Faut-il y voir un signe? En ce dimanche après-midi, dans un cinéma d'une ville moyenne de la grande couronne parisienne, il n'y avait que 8 personnes pour assister à la projection de la deuxième plus grosse sortie de la semaine (en nombre d'écrans): deux couples de quinquagénaires (au moins), un couple de trentenaires, deux ados, moi et ma soeur... Qu'apprendre de cette population pour le moins hétéroclite, vu le film et son genre? D'une qu'il ne déplace pas vraiment les foules... Ce que contredit relativement son box-office national. Secondement, que Scream ne fait plus peur à personne; ni aux gamins qui se gaussent devant tant d'hémoglobine inutilement déversée, ni les mamies qui viennent tester la viabilité de leur pacemaker et sortent en rigolant, elles aussi...
Tout avait pourtant bien commencé. Kevin Williamson, scénariste de la trilogie précédente, nous donnait un avant goût intrigant d'un des sujets du film à savoir le renouvellement dans la continuité ou comment bouleverser les règles d'un jeu auquel on a trop joué. Passionnant sur le papier, plutôt bien vu tant les 10 premières minutes du film sont déroutantes. On y tacle savamment l'idée même de saga, on tranche dans le trash-porn façon Saw, reprochant à cette nouvelle façon de voir l'horreur de ne pas suffisamment donner chaire à ses personnages et de ne pas prendre au sérieux son intrigue. Tout cela doublé d'une dose d'humour, le scénariste insérant cette réflexion dans une mise en abime que Scream 3 avait déjà ouverte (l'intrigue se déroulait sur le tournage de Stab, l'adaptation des meurtres de Woodsboro au cinéma). Bien vu, Monsieur Williamson.
L'interrogation est pertinente et feint à merveille l'humilité: comment dépasser les codes, transcender un genre éculé, surprendre le spectateur en l'attaquant là où il ne s'y attend pas. Craven et Williamson mettent en avant ce qui semble être la principale innovation de la décennie 2000: l'internet et le 2.0. Cela change le but du (des) tueur(s). Ca ne change presque en rien ses pratiques. Le tueur cherche désormais la gloire et il sait que c'est par le net que cela s'obtient.
Deuxième thème génial : la célébrité, son obtention. Les deux hommes semblent lucides là dessus. Le web permet à quiconque de devenir quelqu'un, non pas parce qu'il est doué mais parce qu'il lui est arrivé quelque chose. Merveilleuse idée bien sûr de faire porter cela à la disparue Neve Campbell qui ne tourne plus nulle part et qui pourtant, le mériterait presque tant elle n'a rien perdu ici.
Ce n'est pas le cas de David Arquette, plus mauvais et hideux que jamais. Aucune de ses expressions faciales n'est interprétable de façon univoque. On ne comprend rien aux sentiments qu'il ressent... Et son personnage est grotesque. Et c'est bien là que le bas blesse. Ils ont beau se moquer du Saw de James Wan et de ses séquelles parce qu'ils sont putrides et que leurs personnages sont creux, mais que dire de ceux développer dans Scream?
Que dire aussi de ce traitement parodique qui écrase toute possibilité d'effroi? Pas l'ombre d'un frisson, pas l'aune d'un tremblement... Rien. Scream, s'il a voulu surprendre, à choisi de le faire en se rapprochant non pas des slashers ou des rap and revenge modernes qui tendent vers plus de réalisme (comme l'excellent The Horseman, vu samedi soir à l'ex-Absurde Séance rebaptisée Panic!Cinéma) mais de ses parodies. On a donc le sentiment d'être plus souvent dans Scary Movie qu'ailleurs, les vannes foireuses ponctuant des moments de tension délicats. Et en choisissant l'auto-parodie, le clin d'oeil forcé à sa propre "légende", ce Scream 4 perd pied complètement et rate complètement son créneau : l'effroi.
"New decade. New rules" titre pompeusement l'affiche US. Et bien non, les règles n'ont pas changé. Et pour preuve, je vais spoiler. Ceux qui ne veulent pas la suite sont priés de partir ou d'aller au dernier paragraphe. Craven et Williamson, s'ils avaient vraiment voulu surprendre et innover auraient mis un terme à une partie de l'histoire, auraient pris le risque de faire crever un des trois personnages historiques de la saga, voire les trois. Il n'en est rien. Ils nous le font miroiter à chaque fois mais n'ont pas les couilles de le faire. Du coup, ce sont tous les gamins qui en prennent plein la gueule, et cela nous ennuie.
Non, rien n'a changé. Si ce n'est qu'à trop se reluquer le nombril, Scream 4 en a perdu le sens de l'épouvante et qu'à trop vouloir simuler l'introspection volontariste qui mènerait au changement, il se vautre dans une pâle caricature. Dans le fond, la population de la salle reflétait bien ce qu'il y avait à voir. Les jeunes comme les vieux venaient voir comment on frissonnait dans les 90's et tous en sont sortis en riant. Bel enterrement.
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