vendredi 22 octobre 2010

La chronique de Stockton: Crippled Black Phoenix & Godflesh


Chers tous, chers toutes. Voici un autre nouveau chroniqueur, en mode mercenaire, comme Big Ad, Machou, A. Laffillé (Noise mag), JJ, Gugo et j'en oublie avant lui. Sauf que celui-cisera régulier, mais de par son caractère sauvagement indépendant, refuse d'avoir un compte chez nous. Chaque fin de semaine, il pense pouvoir ne pas tenir la promesse d'un billet. Mesdames et messieurs, bienvenue à Stockton.

Une expérience à faire dans une vie, absolument, c'est de se rendre à un concert de métal. Une expérience unique, qui prend des allures de safari quand il est temps de se plonger dans la pénombre d'une salle de concert et dans sa fosse, rempli d'énergumènes qu'on ne croise nulle part ailleurs, si ce n'est parfois à l'oeuf cube, et dans les salons dédiées à la consommation crasse d'alcool à base de houblon à Munich, par exemple. En plur de chérir le diable d'une manière qui relève plus du TOC que d'un réel dévouement religieux, puisque la moindre occasion est prétexte à symboliser la tête du malin orné de ses cornes, l'homme composant cette faune est aussi un cas social fascinant. Le premier point qui en fait effectivement un être passionnant à étudier, est sa forte tendance à rejeter la mode tout en cherchant continuellement à s'inscrire dans un visuel ambiant prédéfini de multiples codes. Il niera s'impliquer dans son look, mais sa tendance à collectionner les t-shirts noirs à l'effigie d'un orchestre est un élément qui trahit l'absence évidente de je-m-en-foutisme stylistique, sans parler de son amour pour sa toison capillaire surdéveloppée, de ses chaussures lui étouffant le pied ou totalement agonisantes, et d'autres encore. L'autre point qui mérite investigation, c'est la proportion de cette faune à monter des groupes de métal, comme s'investissant davantage que bien d'autres cercles musicaux dans l'accomplissement personnel d'une passion vers une réalisation. Lecteur, tendras-tu l'oreille lors de ton prochain déplacement pour entendre le nombre d'échanges commençant par "et alors, vous en êtes où? Vous enregistrez en ce moment?" ? Si tu ne l'avais prévu, je te donne là un précieux conseil qui animera ta morose soirée, car un concert de métal est forcément un truc morose, sans parler des horaires de concert (19h30-23h00) qui tend bien à démystifier l'opulence réelle de vampire dans ce milieu.
C'est donc toujours armé d'une patience certaine et aussi d'une envie farouche qu'un déplacement en concert métal s'organise, du moins pour ma part. Je déambulais donc prudent dans le Batofar, cette fin d'après midi d'automne 2005 pour voir Electric Wizard, groupe culte de la scène doom anglaise, éponger avec sévérité la cire si particulière qui se forme dans les plus gourmandes oreilles à coup de larsens et de riffs tous plus imprégnées de fumée verte les uns que les autres. Bref, cette soirée, au milieu du public hallucinant de balanceur frénétique de toisons odorantes aux fumets les plus délectables m'a permis de me rendre compte que le sorcier électrique était composé de penseurs fort impressionnants (cf. l'entretien accordée à Versus à l'époque " l'essence du sorcier ce sont les drogues et la magie noir!" Ok Jus, Dongeon & Dragon vont te sponsoriser!) mais était à cette époque surtout rythmiquement mené par le bucheron anglais le plus remarquable du royaume: Justin Greaves, qui avait déjà frappé de la peau de chèvre chez Teeth Of the Lion Rules the Divine, Iron Monkey, entre autres. Bon, ce billet prend déjà de la place, je sens des absences, et je n'ai même pas commencer à parler des disques.
Tout ça donc pour dire qu'un jour je me demande, "Tiens, qu'est ce qu'il devient ce bon vieux Justin Greaves ?" après avoir remarqué que l'anglais avait disparu de mes radars. Stupéfaction, il joue ce que j'ai longtemps pris, à tort, pour un de ces groupes qui inondent les bacs à doom des détaillants de rondelles sans grande originalité. Erreur puisque ce n'est pas franchement de doom dont il s'agit, mais plutôt d'un rock stellaire Pink Floydien, aux effluves folk et aux abord de "post rock", lent et qui prend son temps pour se développer. Et le résultat de ce I, VIGILANTE est pas dégueu en bouche, et la digestion se fait sans grande difficulté. On se sent presque au milieu d'une troupe de hippies modernes, passionnés par les 70's mais aussi Coil- même si je pense que ce jugement est faussé par le fait qu'un des gars porte un t-shirt du groupe sur les photos de leur myspace, ma curiosité m'ayant poussé jusque là. Des tas de groupes devraient soient prendre une leçon en écoutant religieusement ce disque/groupe, soit en tiré les conclusions: étirer sa musique jusqu'à l'asphyxie n
'est pas une solution envisageable lorsque l'on est piètre musicien. Ou alors, avoir au moins un minimum d'idée. Greaves, à la guitare, sait manier les registres et se donne les moyens avec CBP de produire une musique qui a un minimum de gueule, qui ne se pisse pas dessus à cause d'une médiocrité d'ensemble due à un manque d'inspiration éreintant.



Sur la pile de disques aussi cette semaine, Godflesh, les apôtres détestés du métal industriel (cf. le nombre d'interview où Broadrick explique que personne ne comprenait sa musique) mais également le roi mage qui en à un peu raz le cul qu'on lui parle de son passé (cf. le nombre d' interviews de Broadrick où il remercie les journaleux qui ne lui posent aucune question sur la chaire divine). Pourtant, en lisant ce qu'il raconte ces derniers temps quant à la reformartion du duo, il semble en avoir des choses à communiquer et y met un certain intérêt. Du coup, Earache, pas les derniers quand c'est l'heure de se remplir les poches a flairé le bon coup et sort une nouvelle version double CD de Streetcleaner. Le label anglais, on le sait, réédite massivement ces fiertés passées mais cette fois-ci, Broadrick pourtant en froid avec le label a capitulé et s'est occupé du son et du tracklisting de ce double disque. Le son est remarquablement augmenté et la lourdeur d'origine reprend ses droits, un peu à l'étroit face à l'évolution des productions depuis 89. Un beau double digipack emballe ces deux CD donc, avec un premier réhaussé mais inchangé au delà de ça, et un second, qui compile démos de l'album, live des temps jadis, enregistrement de répétitions amènent à peu de choses près à la même conclusion qu'avec Crippled Black Phoenix: pas mal de jeunes gens devraient en prendre de la graine et revendre leur matériel ou passer à autre chose, dans un contexte toutefois très différent. C'est aussi l'occasion de maintenir que si Broadrick ne semble définitivement pas fait pour être sur scène, il reste 20 piges plus tard, un extraordinaire producteur de disques... faisant presque oublier les calamiteuses prestations lives de ces différentes formations.

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