d’un œil plutôt curieux et attentif depuis son premier film, Gone Baby Gone, dans lequel il mettait en scène son frère Casey qui lui est un acteur que l’on ne peut qu’admirer et dont on attend également le passage derrière la caméra.

Si Gone Baby Gone était loin d’être parfait, il présentait néanmoins quelques sérieux arguments, tant sur le rythme de l’action et la profondeur des personnages. C’était réellement plus sur l’intrigue que l’on s’éparpillait un peu. Disons qu’avec ce second film, l’inversion est totale et le résultat, fort banal.

The Town reprend les plus grands standards du polar urbain et du film de « casse ». Deux amis d’enfance, faux frères liés par leur histoire commune, une bande, une nénette un peu sympathique, accessoire indispensable aux états d’âme d’un anti-héros au grand cœur malfrat malgré lui. Le poids de la société, l’écrasement du système, l’attachement au territoire, l’impuissance et le vide astral entre ce monde et ce lui des autres. The Town aurait pu, d’ailleurs, être un film intéressant sur la castration symbolique des classes sociales défavorisées (thème qu’il aborde d’ailleurs à travers la figure du père et du parrain…). Mais non, pas vraiment.

Voilà grosso modo le contexte psychique dans lequel l’action prend forme. Une bande de braqueurs du quartier de Charlestown (ville de Boston) réalise un casse et prend en otage la directrice d’agence. En la relâchant ils lui confisquent son permis de conduire et se rendent compte qu’elle habite dans le quartier, à quelques rues de chez eux… Notre anti-héros, joué par Ben Affleck himself, se dévoue pour suivre la dame et s’assurer qu’elle n’aille rien dire au FBI sans se douter, bien évidemment, qu’ils allaient tomber amoureux l’un de l’autre.

Waouh, en l’écrivant comme ça, on se rend un peu plus compte de ce qui plombe littéralement les intentions assez louables d’Affleck. La tendresse. Inattendue dans un film de gangster, elle s’insinue petit à petit dans tous les plans, dans tous les interstices qu’il lui laisse et finit rapidement par être partout à tel point que, la confrontation entre les deux frères (que finalement tout oppose), vire au canular, à l’apostrophe. Elle ne tient qu’une scène, celle où l’un révèle à l’autre qu’il ne pourra jamais quitter Charlestown car il en est à la fois le fruit (avarié), l’intime détenteur et le vigoureux protecteur.

On décroche ; l’action, tout à fait honorablement mise en scène avec même quelques prises de vue intéressantes dans les courses poursuites, s’éteint petit à petit et le grand Ben, qui donne l’impression de se racheter une virginité cinématographique, prend toute la place avec ses grandes intentions et sa morale insistante.

Seule véritable confirmation, celle qu’Affleck est un de ces cinéastes urbains qui donne toute sa place au lieu de l’action en lui confèrant un rôle à part entière. La ville, filmée sous toutes ses coutures, est une des actrices principales du film. En plan aérien comme dans les courses poursuites, dans les expressions comme dans les us et coutumes, elle est prégnante, intense, inévitable. C’était déjà le cas dans Gone Baby Gone ; le film s’ouvrait sur des images tournées en 8mm qui donnaient un ton, une couleur, une chaleur, non sans rappeler Gus Van Sant, avec qui le bonhomme a travaillé sur Will Hunting.

Le hic est peut-être musical. Ici Affleck ne semble pas avoir choisi de faire de la musique de rue, des productions locales un instrument d’ancrage qui aurait pourtant été d’une très grande aide pour son récit et pour son ambiance. Dommage, il y avait de la place pour mieux…


Des hommes et des Dieux de Xavier Beauvois


La montagne, cachant un soleil naissant, immuable spectacle aux chatoyantes couleurs qui plante, avec la certitude des Dieux, le cadre de l’action. Quatre plans fixes ; voilà ce qu’il aura fallu à Beauvois avant que l’immobilisme du quotidien, de la nature, l’immobilité divine en somme, ne se meuve en action. L’action, le mouvement, le temps. Voilà dans quoi évoluent ces hommes, ces messagers des Dieux. L’arène de cette inamovible éternité étreint la répétition des mêmes gestes, ceux qui rythment le temps, ceux qui attachent l’homme et lui donnent l’impression de maîtriser l’écoulement trop rapide des jours et des années.

Par les temps qui courent, le nouveau film de Xavier Beauvois aurait très rapidement pu tourner à la fable prosélyte, enfermant le spectateur dans une guerre des civilisations inextricable qu’Huntington n’aurait certainement pas désavouée, brandissant la morale comme on brandit un livre sacré à la moindre incartade, au moindre chamboulement qui annonce pour les uns le déclin, pour les autres demain.

La tentation est forte de nos jours de prendre à parti et de juger. Nous sommes confrontés dans notre quotidien, dans notre temporalité incertaine, à ces autres qui nous gênent, que l’on se sent incapable d’aimer. A cela Beauvois objecte l’improbable possibilité d’une spiritualité retrouvant le chemin qui aurait toujours dû être le sien. Celui de l’amour.

Mais de quoi parle-t-on ? Des Hommes et des Dieux est le récit des quelques semaines de la vie des moines de Tibhirine qui précédèrent leur enlèvement puis leur exécution. Beauvois a choisi de montrer l’implication, le travail, l’importance de cette petite communauté de prêtres auprès des algériens du village voisin. Ils ne sont pas là pour convertir, non, ils sont une aide indispensable pour les besognes de tous les jours, tour à tour médecins, confidents, jardiniers, mais aussi des compagnons respectés, des invités, des membres du village. Ils sont ces âmes charitables qui réalisent dans la pauvreté et dans l’amour véritable de leur prochain, ce pour quoi ils se sont engagés sur la délicate voie de l’Eglise.

Beauvois agite avec douceur cette caméra qui prend parfaitement les lumières naturelles de la vie, filme l’ordinaire et le dévouement tout en gardant à l’esprit que cela s’inscrit dans un temps qui se meut, qui avance, sans savoir vers quoi il tend. Et parfois, lorsque le divin touche au style sublime qu’il adopte, il s’arrête, fige son objectif et contemple, dans un recueillement laïc, curieux et respectueux, ces hommes qui prient, qui parlent avec celui qui les guide. Le silence devient musique, leurs chants absorbent l’émotion et témoignent de leur dévouement.

Voilà où est l’amour véritable, celui du partage, de la tolérance, du sacrifice. Beauvois ne donne pas de leçon, il nous invite à partager les instants communs et pieux de ces hommes qui, en leur âme et conscience, ont choisi leur mission plutôt que leur confort, attachés à ces gens qui leur sont chers, attachés à cette terre qui n’a pour eux nul autre dogme que l’humanisme. Une invitation à ne manquer sous aucun prétexte.

mercredi 22 septembre 2010

Jaga Jazzist - Bananfluer Overalt EP



Avec sûrement l’un des tous meilleurs disques de ce que l’on qualifie de Nü/New/Niou/Electro-Jazz, Jaga Jazzist a changé de statut cette année, passant d’acteur incontournable (et pour cause, signé chez Ninja Tunes) à celui de fer de lance de cette scène au noyau dur scandinave. Bien décidé à conférer à ce One-Armed Bandit le statut qui lui revient, le prestigieux label nous sort ici ce qu’il qualifie de single sous la forme d’un ep, pas nécessairement une démarche qui me plait énormément en général, mais suffisamment étoffée de nouveau matériel pour que l’on s’y attarde. Ce sont en fait pas moins de huit pistes qui sont proposées, toutes issues du dernier opus, mais dont sept sont proposés dans une version inédite, soit de quoi se remettre une bonne rasade de One-Armed Bandit de manière étonnante, pour peur qu’on l’ait écouté. L’excellent Bananflueur Overalt apparait ainsi en trois versions différentes, sa version album, une version éditée au format radio (tard dans la nuit sur Inter) et un Prins Thomas Diskomiks culoté et orgasmique de sonorités chimiques retournant la composition en une tube évoluant vaguement entre dancefloor lounge tamisé et krautrock étoilé de samples du morceau original. C’est bien la surprise de ce cd single en fait, car outre sa durée conséquente, 45 bonnes minutes il est vrai remplies par 2 autres radio edit de Toccata et One-Armed Bandit plaisants à se remettre en tête mais sans grand intérêt placés là, il propose 4 remix audacieux et pas sans risque pour l’image du groupe, même si l’on imagine que ce malheureux disque banané ne s’arrachera pas à Carrefour. Ces versions retournent en fait ce qui était l’évolution principale de One-Armed Bandit en comparaison de ses prédécesseurs, à savoir un retour au jazz en comparaison de What We Must qui avait exploré, un peu vainement disons-le, des sonorités plus electroniques qu’acoustiques. Sauf qu’ici, la chose n’a pas été confiée à n’importe qui et part si loin qu’elle ne met absolument pas en péril la crédibilité de Jaga Jazzist, bien au contraire, marquant le goût du risque et de l’aventure du collectif norvégien. One-Armed Bandit, le titre, en mode Sprutbass mix se voit paré d’une instrumentation intégralement programmée aux sonorités de bandit manchot (comprenez à la 8 bit sauce midi windows 95), comme cela était le cas durant un court instant du titre sur l’album, et cela fonctionne tout à fait. Touch of Evil lui passe à la même moulinette, utilisant des sonorités cependant légèrement plus modernes, gardant sa structure rythmique intégrale mais jouant la carte des surprises sur les timbres très variés. 220V/Spektral lui est plus grossièrement transformé en hit que la french touch la moins inventive n’aurait pas renié, probablement le moins intéressant du disque.Le disque ne sera donc d’un grand intérêt que pour les personnes ayant très bien digéré One Armed Bandit. Découvert en tant que tel, surtout si l’on ne connait pas le groupe, il s’avèrera probablement déroutant au possible, désuet et incohérent. Mieux vaut découvrir les titres dans leurs versions non scalpées, et écouter de l’electro par des spécialistes. L’exercice, même s’il est bien fait, parait plus comme étant un expérimentation malicieuse et sans enjeux des norvégiens, et surprenante.

lundi 20 septembre 2010

MELT BANANA, La Maroquinerie


J'avais un peu peur d'être déçu par Melt Banana. Normal, quand un groupe vous paraît si bon lors d'un premier concert, on se dit qu'il va falloir que le groupe soit sacrément balaise pour ne pas piétiner sauvagement le souvenir qu'il a pourtant laissé lui-même dans votre esprit. Un détour par Arkham, un second au Souffle Continu (j'aime les petits commerces de proximité) et direction la maroquinerie, où tout autour ça sent le cheveux gras et la bière, pas de doute, ce soir c'est du rock salement dégueulasse qui va secouer le sous-sol du 10ème. Le merch est appréciable chez Melt Banana, pas trop cher, ce qui va parfaitement avec le prix du billet car oui, je paye mes places de concerts, je ne suis aux frais d'aucune princesse.
Circle est un groupe que je ne connais que de nom, même si au stand ils ont un disque avec Sunburned Hand Of The Man, groupe psychédélique fascinant et inusable de la scène américaine. En caleçons pailletés du meilleur goût, Circle fait dans le spectacle jovial et le rendu me semble être un mix entre (l'idée que j'ai de) Green Jellö, Spinal Tap et André Rieu. Le batteur entre deux coups pointe de ses baguettes ses collègues, pendant que le chanteur échappé d'un porno hardcore gay des 70's fait de petites vocalises sur fond de viking hard fm. Jamais lu cette étiquette avant? Faut un début à tout.
Une vidéo d'un concert précédent de cette tournée à probablement joué sur ma crainte d'être déçu de MxBx, manque d'enthousiasme dans le public et un groupe peu agité de rigueur sur tu-tubes. Pourtant le bordel hystérico-japonais va commencer de la meilleure façon possible: Melt Banana Lite ouvre sur quelques morceaux (une dizaine?) avant Melt Banana. Dans le noir total Yako et Agata, la chanteuse qui jappe et le guitariste qui saigne du nez conçoivent un set de Melt Banana uniquement basé sur les machines, samplers et pédales d'effets. Ni basse ni guitare, et plus surprenant, pas de batterie, contrairement à ce que l'album live sorit l'an dernier laissait penser. De fait, Agata lance les rythmiques (probablement des sessions de batteries) depuis un lecteur mp3, et assure le reste du boucan avec un AirSynth, ce qui rend le tout très visuel, d'autant plus que la pénombre est transpercée par des torches accrochées à leur têtes. En version Lite, le duo étonne par la maitrise du son, forcément bruyante, allant cherché du coté de la noise pure, poussant la logique de l'approche guitaristique classique du groupe dans un paroxysme singulier, sans pour autant délivrer une bouillie sonore méconnaissable.
Puis la minuscule mais effrayante bassiste et un (nouveau?) batteur rejoignent le duo, les lumières s'allument et Melt Banana Lite devient Melt Banana. Dès les premières mesures l'hystérie est totale, coté public comme coté scène, ça se fritte déja au son de la basse sur le morceau d'ouverture de Celle Scape (je crois). Le batteur a une touche à sortir du lycée, avec un short Canibal Corpse et joue comme une brute qu'il est, précis dans ses breaks et d'une rapidité hallucinante. Rika Mmm', discrète et omniprésente 3ème membre permanent du groupe, est toujours aussi inquiétante, derrière sa basse plus grosse qu'elle et ses yeux qui vont chercher les autres quand besoin est pour que tout le monde soit bien raccord. A la fin du premier quart d'heure, il n'est plus permis de douter, tout est devenu chaos, et le groupe ne décevra pas ce coup-ci sur scène. Et à la fin du concert, l'impression restera la même. Mieux encore, après 2 rappels, dont un premier composé de 8 short songs (en 2,36 mns) et Scratch or Stitch en second, Melt Banana apparaît clairement comme encore meilleure qu'il y a 2 ans, et surtout un des groupes à voir absolument au moins une fois sur scène. Encore!

samedi 18 septembre 2010

Lorn - None an Island Ep

Brainfeeder, en l'ocurrence Flying Lotus pour Lorn nous montre son grand potentiel de découvreur d'artistes, de promoteur et protecteur. Nothing else était une rare sortie avec l'etiquette dubstep fascinante du moment, qui n'avait de dubstep que l'étiquette marketing voire l'entourage du gazier. On y retrouvait plutôt une musique électronique lourde,assez distordue, aux rythmiques éreintantes, le tout sublimé par un sens mélodique hors du commun, qui façonnait des pièces musicales d'une rare mélancolie. En quelque sorte Lorn revisite de manière plus personnelle des tendances actuelles en y insufflant une identité marquée. Dernière activité en date donc pour le bidouilleur, cet ep chez Brainfeeder qui choisit donc comme single de l'album ce none an island, choix pas forcément des plus ravageurs (l'album comportait de plus belles pièces) mais tout de même assez représentatif. Une rythmique bétonnée avec un beat hip hop s'emballe sur une nappe vengeresse. Viennent ensuite les écarts stylistiques de cette même nappe triturée jusqu'à l'élévation. Rien de neuf donc, jusqu'à ce remix par Samiyam, producteur américain, (du même morceau) qui revisite à sa façon la musique de Lorn. Samiyam l'efface et la fait passer dans un arrière plan trouble pour s'interesser à la rythmique mastodonte, en donnant un aspect plus chaleureux et organique au beat. Nous caresse par dessus cette nappe qui se transforme en valse cosmique.
Pour terminer l'EP, deux nouveaux morceaux, dont ce never enough qui s'écarte un peu de son style habituel tout en gardant sa marque de fabrique. Toujours ces rythmes entêtants et lourds, ces phrasés mélodique touchants mais cette fois ci avec moins de noirceur, plus d'assurance. Le dernier morceau n'est pas si nouveau que ça, existant déjà avant la sortie de l'album. Until there is no end est moins convainquant, moins habité, et ces voix sont en trop. On est plus séduit par le futur de Lorn que par son passé, rassurant. (Brainfeeder)

vendredi 17 septembre 2010

Inade - The Incarnation of the solar architects

'' To will, to know, to dare, to be silent'' nous indique le livret. Inade explore depuis quelques temps les contrées extraterrestres de la musique. Leurs disques arrivent sur la planète terre avec plus ou moins de réussite. Là où Samadhi state était arrivé à son état le plus épuré par chez nous, avec le sentiment que la musique d'Inade vivait moins que d'accoutumée, cette nouvelle livraison a été épargnée par les services postaux d'outre monde. The Incarnation of the solar architects triture encore et toujours cette musique inhumaine et décharnée. Une prière venant d'ailleurs. Inade est une incantation païenne venant d'une autre galaxie. Le dark ambiant rituel se fait aujourd'hui plus rituel qu'autre chose. L'aspect rythmique, martiale de la musique engorge des nappes abyssales pour les recracher dans des sonorités béates. Ce disque crucifie son propre prophète pour exhumer d'autres morts. Inade contemple un champ de bataille intergalactique, avec un fort ton guerrier et vengeur, comme pouvait l'être In Slaughter natives. La comparaison s'arrétera là car ce disque passe le genre habituel dans un trou noir qui serait le filtre de la musique sombre. Quelque chose semble s'arrêter à l'écoute de cette épopée spatiale. Le temps pourtant continue son vol, mais il nous est présenté differemment. Si la musique céleste est souvent aussi ennuyeuse que son qualificatif est pompeux, The Incarnation of the solar architects est plutôt abyssal et nous plonge dans un océan d'une autre galaxie. Inade semblent connaitre les rouages du cerveau humain pour mieux le dompter. Ce disque en est la preuve, et le moteur de notre esprit a déjà cessé de tourner avec cette litanie venue d'ailleurs.

Serph - Vent

Vous avez le droit de cliquer sur la pochette, histoire de l'admirer en plus grand format. D'ailleurs le seul format qui pourrait rendre justice à ce joli travail est bien entendu le vynil. Serph est l'alias d'une âme vivant à Tokyo, jeune musicien nous racontant en quelque sorte la douceur d'un monde qui a depuis longtemps délaissé cette ville surréaliste. Un travail qui ne lésine pas sur les moyens, à l'image de son artwork surchargé, où chaque détail compte. La principale qualité de Vent est aussi son principal défaut. Vent est proprement hallucinant, tant au niveau musical que de l'exercice de style. Une electronica douceureuse cotoie quantités d'ambiances feutrées, lounge et jazzy où les instrumentations flottent les uns à travers des autres. Un monde où il fait bon vivre en quelque sorte, cotonneux et d'une beauté à couper le souffle. Vent respire la maitrise d'un musicien qui respecte son propos du début à la fin et frole l'esbrouffe auditive. Seulement voilà, Serph en fait des tonnes, et évite toute aspérité. Aucune vélléité dans Vent, qui est surement le disque le plus pacifiste qu'il m'ait été donné d'entendre. Et ce qui dérange le plus c'est justement le fait que tout est trop confortable. Vent en devient mièvre, avec ses accents de musique d'ascenseur, ou de salle d'attente de cabinet de dentiste. Le vent est sensé nous malmener, nous donner un nouveau souffle. Serph nous offre de l'air de ventilateur, qui peine à nous rafraichir. Qui pourrait trouver quelque chose à redire à ce disque? Du coup qui serait capable d'être bouleversé par une musique en soi trop confortable? Myspace (Noble Records)

Massive attack - Danny the dog

Ces mecs ont beau avoir écrit une des pages les plus passionnantes de la musique européenne, avoir écrit un des albums les plus solides et les plus coriaces sur la durée, être devenus de véritables machines de guerre sur scène, il ne faudra pas tout leur pardonner. D'autant plus que leur tournée européenne semble être entièrement passé à la trappe cette année. Je pensais me blinder de concerts en fin d'année, avec deux fois Massive attack en trois jours, les swans ensuite, et au final un tiers de me dates de fin d'année sont annulées. Et pendant ce temps, il ne me reste qu'à feuilleter les reports de mon collègue (qui lui semble enchainer les soirées au frais de la princesse). Si quelqu'un connait la vraie raison de leur annulation, les commentaires sont là pour ça. Il est vrai que cela commence à faire un bout de temps qu'ils trimballent martina topley au bout du monde, la tournée devenant possiblement éreintante (tricky a sorti deux disques pendant ce temps). Ils se devaient pourtant d'honorer leur parole. Pour fêter l'évènement, un petit déterrage d'album est de rigueur, de ceux qui peuvent dé crédibiliser des artistes. Un artiste en l'occurrence. Nous somme en 2004, un an après le fabuleux 100th windows (chronique ici). 3D est toujours seul maître à bord d'un nom qui devient encombrant. Artistiquement exigent, commercialement impatient, Massive attack devient quelque chose qui le dépasse. La créature qu'ils avaient crée à plusieurs ne trouve plus grâce dans les seules mains de Robert del Nadja. 100th windows avait d'ailleurs déçu et le public se faisait de plus en plus féroce.
La meilleure réponse qu'a donc trouvé l'ami 3D, c'est de saborder le projet. Tout bêtement. Quoi de plus simple pour arriver à ses fins? Une bo. Un film ringard et puant, un projet minable. Des fonds de tiroirs, des sonorités pas chères. Un tableau de chambre d'hotel en guise d'artwork. Des bouts de sons accolés sans cohérence. De la matière qui n'en est même pas. De la non matière même pas retravaillée. Un comble pour ce stakhanoviste. Des pièces instrumentales sans un brin de cohérence. Des sons synthétiques par ci. Une bribe de basse par là. Un baillement s'esquisse. Et pour un euro symbolique que ce disque m'a couté je ne prends même pas la peine d'ajouter des verbes. La preuve en vingt et une saloperies que les génies n'en sont pas sans travailler. La plus grande source d'inspiration pour Unkle sur sa honteuse fausse BO. Un joli étron.

mercredi 15 septembre 2010

THE ROOTS, DAVID MURRAY & THE LAST POETS-Tongues on fire


J'aurais aimé vous dire que ce concert fut génial mais ce ne fut pas le cas. Ce fut poussif, et un peu chiant, les Roots n'ont pas esquissé le moindre morceau au groove sec de leur dernier album, ni d'aucun autre d'ailleurs, se perdant en longs passages de démonstration. ?uestlove est la star incontesté du groupe (cf. les applaudissement qui lui sont réservés) et un excellent batteur. C'est tout. Les Last Poets n'imposent pas grand chose si ce n'est le respect qui revient aux artistes qui ont apporté quelque chose-même si c'était il y a longtemps, et Murray qui dirige le tout est pratiquement absent. Vernon Reid de Living Colour assure les guitares, ce qui ne se remarque presque pas. Un tel line up accompagné de visuels en power point maladrotis, et un son bien trop fort, on frôle le gâchis. Pourtant j'aime le volume mais là c'est limite tenable, surtout que dès qu'on se recule, le son perd toute consistance mais reste criard. On sait pourtant que les ingés son de la (les) salle(s) sont capables de miracle, j'en veux pour preuve les concerts parfaits de SunnO))), de Melt Banana, de Pan Sonic, bref, de formation au son forcément exigent qui ont eu lieu dans ce bâtiment ces 3 dernières années. La tentative de morceau reggae vers la fin du set est totalement boiteuse, et n'a aucune envergure -où est la basse? "Power to the people" en concluson ET en rappel achève paresseusement une soirée boiteuse (qui joue encore le même titre en fin et en rappel???).

dimanche 12 septembre 2010

PRODIGY en rouge


En un an, j'aurais vu Prodigy autant de fois qu'Antipop Consor... ah non, c'est faux.

J'aurais aimé faire court, même si je savais déja que le décalage entre Prodigy, le groupe apolitique absolu (ils ont toujours cherché à s'éloigner de l'étiquette qu'ils ont récupéré après Their Law), et la fête de l'humanité allait m'amuser, ne serait-ce que pour la dernière occupation en date de Keith"Maxim" Palmer, à savoir le pendentif de luxe (moche). J'ai l'impression d'arriver à ce genre de festivité un peu tard-je n'ai plus 15 ans- pour ma première visite, le coté "sympa on lève le poing on s'habille en rouge" m'amuse, même si je trouve la visite du village communiste un peu triste, de par ses débats inter-militants comme si ils n'y croyaient pas eux-même, et si l'esprit bonne enfant révèle quand même que les stands tenus par/pour des zones en dehors des régions françaises sont désespérément vides. Mieux encore, le fait qu'un mec en fauteuil roulant soit collé contre la barrière pour pouvoir profiter comme tout le monde du concert et que la sécurité refuse de le passer du coté photographe car "il n'est pas VIP" laisse le bon sentimentalisme tacite lié à l'idéologie rougeoyante s'effondrer comme un mur en 89.

En haut, Prodigy, malgré quelques apports de Milton Keynes (retouche de Poison-l'éternel insatisfaction parfaite de Master H, comme je le racontais chez Gulo à propos du maxi- ainsi qu'une version live de colours en revanche bien molle) offre un set qui ne se renouvelle plus trop et qui commence à trahir une certain fatigue de la part du groupe puisqu'ils vont bientôt entamer leur 3 ème année de tournée autour d'Invaders Must Die (ils ont commencé à l'automne 2008). Le son est bien faible au tout début du concert mais la boue de basse finira par s'imposer, peut-être à excès. Bref, Prodigy reste impérial sur scène, mais je ne peux m'empêcher de constater qu'ils sont sensiblement meilleurs en salle qu'en festival.

vendredi 10 septembre 2010

O.Children - O.Children

Il paraît qu'Interpol étaient les nouveau Joy Division. Il y avait de ça dans le premier disque, ou alors on a voulu y voir, de ça. Il paraît que les Editors écrivent de grands morceaux, entre pop et post punk habité, avec des teintes new wave (sic). Il paraît aussi que ce revival des années 80 a fini par ennuyer. Pourtant on a beau trouver à y redire, des fois ces disques arrivent à raviver en nous ce malaise où ces mélodies immédiates, ce raffinement british aux airs de société industrielle. On pense bien evidemment au Horrors, mais aussi au dernier The National, haut en couleurs et remplis de tubes. O.Children souffre des mêmes défauts, qui le rendent encore plus attachant. En gros on n'a pas forcément envie d'entendre un énième disque du gabarit, d'une misérable complainte ringarde et faisandée. Mais cet artwork nous prend par la main. Une fois n'est pas coutume, on se laisse éternellement porter par ces mélodies tristes, ces rythmes à la fois envolés et mid tempo, ces ambiances plombées et ces claviers qui rehaussent le tout. On est en chemin conquis, et on a beau leur dire qu'ils nous la feront pas, en instaurant un dialogue avec le disque, leurs arguments sont de taille. O.Children est un dandy qui joue sa dernière carte au champ de course, un looser au monocle, avec ses morceaux monocordes et désespérés, qui n'aspirent même pas à la gloire. Dead disco dancer est clairement dansant, mais de cette danse du desespoir, celle qui voyait s'écrouler Ian Curtis dans des convulsions. Les arrangements sont partout, donnent l'impression d'en rajouter trois tonnes, entre violons et claviers qui s'immiscent au milieu des choeurs, d'une production synthétique lointaine et évasive (Fault line). Smile est un hypocrite morceau de bravoure, qui commence langoureusement pour peu à peu se transformer en hymne romantique imparable. O.Children compose avec l'énergie du désespoir, l'urgence d'une tête de turc, le délice de l'espoir. Puis O.Children c'est aussi cette voix, celle qui réveille surement chez nous ces délicieux et létaux tons graves de Closer. Tobi O'Kandi élève ses morceaux là où on ne les attendait peut être pas. C'est ce qui rend ce disque si doucereux.

ANTIPOP CONSORTIUM, Point FMR


Depuis un an, j'aurais vu APC autant de fois que Prodigy.






A la base, je pensais m'arrêter là pour la chronique parce qu'au bout de la troisième fois, il s'installe un manque évident de surprise, ce qui n'empêche pas d'apprécier un concert pour autant. Sauf que de changement il y'a eu. Ca y'est, Beans n'est plus dans Antipop Consortium. Depuis le premier concert, l'an dernier, ça me semblait presque évident, un truc séparait les deux parties pour constituer un ensemble cohérent, Beans était définitivement à part sur scène, voir même coupé (lors de son freestyle), ce qui l'avait visiblement esquinté. Au printemps dernier, il semblait distant, à l'écart, restait dans le fond de la scène, les bras croisés. Le divorce semble bel et bien consommé, et il semble que les différends n'aient jamais été complètement réglé. Je prend le temps d'aller demander à leur tour manager pourquoi ils ne sont que 3 ce soir, réponse "bah il est pas là". Pendant un moment j'ai un doute, comme si j'avais mis un pull avec inscrit "crétin" dessus, mais il finit par me préciser que "Beans ne sera plus sur les tournées normalement". Et forcément, il manque un truc sur scène. Certain l'avait noté lors de leur énorme prestation à l'ATP il y'a quelques années, Beans était le petit homme charismatique et impressionnant du groupe, même si chaque membre apporte son truc. Mais APC sans Beans, ça serait les Beastie sans...Mike D; Unsane sans Signorelli-ah merde, déja fait.
Néanmoins, il est évident que le trio est plus cohérent, plus soudé aussi, et du coup plus en harmonie, plus serein. Les mecs s'amusent visiblement et ne mentionnent pas du tout l'absence pourtant remarqué. Le début du concert enchaîne les petites séquences très courtes, et l'on se demande si tout cela va aboutir. Finalement l'énergie est plus présente qu'avant encore, le groupe gagne en cohésion, et se permet plus d'excentricités que précédemment encore, en sortant quelques loufoqueries de leur répertoire (I was born electric, qui devient vraiment fun sur scène). De l'inédit en rappel qui dégomme méchamment, comme pour montrer l'urgence de tourner la page.
Avec cette nouvelle formule qui semble un peu hésitante de par l'absence conséquente d'un quart du groupe et de son identité, nait cette sensation d'un groupe, Airborn Audio qui singerait Antipop Consortium-avec brio car ce concert fut très bon. Une séparation regrettable, mais un groupe qui devrait rebondir, même si les premiers pas sont un peu difficile, comme si le groupe avait quelque peu perdu l'équilibre.

mardi 7 septembre 2010

Dels - Shapeshift / Toddlat - Sky Surfing

Le maxi de Dels est surement un des tous meilleurs que j'ai pu écouter depuis trés longtemps. Tout d'abord, il est quitté de tous les artifices inutiles que contiennent normalement ces exercices, à comprendre remix complétement ridicules où le DJ se contente de changer les aigus en grave, ou d'étouffer un son en fumant une clope au dessus des consoles, histoire de grossir la durée du truc et de lui donner un contenu commercialisable. Ici à part un instrumental (et quel instrumental), que des remix assez dantesques, qui apportent de réelles pierres à l'édifice que se veut la musique de DELS. On rajoute à ça un artwork magnifique, aui scotche comme un artwork ne m'avait pas scotché depuis longtemps, quelque part entre un cubisme apocalyptique et des couleurs glamour cartoon, tout ça dans une sorte d'ambiance un peu inquiétante. Ambiance qui se confirme d'entrée avec un morceau rentre dedans qui fait mal dès la première écoute. La grosse nappe typée 8bit t'agresse les sens en te lattant le cerveau, avec une rare énergie là où les percussions te donnent le rythme. Par dessu, le flow en veut à la terre entière, et marquent certains mots dans notre tête pour mieux les déglutir (SHAPE SHIFT SHAPE SHIFT ou let's go bacl BACK). DELS nous gueule son morceau et essaye de taper plus fort que les instrus, dans un combat avec la machine post moderne. Le coït entre le Mc et sa production est redécouvert à travers les différentes versions du morceau que nous propose le maxi. Tout d'abord le travail de Kwes se fait plus feutré, plus old school, en retravaillant l'aspect percussif (l'importance des cymbales semble rajoutée) et en lui donnant une teinte complétement différente, feutrée. Eli-T lui se centre sur l'aspect dancefloor du morceau en triturant la nappe pour en faire une mélodie assez réussie et en rajoutant des rythmiques dub avec pas mal de delay, production qui transforme le morceau de DELS en une version dub club et qui apaise un peu le flow du bonhomme. Pour finir (à part l'instrumentale, que je vous laisse sampler à foison), la version des savage replicants rend grâce à l'art de la percussion en enlevant quasiment l'agression verbale et en peaufinant l'aspect tribale, sur une montée en handclap qui intégre peu à peu la mélodie initiale. Réussite totale donc pour un maxi aprés lequel le nouveau morceau de Toddlat, découvert sur les XX ans de Ninja tune rend piètre copie. Vocalement le morceau est clairement insupportable, et le poulain de Ninja tune a beau se targuer de bosser avec Major Lazer, ou de travailler avec les jamaïquains pur souche, dans les studios Tuff Gong de surcroit, le trop plein d'autotune, et d'ambiance discothèque un peu cheap nous rebute. Le retraitement du morceau à travers différentes versions peine lui aussi à convaincre, entre remixes inutiles et peut être une version qui rend grâce à la production, par douster, qui essaye d'en retirer tous les aspects insupportable de ce futur tube dancefloor. (ninja Tune)